Les préparatifs du lendemain avançaient bon train. Tyler, Amed et Tim d’un côté, Patrick et Adam, de l’autre. Pour ma part, mon équipement restait des plus simples. Appareils, cartes mémoires, batterie de rechange et objectifs. Donc vite prêt.
— Tu ne m’as pas raconté ton week-end avec tout ça, lança Tyler.
Je m’interrompis et le regardai par-dessus mon épaule, lançant un coup d’œil à Amed et Tim.
— Ça serait bien pour ça que tu te débarrasses de tes poissons-pilotes, chuchotai-je.
Sa mission achevée, je parlai enfin de mon week-end, ma sortie à la patinoire, et sous son regard soupçonneux, j’orientais volontairement mon discours sur mes sensations de malaise par rapport au terrain vague. Je lui parlai des moments passés avec Martha, Vicki, les jumeaux. Ma rencontre avec Harold, Noa. Le poulinement de Kalinka, ma journée passée avec Tommy, et celle de dimanche avec les ranchers. J’insistais sur ces étranges impressions de déjà vu, tout comme ces rêves que je faisais depuis mon arrivée dans la région sans toutefois lui avouer ma décision de quitter le ranch.
— Je constate que tu as passé un bon moment.
— Oui, j’ai passé un merveilleux week-end.
— Alors pourquoi je t’ai retrouvée en pleurs hier matin ?
Je lui lançai un regard décontenancé.
— À cause de toutes ces sensations, toutes ces impressions. Elles me perturbent et me déstabilisent. Suzy croit déjà que j’ai la tête en vrac, tu ne vas pas t’y mettre non plus !
— Bien sûr que non. J’ai une longueur d’avance sur Suzy.
— Laquelle ?
— Je t’ai vue à ton réveil. Et tu avais réellement l’air terrifié. C’est pour cela que je me demande maintenant si c’est vraiment une bonne idée que tu continues.
— Hier, tu voulais me traîner par les cheveux.
— C’était avant que je te voie, Sam. Je ne veux pas que tu restes ici. Je veux que tu quittes cet endroit. Si tu veux, j’irai parler à Mark. Il comprendra.
Je sentis le sang quitter mon visage et me précipitai.
— Non ! Surtout pas !
— C’est quoi ton problème ? questionna-t-il maintenant surpris et contrarié par mon ton. De quitter cet endroit ? De parler à Mark ? Ou de quitter cet endroit et Mark par la même occasion ?
— Qu’est-ce que tu racontes ? Il n’a rien à voir dans l’histoire.
— Ne me prends pas pour un imbécile. À défaut de le connaître lui, je te connais toi.
— Tu te méprends, Tyler. Si je veux rester, ce n’est pas pour la raison que tu penses. Je vis sous le même toit, mais il est mon patron, même si cela reste une situation peu commune.
J’abattis ma dernière carte.
— Quoi qu’il en soit, pas une journée ne passe sans que l’on en vienne quasiment aux mains. Il attend que je flanche pour me prouver que je ne suis pas à la hauteur et qu’il avait raison d’émettre des doutes à mon égard. Si je renonce aujourd’hui, ce serait prouver qu’il a raison, mais surtout, ce sont toutes mes convictions que je rejette, tout ce pour quoi je me suis battue. Deuxièmement si je reste, c’est pour moi. Si je veux appréhender mon passé, il est peut-être temps d’y faire face. Je ne vais pas fuir sans cesse. J’ai besoin de toi, mais tu as le droit de refuser. Et dernière raison, vous seriez totalement perdus sans moi, ajoutai-je plus légère.
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L'ombre D'une Autre
RomansaAvril 1996. Deux fillettes de neuf ans disparaissent à quelques heures d'intervalle. Melinda, dans l'état du Montana. Samuelle, dans celui du Wyoming. Seule Samuelle sera retrouvée quatre jours plus tard. Amnésique et souffrant de profondes contusio...