Chapitre 36

118 14 0
                                    

« Les claquements du tonnerre, déchirants. Le froid. Courir, mais ne pas avancer. Crier, mais sans aucun son franchissant mes lèvres. Être aspirée par le vide. Un hurlement. Le mien lorsque les bras m’encerclent. Cette peur panique, paralysante. Ce sentiment d’abandon et de profonde solitude. Je me débats et tente de me dégager. Mais la peur m’asphyxie. Elle m’empêche de respirer librement. Des sons qui m’arrivent étouffés, inquiétants. »

— Samuelle !

Je me concentrai sur cette voix, sur ses intonations, son timbre, jusqu’à ce que je la reconnaisse. Son bras m’entoura les épaules, une de ses mains me caressait les cheveux tandis que sa bouche me couvrait de légers baisers, tentant d’apaiser mon état d’angoisse. Je me laissai bercer par ses mots murmurés, rassurants. Sa seule présence suffit à calmer mes tremblements, et je retrouvai une respiration plus régulière et mesurée. Il se recoucha et m’entraîna doucement avec lui, ses mains effectuant toujours leur mouvement régulier. Je reposai ma tête dans le creux de son épaule et laissai les battements puissants et réguliers de son cœur m’apporter un ultime sentiment de sécurité.

— Il y avait une cabane… Mais plus grande qu’une cabane de chasseur. En fait, ça ressemblait plus à un chalet de vacances.

— Une cabin peut-être ?

— Non. Je suis certaine que ce n’en est pas une.

— Qu’est-ce qui te fait dire cela ? demanda-t-il doucement, ses mains me caressant toujours les cheveux.

— Je ne sais pas… c’est confus. Mais c’est ce qu’elle dégageait. C’est étrange, repris-je après un court silence, sentant que ma respiration redevenait normale. Derrière l’aspect sombre et effrayant de cette cabane, c’est comme si elle refermait quelque chose de beau, qu’elle avait une histoire. Ça doit te paraître absurde.

— Non. Des bribes de souvenirs sont en train de ressurgir. Laisse-leur le temps de remonter à la surface et de prendre leur place dans ta mémoire.

— Je suis certaine de ce que j’ai vu, et que cette cabane existe. J’ai eu la même sensation le jour où je vous ai accompagné en plaine les ranchers et toi et que j’ai fait ce malaise. Lorsque tu as touché ma cicatrice, cela m’a tétanisée. Deux secondes plus tard, je me retrouvais dans une pièce qui ressemblait fort à une chambre d’enfant. Je sais qu’elle existe.

— De quoi d’autre te souviens-tu ?

Je plissai le front, me concentrant, mais seuls le vide et la frustration vinrent à ma rencontre.

— Rien… Je voudrais tellement comprendre. Te donner des réponses… Je suis désolée…

Il me redressa le menton pour m’embrasser délicatement sur les lèvres.

— Arrête de t’excuser. Et essaie de dormir. Je suis là, pour et avec toi.

Je fermai les yeux, apaisée, sachant que Mark serait le gardien de mon sommeil.

Neuf jours. Dix nuits avaient été le temps accordé avant que mon passé ne me rattrape. J’eus beau me réfugier derrière un bonheur sans conteste, je savais que tant que l’ignorance avait sa place en moi, tant que sa brèche ne serait pas comblée, je ne trouverais pas le repos.

Ses yeux étaient vifs et scrutateurs. Il était exactement tel que je me le représentais. Un homme athlétique, souple. Je devinai sa résistance à l’effort sous une musculature discrète, mais présente. La finesse de ses traits entrait en contradiction avec le monde rustique et rude dans lequel il vivait. Ses cheveux blonds lui donnaient un air juvénile malgré sa quarantaine. Seule une profonde ride lui traversant le front de part en part laissait présager une vie qui pouvait se montrer stressante et difficile.

L'ombre D'une AutreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant