Chapitre 31.1

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{Younger-Ruel}

-Tu as l'air bien sérieuse, tu me fais peur, qu'est-ce qu'il se passe?

Je prends mon courage à deux mains, je préfère tout lui dire clairement et simplement.

-Tu sais que Madelyn part début juillet à Philadelphie pour changer de cursus...

-Oui je vous ai déjà entendues en parler mais je ne vois pas trop le rapport.

Malheureusement je pense qu'il va rapidement le comprendre.

-Elle m'a montré un programme proposé par la même université. C'est basé sur la psychologie avec aussi un stage à côté des cours. Il y aura plein d'intervenants de renommée mondiale et ça ouvre beaucoup de portes pour...

-Viens-en au fait June.

Je sens qu'il commence à s'énerver et son humeur change totalement. Il s'impatiente pour que je sorte exactement les mots qu'il attend. Ceux qu'il refusera d'entendre mais qu'il connaît déjà.

-Je me suis inscrite il y a un mois même si...

-Et tu ne m'as pas consulté bien sûr.

-Je suis désolée mais il y avait des milliers de participants pour seulement trente places alors c'était presque impossible.

Un rude silence s'installe, je ne sais plus trop quoi lui dire. Le discours que j'ai imaginé pendant des heures me semble bien bête maintenant. 

Il détourne le regard et se concentre sur l'extérieur. Je suis presque étonnée qu'il ne s'énerve pas même si je ne l'ai jamais vu avec cette attitude.

-Donc pourquoi me dire ça maintenant?

Ses questions sont si rudes qu'elles me transpercent de toute part.

-J'ai reçu les résultats aujourd'hui.

Il balance sa tête de droite à gauche puis se lève en soupirant. Il ne me lâche pas même un seul regard. Cette situation est une des pires que j'ai dû affronter. 

Il s'approche de la fenêtre, je vois ses mains se crisper. Dans un soupir douloureux, je prononce des mots affreux et honteux, et je me rends compte de ce que je viens de faire alors.

-J'ai été accepté et je pars dans un mois.

Dans un geste rapide, il renverse les livres et autres objets posés sur son bureau. Je ne l'ai jamais vu dans cet état, je me recule un peu sur le lit pour contenir mes larmes et ne pas attiser sa colère. Je ferme les yeux et me concentre sur les bruits de ce massacre. 

Le verre du cadre sur la table de nuit se brise. C'est une douloureuse métaphore qui me rappelle que c'est plutôt moi qui ai brisé la flamme qui brûlait entre nous deux. J'ai éteint ce feu pour des raisons égoïstes certes mais au plus profond de moi je sais que je ne peux refuser cette chance que l'on m'offre. 

Je ne perçois soudain plus aucun son alors je rouvre les yeux pour apercevoir Adan devant la porte comme prêt à partir et à me laisser. Je dois tenter de lui parler, de le retenir, je sens ma vue se brouiller.

-Adan parle-moi s'il te plaît, ne pars pas comme ça, on doit en discuter.

Il se retourne avec un sourire que je n'ai jamais vu, je croyais tous les connaître et les aimer. Mais celui-là me terrifie et me glace jusqu'au sang.

-Je t'aime trop pour te perdre et je me détesterais de te laisser partir June mais j'ai besoin de réfléchir loin de tout ça, loin de toi.

Les secondes s'arrêtent de tourner, ses mots ont rouvert une plaie ouverte en moi et je saigne de l'intérieur. Je sens à nouveau cette impression d'abandon que je hais par-dessus tout. 

La porte de la chambre se claque et celle de l'entrée suit. Je me vois alors dans un miroir à travers le temps, et je déteste cette impression de déjà-vu. C'est moi tout entière que je ne peux plus voir maintenant. 

Je laisse une première larme s'échapper et les autres la rejoignent. Elles me brûlent la peau comme les eaux de l'enfer qui s'écouleraient contre mes joues. Je m'étais promis d'arrêter de pleurer mais c'est plus fort que moi. 

J'ai peur de le perdre, peur de faire une erreur. Quelques secondes plus tard, dans un geste désespéré, je m'empare de mon téléphone.

-Allô June?

-Madelyn,...je...je...il est...

-Attends je comprends rien à ce que tu dis. Respire et reprends ton souffle.

Je fais exactement ce qu'elle me dit puis je reprends ce douloureux récit.

-J'ai été choisie pour Philadelphie, je suis retenue...

J'entends sa joie à travers mon portable, elle est heureuse et je ne le suis pas.

-C'est génial j'y crois pas on pourra être ensemble, ça va être incroyable.

-Je ne suis pas sûre d'y aller, je l'ai dit à Adan et il n'a pas apprécié.

Elle soupire, prenant compte de chaque élément, elle modèle sûrement une réponse.

-Je le connais bien et surtout je vous connais, vous. Je savais pertinemment qu'il ne voudrait pas que tu t'éloignes. Je ne t'obligerai pas à me suivre mais pense à la chance que tu as et ce qu'elle pourra t'aider à construire. En plus ce n'est pas quelques kilomètres qui vous sépareront.

Elle a raison comme toujours, elle parvient à trouver les mots. Nous avons vécu tant d'épreuves et je refuse de tout arrêter pour partir à Philadelphie. Je pense que ça peut marcher, lui ici et moi là-bas mais il faut encore qu'il soit d'accord et qu'il réapparaisse. 

Je parle encore quelques minutes avec Madelyn pour certaines modifications dans nos derniers plans. Elle sait me faire oublier le fait que la maison est bien vide sans lui. Lorsque je raccroche, Anna me vient à l'esprit, j'espère qu'elle n'a pas vu son frère partir comme un fou furieux. 

Je sors dans le couloir et tout est étrangement calme, Gwen et Lukas sont sortis, Cole doit probablement être avec Haven. Je préfère qu'aucun ne soit témoin de ce massacre. Mes larmes ont à nouveau envie de ressurgir lorsque je vois Anna recroquevillée sur elle-même assise sur le canapé du salon. Je m'approche doucement et m'assieds à côté d'elle.

-Pourquoi mon frère est parti comme ça, il n'a rien voulu me dire...

-C'est compliqué Anna, des histoires de grands.

Elle se retourne vers moi et ces yeux que je reconnaitrais entre mille, identiques aux siens, me transpercent. Elle paraît si mature et je ne sais pas quoi répondre.

-Je n'aime pas le voir dans cet état. Il partait de la même façon et avait le même regard quand maman était,...enfin tu vois.

C'est dur d'être comparée à leur mère qui les a aussi abandonnés dans un sens. Ils ont dû affronter seuls la vie bien qu'ils se soutenaient l'un l'autre.

-C'est de ma faute Anna je suis désolée mais je vais bientôt partir loin et on ne se reverra probablement pas avant plusieurs mois.

Elle me regarde encore de ses yeux d'enfants. Elle cherche à l'intérieur de moi des réponses, j'acquiesce lorsqu'elle souhaite me poser une question.

-Est-ce que tu aimes vraiment mon frère June?

-Évidemment...

-Alors pourquoi est-ce que tu t'éloignes de lui.

Don't look at my past [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant