Comme des ailes de chauve-souris

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Harry Potter, onze ans, était émerveillé par le nouveau monde qu'il découvrait. Apprendre qu'il était un sorcier avait été la plus belle chose de sa vie, d'après lui. Enfin, il n'était plus le Monstre, l'Anormal, tout juste bon à prendre les coups et à servir d'esclave à sa famille moldue.


En arrivant à Poudlard, il se rendit soudain compte qu'il était loin de sa seule famille, et que son cousin ne serait pas là pour lui pourrir la vie. Au lieu de quoi, il serait libre d'étudier, et de se faire des amis. Pour la première fois de sa vie, il pourrait échanger avec des enfants de son âge sans craindre les représailles.
Il mangerait à sa faim également, sans restrictions. Il aurait accès aux livres et à un vrai lit - qu'il espérait confortable, bien que n'importe quel lit serait assurément mieux que ce qu'il avait connu jusqu'à présent.


Il aimait chaque chose de ce nouveau monde qu'il découvrait, même cet enfant blond un peu prétentieux qui semblait vouloir se faire passer pour le maître du monde alors qu'on lui prenait ses mesures chez Madame Guipure.
Harry se fit son premier ami dans le Poudlard express. Il scella leur amitié sans le savoir en repoussant Drago Malefoy. Après tout, les Malefoy et les Weasley était ennemis depuis si longtemps que repousser l'un revenait à accepter l'autre.


Une fois réparti chez les rouge et or, et installé à sa table, maintenant que l'excitation était retombée, Harry prit le temps d'observer soigneusement ce qui l'entourait. Bien malgré lui, son regard fut attiré par un des professeur. Un homme à l'air austère, renfrogné, aux cheveux noirs et yeux tout aussi sombres.


Les autres professeurs étaient souriants et mangeaient avec appétit, tandis que cet homme le fixait les yeux plissés, l'air mauvais, sans bouger ni chercher à manger quoi que ce soit. Harry frissonna et oublia immédiatement l'incident pour se concentrer sur le meilleur repas qu'il avait jamais eu l'occasion de manger.


Lors de son premier cours de potions, Severus Rogue entra, sa cape volant derrière lui comme des ailes de chauve-souris. Harry fut fasciné par l'aura de l'homme, par son autorité naturelle. Mais l'homme l'humilia rapidement, lui faisant comprendre à quel point il le détestait.
Bien malgré lui, tout son être se révolta à cette injustice. Il avait toujours connu le rejet de par sa famille, et il s'était senti insignifiant depuis toujours.
Mais son arrivée à Poudlard avait changé les choses, et il commençait à trouver sa place. Que ce professeur sombre et aigri le conteste le rendait fou de rage. Surtout parce qu'il insultait James Potter.


Harry ne voyait pas comment il pourrait ressembler à son père puisqu'il ne l'avait jamais connu. Il comprenait que le professeur avait connu ses parents, et qu'il ne les avait pas apprécié s'il s'en référait à son comportement. Mais lui, il n'y était pour rien. Rien du tout.
Alors, il leva la tête et le fixa dans les yeux, le déstabilisant un moment avant de lui répondre. Il écopa d'une perte de points et d'une retenue.


Cet échange donna le ton de leur relation pour les années à venir : Harry refusait de baisser les yeux devant le Maître des potions. Il ressentait encore et toujours le besoin de lui répondre, de ne pas se laisser piétiner par son mépris. Et étrangement, il cherchait son approbation, en permanence. Il le haïssait, et l'admirait. Il hurlait à qui voulait l'entendre qu'il se moquait de son avis, mais il espérait par dessus tout un encouragement...


Lorsque Dumbledore lui imposa des cours d'occlumentie avec Rogue, il pensa immédiatement que ce serait compliqué. Ils ne pouvaient pas se supporter, et ce genre d'initiatives ne pourrait que mener au désastre.
Et effectivement, chaque séance était un calvaire. Humiliations et moqueries d'un côté, résistance et mauvaise volonté de l'autre. Chacun campait sur ses positions.
Le professeur de potions refusait de voir au delà de son propre passé, au delà de James Potter - pourtant mort depuis des années. Et Harry refusait de voir le bien fondé de cette décision, persuadé qu'il pourrait se passer de l'occlumentie, refusant de faire confiance à son professeur.


Quand Harry avait plongé dans la pensine de Rogue, plein de curiosité, son monde avait basculé sur son axe. Il avait vu un jeune Severus bien loin de l'être sarcastique et cruel qu'il deviendrait adulte, et il avait été horrifié du comportement de son père et de son parrain. Il s'était senti proche de lui, son professeur tant détesté, parce qu'il avait ressenti la même chose lorsqu'il était martyrisé par son cousin.
En observant son professeur alors qu'il était un enfant, Harry décidait de cesser de lui résister. De mettre plus de bonne volonté. Il n'irait probablement pas jusqu'à s'excuser - après tout, Rogue restait un connard avec lui - mais il pouvait comprendre que sa ressemblance avec son père puisse poser problème.


Sauf que rien ne s'était passé comme prévu : Harry avait été surpris en pleine transgression des règles, plongé dans les pensées les plus intimes de l'homme le plus secret de Poudlard. Et si avant le jeune homme n'avait jamais eu peur de lui, ce jour là son regard fou lui fit craindre le pire.
Il fut jeté en dehors des cachots sans ménagements, apprenant que les leçons étaient terminées. Il essaya de s'excuser, mais l'homme ne l'écouta même pas.


Les semaines suivantes, Harry ne désespérait pas de faire comprendre au Maître des potions qu'il était désolé d'avoir été curieux, désolé que son père ait été si stupide, désolé que son parrain soit également un idiot. Il avait gardé ce qu'il avait vu dans la pensine pour lui, refusant d'en parler à ses amis aussi proches soient ils. Il ne voulait pas donner à Rogue plus de raisons de le détester.
Par contre, il avait réprimandé sévèrement Sirius, et son parrain avait été choqué de la passion que mettait Harry à défendre son vieil ennemi. L'animagus avait promis de s'excuser, et Harry avait soupiré et hoché la tête.


A sa connaissance, Sirius n'avait jamais eu le temps de s'excuser. Il était tombé derrière le voile avant, ôtant à Harry sa dernière famille et tous ses espoirs d'être heureux.
Rogue s'était calmé - légèrement. Il en était revenu à la haine glaciale qu'il opposait toujours à Harry, lui reprochant implicitement d'être le fils de James Potter. Pour sa part, Harry avait cessé de le provoquer. Il ne pouvait plus se montrer insolent, alors qu'il était encore désolé d'avoir fouillé les souvenirs les plus intimes de son professeur.


Et puis, était venu le jour de la dernière bataille. Le moment décisif...

L'ombre du passéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant