Don't look at my past [Terminé]

Chapitre 31.2

{Not Gonna Cry-Emma Steinbakken}

Je remonte dans la chambre après avoir incité Anna à faire de même dans la sienne. Elle comprend bien trop les choses pour son âge et ce qu'elle m'a dit m'a bouleversée. Je m'assois à la même place sur le lit, sa guitare est en attente. 

Les rayons du soleil s'y reflètent et elle paraît bien triste sans des mains agiles pour la faire résonner. Ce silence est pesant, je dois chercher un moyen de le combler. Comme une vieille habitude, j'attrape mon téléphone. Une photo de lui et moi apparaît sur l'écran d'accueil, je lance instinctivement une de ses musiques. 

En fermant les yeux je pourrais peut-être me dire qu'il n'est pas réellement parti. Alors je ferme délicatement mes yeux, dans un premier temps pour empêcher les larmes de couler. Je ne m'endors pas loin de là mais je replonge dans mes souvenirs. Je cherche un beau moment qui pourrait me faire oublier la situation tortueuse dans laquelle je me trouve.

-Viens t'allonger, le film va bientôt démarrer.

Je me détourne de la fenêtre pour découvrir une image qui embellit immédiatement cette pièce. Adan est assis sur son lit, l'ordinateur sur ses jambes. Il me sourit.

-J'arrive, excuse-moi, je...

-Observais les étoiles. J'ai remarqué que tu le faisais souvent, en fait j'aime bien te regarder toi, mon étoile, lorsque tu les observes.

Il lit en moi comme dans un livre ouvert dont il connaîtrait chaque mot, chaque métaphore. Je ne m'étonne même plus qu'il remarque ce genre de détails.

-Le ciel m'a toujours passionnée, la nuit, la lune, les étoiles sont tant de mystères.

-Tu crois en l'astrologie et ce que disent les étoiles?

Je me retourne vers l'obscurité pour réfléchir à sa question.

-Je ne sais pas si le fait d'être né un jour et pas un autre changera particulièrement ton destin ou ton caractère. Mais ce dont je suis persuadée, c'est que ces astres sont comme des messages, comme nos reflets et qu'ils peuvent nous apprendre beaucoup sur nous-mêmes.

Son sourire s'élargit et il semble boire mes paroles, je me rapproche de lui et me glisse sous la couette à ses côtés. Il m'embrasse et me sert dans ses bras.

-Un jour, je trouverai une chose aussi belle que toi dans le ciel et je te la montrerai. Ce moment sera aussi magique que chacun de ceux que je passe à tes côtés.

Je ramasse quelques feuilles qu'il a évincées de son bureau tout à l'heure. Ce sont de nouvelles chansons qui me font à nouveau remonter dans le temps.

Adan est assis sur la chaise de bureau et je l'observe avec de grands yeux depuis le lit. Je suis supposée réviser pour mes examens mais je ne peux m'empêcher de le dévorer du regard. Il gribouille ses feuilles depuis au moins une demi-heure.

-Ce sont des nouvelles chansons?

-Je ne sais pas...peut-être.

Il me nargue avec un sourire solaire qui rayonne et illumine la chambre entière.

-Il me manque certains couplets encore mais elles avancent bien.

Je m'étire pour tenter de voir les paroles mais il m'en empêche en pliant la feuille en deux. Je rigole et me replonge dans mes pensées.

-Comment tu fais pour trouver ton inspiration?

-Je pense à ce que j'aime le plus. Et elles parlent essentiellement de toi...

Mes pensées sont interrompues lorsque la porte de la chambre se referme et la silhouette d'Adan apparaît. Mais ce n'est pas lui. Il est debout devant moi, les yeux injectés de sang , les phalanges rougies. Il est évident que vu son attitude et sa posture il est totalement bourré, je ne l'ai jamais vu comme ça même à une fête.

-Tu es encore là.

-Je n'allais pas partir, on n'avait pas fini de parler.

Je m'approche de lui doucement mais il me repousse comme si je le répugnais, ça me brise intérieurement. Il s'avance de quelques pas peu certains vers son lit.

-Tu me donnes mal à la tête et j'ai absolument pas envie de te parler là maintenant.

Je ne suis pas restée à l'attendre pour me faire insulter ou qu'il me traite de cette façon alors je me prépare. Ses propos vont être blessants.

-Ne me fais pas ça, et ne me parle pas comme à ton chien. Tu rentres complètement bourré au bout de plusieurs heures, tu as pensé à Anna? Non bien sûr que non, tu ne t'es pas dit qu'elle détesterait revivre la même situation qu'avec votre mère.

Son regard tueur se pose sur moi lorsque je prononce ces derniers mots, il se rapproche dangereusement. Si je ne le connaissais pas bien j'aurais vraiment peur.

-Je t'interdis de me comparer à elle, c'est qu'une....

-Alcoolique? Regarde ton état Adan tu vaux mieux que ça.

Il parcourt la pièce d'un pas rapide, cherchant quelque chose de fragile à détruire hormis notre relation. Mais il semble perdu, c'est moi qui lui ai fait ça.

-Tu te rends compte de ce que tu me fais. Depuis que tu es rentrée dans ma vie, c'est le bordel. Et du jour au lendemain Madame décide de se barrer à l'autre bout du pays pour un putain de cursus de merde en psychologie.

-C'est une chance pour moi ce "cursus de merde" comme tu l'appelles j'espérais que tu pourrais au moins le comprendre mais tu n'en as rien à foutre de ce dont j'ai envie.

Je n'aime pas la tournure de cette conversation.

-C'est ça, une chance de t'éloigner de moi. Il fallait me le dire plus clairement si tu voulais qu'on se sépare, je suis pas débile j'aurais compris.

Il est vexé et je le comprends, pour cette raison je ne peux lui en vouloir. Mais le voir ivre à me balancer tout ce qu'il souhaite à la gueule m'attriste réellement.

-Tu te barres sans m'en parler, tu fais tes plans toute seule avec ta copine Madelyn. Si tu veux parler d'Anna aussi allons-y. Elle te considère comme sa sœur, et tu oses l'abandonner alors que je lui ai promis qu'on passerait du temps ensemble.

-Je suis désolée, vraiment mais...

-Non tu n'as rien à dire c'est toi qui fous la merde sur ce coup-là.

Il s'assoit sur le bord de son lit et fait la dernière chose à laquelle je m'attendais. Il plonge son visage dans ses mains et je crois bien qu'il pleure. 

L'alcool le rend tellement différent mais voir ces larmes me donne un air affreusement coupable. J'ai la sensation d'être la méchante de l'histoire, je tente de le réconforter.

-Adan j'ai jamais dit qu'on devait se séparer.

Il marmonne quelques mots que je parviens à peine à discerner.

-Tu m'abandonnes, tu avais promis de toujours être là. Mais tu ne vaux pas mieux qu'elle. Toutes les deux vous vous amusez à devenir les choses qui comptent le plus pour moi et vous disparaissez. 

Peu importe ce que tu feras, où tu seras ou à qui tu penseras, je t'aimerai. Un jour tu ouvriras les yeux pour voir que je suis juste là devant toi et que tout ce qui compte pour moi c'est toi et ton bonheur.

Je me rapproche encore pour tenter de prendre ses poignets.

-C'est fini June, dégage et laisse-moi retrouver ma vie, casse-toi à Philadelphie.

Sur ces mots, je pars en laissant tout derrière moi, je croise Anna qui comprend bien évidemment qu'elle ne me reverra peut-être pas. Je dois m'éloigner de cette ville.