Chapitre 28

95 3 0
                                    

Quand je me réveillai, Julien était assis sur la chaise qui se trouvait à côté de mon lit. Il pianoter, le regard et le visage sur l’écran de son iPhone ; le son des touches de son téléphone brisaient, accompagnés de la trotteuse de l’horloge le silence de la pièce. Je bougeai dans mes draps et baillai ce qui fit relever le menton à Ju: il me regarda et me sourit avant d’éteindre son téléphone et de le glisser dans la poche de son jeans. Je l’aimais plus que jamais, il m’était irrésistible, il venait de me faire plus beau cadeau du monde. Certes j’avais peur pour ma fille mais j’étais comblée : j’étais maman. Toute ma vie jusqu’à maintenant je voyais la maternité comme une charge évitable, un esclavage choisi par des femmes qui comblaient leur manque d’affection que leur octroi leur conjoint par la venue d’un enfant. Mais non, ce genre de femmes devait certainement exister et existait sans aucun doutes mais moi je n’étais pas de celles : j’étais de celles qui après y avoir goûté, voyaient ce statut comme un plus, l’option avec le volant en moumoute rose.

            Mon prince se leva et vint m’embrasser. J’enroulai mes bras autours de son cou et l’embrassai sur la bouche. Mon étreinte s’intensifia au point qu’il s’assit sur le rebord de mon lit : je l’attirai encore plus vers moi de manière à ce qu’il s’allonge au travers de moi. Je l’aimais à en crever. Mes mains glissèrent le long de son cou puis remontèrent jusqu’au commencement de ses cheveux. Je fis des ronds avec le bout de mes doigts sur son cuir chevelu tandis que lui promenait ses mains le long de mes hanches voir dans le début de mon dos. Après notre baiser, Julien défit mes bras autours de son cou et les fit glisser le long de mes cuisses avant de me lâcher les poignets. Nous sourîmes. Il était beau, ses yeux, son cou, j’avais envie de lui. Il n’avait pas l’air de m’en vouloir et je dis bien il n’en avait pas l’air. Peut-être qu’au fond il était triste, qu’il était en colère. De toute manière je n’en savais rien car mon Julien ne laissait jamais rien paraître du moins surtout devant moi. Peut-être qu’il pleurait sous la douche, dans le lit, le soir quand je dormais.

  Je regardai l’horloge qui se trouvait en face de mon lit : il était midi. J’avais passé un peu plus de deux heures à dormir et je me réveillais presque toujours autant fatigué. Je m’étirai et me leva du lit pour aller en direction de la douche. « Tu te laves ? » me demanda Ju. Je lui fis un « mmmmmh » comme réponse positive. Avant de rentrer dans la pièce, je pris quelques vêtements dans la valise noire que Julien m’avait apportée. Je pris un T-shirt léger pour le mettre sous mon pull irlandais (il faisait extrêmement froid pour nous qui sommes de Bordeaux, l’Irlande au mois de mars…) ainsi qu’un legging avec l’intérieur en polaire. Je rentrai dans la salle de bain et ferma la porte puis j’ôtais ma blouse qui me fut prêtée par la maternité afin de la mettre dans la panière de linge sale. Je me regardai dans le miroir de la salle de bain : je me faisais peur. Comment Julien faisait-il pour m’aimer, pour m’embrasser ? J’avais grossi, mon ventre était dégoutant, je préférais mon bidon de femme enceinte, j’avais le visage gonflé, des vergetures au niveau des hanches et fesses, mes cheveux étaient dans un état pitoyable. Je me jetai sous le jet chaud de la douche : ça me faisait du bien. Je baissai ma nuque et regardait mes pieds (dont le vernis commençait à s’écailler) et profitai de ce moment pour plonger de nouveau dans mes idées et pour penser à un nouveau problème qui faisait surface : nos familles. Je relevai brusquement la tête prise de peur. C’était vrai : elles n’étaient pas directement concernées voir pas du tout mais représentaient un certain problème. Mettez-vous à leur place : votre fils ou votre fille revient avec un bébé sorti de nulle part c’est…c’est compréhensif finalement car c’est un déni de grossesse même si je reconnais que c’est un peu gros à avaler. De plus, le fait que Julien et moi sommes partis en Irlande à des milliers de kilomètres de chez et nous revenions comme par hasard avec un bébé…oui cela peut paraître louche je vous l’accorde.

   Je pris du gel douche et me savonna. Je fis de même avec le shampoing pour mes cheveux. Je me rinçai et ressortis du bac à douche avec ma serviette sur la tête et mon peignoir. Le froid ambiant de la salle de bain me frappa le visage et me donna la chair de poule. Julien frappa à la porte : « Je peux entrer ? » ; je lui ouvris la porte pour unique réponse et il se dirigea vers le lavabo pour se laver les mains. Je frictionnai la serviette sur ma tête pour me sécher les cheveux. Julien sécha ses mains à mon peignoir et me saisit par la taille pour me serrer contre la sienne avant de m’embrasser sur la joue. Je le regardai droit dans les yeux : « Tu me trouve belle ? ». Il me sourit et me répondit dans l’oreille : «  Bien sûr, mais je t’aime avant tout ». Je sortis de son étreinte et lui demanda : « Non mais sérieusement ?-Bien sûr que oui, me répondit-il –Ah bon ? Moi je trouve que j’ai empiré. Vas-y ensuite pour trouver un contrat dans cet état –Mais dans quel état ? –Mais regarde-moi Ju ! J’ai grossi, j’ai pris de la cellulite et j’ai des vergetures et avec tout ça tu me trouves belle ? – Oui, ce que je vois ce n’est pas ce que tu vois et ce que tu aimes ce n’est pas ce que j’aime. Tu sais il y’en a des milliers de mecs qui voudrait t’avoir. » Je le regardai avec des gros yeux, je me jetai dans ses bras et l’embrassa là où il y avait une partie de sa peau qui pourrait apparaître : sa nuque, sa joue,… Je l’aimais à en mourir.

            Quand je fus prête que je sortie de la douche paraît pour le grand froid. Une infirmière venait d’apporter notre repas. Personnellement je n’avais pas faim. Je regardai ce que contenais un bol recouvert de papier d’aluminium : c’était une purée avec des morceaux de poulet. Julien lui non plus n’avait pas trop faim. Je me jetai sur mon lit et agrippa mon coussin pour bredouiller quelque chose d’incompréhensible. J’avais envie de dormir. S’ajoutais à ça le fait qu’après la douleur des contractions, j’avais très mal aux seins : ils étaient lourds et très sensibles ; puis ma douleur « par là où ma fille était passée » : je marchais un peu comme un pingouin mais je supportais tout de même.  Néanmoins, je n’y pensais pas. Je voulais voir Alice. Ce fut quand une nouvelle infirmière vint reprendre les plateaux repas presque vide (entre temps Ju et moi avions un peu grignoté) elle me demanda si je voulais descendre aller voir mon bébé. Je lui répondis oui avec autant d’enthousiasme qu’un enfant le matin de Noël. Elle me proposa par la suite un fauteuil roulant mais je lui dis que je préférais marcher à pieds (on commence par perdre deux ou trois calories) ; je lui posai aussi la question pour ma douleur au niveau des seins et à l’autre endroit. Pour le deuxième problème elle répondit que c’était l’allaitement et pour le deuxième elle me donna des antalgiques que je pris immédiatement puis nous descendîmes.  

           

Intrusøs (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant