Gus était en retard, ce qui ne lui arrivait jamais. Il m'avait donné rendez-vous hier au parc de jeux mais il était 10h et il n'y avait toujours aucune trace de lui. M'avait-il oublier ? Je ne le pensais pas, je ne l'espérais pas. Je m'étais fait aussi beau que possible. Je n'avais pas pris mon téléphone et j'espérais son arrivée depuis au moins deux heures. A 11h50, je pliais bagage si je puis dire. Il n'avait pas l'intention de venir.
J'espérais que rien de mal ne lui soit arrivé mais qu'il aurait une bonne excuse pour m'avoir laissé poireauté pendant des heures dans ce parc humide. Je n'avais pas le coeur à aller sur le ponton pour vérifier sa présence, voir si c'était simplement moi qu'il ne voulait pas voir, alors je suis juste rentré chez moi à pied lentement. Je pensais que l'on avait un rituel, quelques choses de sacrée, on se retrouvait le matin, on passait la journée ensemble à rire, à se raconter nos vies, à faire semblant de ne pas avoir fait exprès de se toucher, de se frôler et l'on s'étreignait avant de rentrer.
Plus l'été avançait et plus je me disais que j'allais mieux. J'avais enfin compris que ma petite amie me prenait pour un con et un esclave, que je ne devais pas changer pour correspondre à l'image que les autres voulait de moi. Mais juste être moi, Áilleacht, comme le disait Gus. Je n'avais encore aucune idée de la signification de ce mot mais lorsqu'il sortait de sa bouche, j'avais soudainement envie de plonger dans de l'eau glacé.
Ça avait un son exquis lorsque ça sortais de sa bouche fine et sexy. J'avais envie d'être l'image de moi qu'il voyait, cette Áilleacht qu'il semblait faire couler de sa langue avec une palette infinie de douceur et de luxure. Depuis que je lui avais tendu la main pour qu'il s'en saisisse, je ne pouvais plus me passer de ce contacte. Aussi simple soit-il. Il me fallait toujours plus de preuve de sa présence, comme si une simple étincelle pouvait le faire disparaître.
J'aimais son rire franc plein de joie, son sourire parfait, sa bouche pulpeuse et rouge, sa voix qui m'appelait Áilleacht avec tellement de fièvre, sa douceur, sa gentillesse, sa façon de me chercher du regard et ses yeux, bordel ses yeux me rendaient dingue, il n'avait pas conscience qu'ils me rendaient fièvreux, en ébullition.
- Áilleacht, cria-t-on derrière moi.
Un frisson passa le long de ma colonne vertébrale, comme une douche froide pareil à un sentiment de plénitude. Je me retournais pour le voir courir la pente qui menait à chez moi, il avait l'air essoufflé et pas très bien dans ses baskets. C'était la première que je le voyais comme ça, abattu. Il me filait les jetons.
- Tu veux en parler ?, lui demandais-je.
Il se contenta de hocher la tête comme abattu. Je lui tendit la main dont il se saisie tout de suite pour monter jusque chez moi. C'était un geste naturel de prendre sa main, parfois, alors qu'il avait les yeux fermés, le visage vers le ciel, je jouais avec ses doigts en discutant avec lui. Ma mère regardait un documentaire sur les baleines, Doug était à ses pieds, la télécommande à la main, le livre qu'elle venait de finir sur la table basse, un plaid sur les genoux. Elle eue un grand sourire à la vue de Gus, elle l'aimait déjà.
- Bonjour mes aventuriers ! Vous avez bien fait de vous réfugier à la maison, nous dit-elle. Le temps commence à se gâter.
C'était vrai, les nuages gris menaçaient de faire tomber le déluge et le tonnerre et les éclairs n'allait pas être bien loin. La main de Gus toujours dans la mienne je m'exclama :
- On monte.
- Pas de problème les poussins.
Elle avait au moins rendu le sourire à Gus. Comme la première fois, il regarda ma chambre dans son ensemble pendant que je refermais la porte derrière nous. Elle n'avait pas changé, à part deux ou trois bricoles par-ci par-là. Il enleva sa veste et s'asseya sur le lit avant de si laisser tomber sur le dos en soupirant et en fermant les yeux. Il portait un simple jean bleu foncé qui retombé légèrement sur ses hanches et un t- shirt à l'effigie d'un groupe de rock.
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Áilleacht
RomansC'est temps-ci, pour sa famille du moins, Gus était morose, triste, dans les nuages. En réalité, il s'ennuyait. Sa vie lui semblait sans grand intérêt et cet été là ne ferait pas exception, surtout que ses amis partaient. C'est temps-ci, pour ses p...