Chapitre 2

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MATTÉO

Je ressors du lycée en soupirant. Mes pas traînants résonnent sur le béton des rues. La rentrée est demain et j'appréhende ce retour à la civilisation. Enfin, pour moi, ce n'est pas vraiment demain. Il faut d'abord que je passe par le secrétariat pour rendre des documents et en recevoir d'autres. La montagne de paperasse me donnerait presque le tournis. Je ne pensais pas que c'était aussi long de se faire transférer dans un autre lycée. Pendant l'été, je n'ai pratiquement vu personne, à part les amis de ma grand-mère et mes parents qui sont venus me rendre visite quelques fois. Je suis aussi à peine sorti, sauf pour promener ma chienne ou faire les courses.

Mes parents ont accepté à la fin de mon année de première que je vienne vivre chez ma grand-mère pour ma dernière année de lycée, malgré quelques réticences de leur part au début. Je trouve cette petite ville beaucoup plus apaisante par rapport aux bruits assourdissants de certaines villes plus peuplées. Aucune voiture pour vous klaxonner violemment juste parce que vous avez grillé un feu rouge, pas de bruits de moteur à chaque coin de rue... le paradis en somme. Je me sens un peu revivre ici. C'est une nouvelle année pour moi. Un changement radical que j'ai choisi tout seul. Un nouveau moi est né, dicté par une seule et même pensée : ne pas laisser les autres m'approcher.

J'ai pris cette décision bien avant de m'installer ici. L'atmosphère étouffante de mon ancien environnement devenait invivable. J'avais besoin de changement. De CE changement tout particulièrement. J'ai laissé derrière moi ma famille, mes amis, mes habitudes... tout ça pour tout recommencer. Ou plutôt pour pouvoir avancer. Ce déménagement est ma thérapie. Celle qui me permettra enfin d'aller de l'avant. Mais ce changement interne, je veux qu'il vienne de moi. Depuis quelques mois, les relations sociales ne m'attirent plus. Je ressens le besoin de m'isoler, de me renfermer. La présence des autres, tantôt m'insupporte, tantôt m'effraie, parfois les deux. Voilà pourquoi cette année, je ne parlerai à personne. Je resterai dans l'ombre, comme le gars solitaire de la classe qu'il ne faut pas aller voir. La solitude est à présent mon maître mot. Et le véritable challenge commencera demain.

Après tout, le lycée est un lieu fourmillant d'individus en pleine construction d'eux-mêmes et donc à la recherche de personnes pouvant les accompagner dans leur quête de leur véritable personnalité. Dans ces conditions, difficile de ne pas s'attacher un tant soit peu à quelqu'un. Mais je ferai attention. Tout restera enfoui au fond de moi, comme un secret gardé au fond d'une malle dont j'aurais jeté la clé dans un profond océan de souvenirs douloureux.



SKY

Il est 17h et la journée de présentation des clubs se termine. Sachant qu'elle a commencé vers 13h, les élèves ont eu le temps de faire le tour de tous les stands normalement. Je passe rapidement voir tous les clubs dont je fais partie. L'Association des élèves n'a comme chaque année, reçue qu'une ou deux demandes d'inscription. Mais aucune importance. Au moins notre groupe ne compte que des fidèles. Oula, ça ne fait pas un peu trop secte ? Enfin bref, l'équipe de rêve quoi. Même s'il va quand même falloir recruter d'autres personnes quand moi et quatre autres terminales serons partis. Pour le club de poterie, nous n'avons reçu que cinq inscriptions. Pourtant, ils étaient au moins vingt devant le stand tout à l'heure, non ?

« Ils sont juste venus pour le spectacle..., soupire Paul en parlant de notre démonstration de tout à l'heure.

- Au moins, on a pu montrer ce qu'on savait faire ! ajoute Juliette.

- Oui, et puis c'est pas le nombre qui importe, c'est l'ambiance qu'on met ! intervient Baptiste.

- Je suis d'accord ! On ne doit pas être déçus. Vous avez très bien représenté notre club après tout, les encouragé-je.

L'ombre de nos viesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant