J’avais mal. Le trajet du retour fut pire qu’un chemin de croix. Je conduisais par automatisme, ressassant notre conversation de la veille. Oui, j’étais naïve…
Non, tu n’es pas naïve. Tu n’es qu’une imbécile !
Bien sûr qu’il savait pour Adam ! Mes petites investigations devaient le faire bien rire. La seule chose dont j’étais certaine est qu’il ignorait le lien direct entre Adam et Peter’s. J’avais beau être une imbécile, je comprenais aussi que cette histoire me dépassait totalement. Les complots en tout genre n’étaient pas mon pain quotidien. Ce qui l’était par contre, c’était d’avoir cru, à tort, par pure vanité peut-être, qu’un homme comme lui pouvait s’intéresser à quelqu’un comme moi.
Je jetai un regard sur la pochette cartonnée de Charlie posée sur le siège passager. C’est sur ce qu’elle renfermait que je devais me concentrer dorénavant.
Je franchis enfin les portes du ranch, et sentis de nouveau ce nœud se former à l’idée que ce serait la dernière fois. Une partie du trajet, mon esprit avait vagabondé du côté du pont suspendu. J’avais le temps de m’y rendre et de quitter définitivement cet endroit, avant qu’il ne rentre.
Mes bagages étaient chargés dans le coffre de ma voiture. Je pénétrai dans la cuisine pour déposer sur l’îlot central, la clé, le morceau de papier avec le code et le chapeau…
Ce dernier m’évitait toutes explications.
Je fus accueillie par une tempête.
— Sam ! Mais tu étais où ? lança vivement Vicki. On te cherche depuis hier. Tu aurais pu nous prévenir Bon sang ! reprit-elle visiblement soulagée tout en me prenant dans ses bras, ne refais plus ça. Tu nous as fichu une sacrée trouille.
Elle s’écarta pour me regarder droit dans les yeux.
— Tu vas bien ? demanda-t-elle face à mon manque de réaction.
— Ça va. Ne t’inquiète pas. C’est seulement que je ne suis pas habituée à ce que l’on prévienne la terre entière lorsque je ne donne pas de nouvelles une soirée.
— Ne le prends pas comme ça ! On s’est fait du souci et Mark également si tu veux savoir ! Mais que s’est-il encore passé ?
— J’avais un problème familial à régler, éludai-je. J’ai dû prendre l’avion pour Worland et je n’ai pu prévenir personne. Excuse-moi de ne pas t’avoir avertie… sincèrement.
Elle mit un temps avant de me répondre.
— Problème familial ou non, ne recommence plus ! Et ton problème, c’est résolu ?
— Non, pas tout à fait. Il y avait un ennui avec la tombe de mon père.
— Oh… je ne savais pas, excuse-moi…
— Vicki… je vais quitter le ranch, définitivement… J’attends uniquement le retour de l’équipe et des ranchers, s’ils ne rentrent pas trop tard. Je voulais vous dire au revoir.
Pendant une dizaine de secondes, un long silence s’installa dans la pièce. Vicki sembla mettre du temps à assimiler ma phrase, tout comme j’en pris conscience en même temps que j’en compris la portée, et ma gorge se noua encore plus.
— Je repars seulement un peu plus tôt que prévu. C’est peut-être mieux ainsi.
J’essayai de prendre un ton plus léger souhaitant détendre cette atmosphère devenue lourde, chargée de non-dits. Vicki m’abandonna pour ranger une pile de magazines pourtant déjà ordonnée, et m’adressa la parole, la voix enrouée. Visiblement, elle s’appliquait à reprendre contenance, et de l’entendre me bouleversa.
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L'ombre D'une Autre
RomansaAvril 1996. Deux fillettes de neuf ans disparaissent à quelques heures d'intervalle. Melinda, dans l'état du Montana. Samuelle, dans celui du Wyoming. Seule Samuelle sera retrouvée quatre jours plus tard. Amnésique et souffrant de profondes contusio...