Cobaye

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En rejoignant Hermione et Ron, Harry leur offrit un sourire lumineux, soulagé. Il se pencha vers eux, vérifiant que personne ne pouvait entendre ce qu'il allait dire, et il murmura quelques explications sur sa soudaine bonne humeur.
- Rogue m'a donné rendez-vous pour me parler du polynectar. Ce soir.
Hermione hocha la tête d'un air satisfait, et lança un regard à son ami qui hurlait "Je te l'avais bien dit". Ron émit un son entre la protestation et l'acquiescement. Il était ravi que son ami obtienne enfin des réponses, mais il ne cachait pas son animosité envers la chauve-souris des cachots comme il se plaisait à l'appeler encore et encore. Harry leva les yeux au ciel, tira la langue à Hermione pour son regard bien trop satisfait et haussa les épaules, pas vraiment décidé à se lancer dans un débat sur l'utilité d'aller parler à leur professeur.

Ron gloussa, ses yeux bleus pétillants d'amusement. D'un ton moqueur, il ne put s'empêcher d'ajouter son petit commentaire en voyant que rien de plus ne serait ajouté.
- Et bien mon pote fait attention à ne pas terminer en cobaye de ses petites potions.

Hermione le bouscula en le fusillant du regard. D'une voix coupante, elle interrompit son petit ami.
- Ne sois pas stupide Ronald ! Le professeur Rogue n'irait pas blesser Harry.
Le rouquin leva les yeux au ciel et souffla, reprochant à Hermione de n'avoir aucun humour.

Harry les observa se chamailler gentiment avec un sourire amusé, pensant que ses amis ne changeraient jamais. Il était sûr qu'ils s'aimaient, mais il devait avouer qu'il n'aurait jamais pensé qu'ils puissent mettre leurs différences de côté comme ils l'avaient fait.

Là où Hermione était sérieuse et parfois même rigide, appliquée et respectueuse envers tous les professeurs, Ron faisait souvent preuve de nonchalance et d'irrespect. Pour autant le rouquin n'était pas méchant. Juste immature comme le lui reprochait souvent Hermione. Ron pensait à s'amuser avant tout. Ron n'aimait pas les responsabilités, même s'il ne se défilait jamais.
Ron était juste un adolescent normal, et malgré les épreuves, il avait gardé son âme d'enfant.

Depuis le début de leur amitié, Harry faisait en sorte de ne pas intervenir entre ces deux là. Il avait assez d'un mage noir à combattre pour ne pas s'attirer les foudres de ses amis... Ron se sentirait trahi s'il ne le soutenait pas, et Hermione reporterait probablement sa colère sur lui.

Ainsi, tout au long de la journée, Harry resta près de ses amis, souriant à leurs querelles incessantes. Les deux amoureux en avaient rapidement fait un jeu, et se titillaient pour le plaisir. Donc, tout était prétexte à se chamailler. Et Harry devait avouer que c'était un retour à la normalité plus que bienvenu.
Pour autant, le Sauveur avait le regard perdu dans le vague et un peu de tristesse dans le regard.

Harry ne pouvait pas nier qu'il était inquiet de son rendez-vous avec le Maître des potions. Pas qu'il ait peur de lui - il avait totalement confiance en l'homme désormais - mais il craignait surtout ce qu'il pouvait apprendre.
Il avait eu assez de révélations et d'étrangetés pour toute sa vie, et il aspirait surtout à du calme. Il regrettait presque d'être aussi curieux.

Il aurait pu décider d'ignorer les paroles du Centaure mais il savait parfaitement que ses mots reviendraient le hanter encore et encore. En permanence. Il se torturerait avec ça, jusqu'à en devenir dingue.
Avec un soupir, il essaya d'oublier ses craintes, et de se concentrer sur le moment présent. Advienne que pourra.

A l'écart, Severus avait répondu aux interrogations de Minerva sur ce qu'ils allaient faire au sujet des passages secrets, afin de les arranger plutôt que de les laisser en l'état. Il avait convenu avec ses collègues qu'ils devaient s'assurer que ces passages soient en bon état en cas de problème mais qu'ils soient inviolable pour sécuriser l'école au maximum.
Les professeurs s'étaient rassemblés pour dégager les gravats, et alors que le maître des potions travaillait presque machinalement, Severus laissa son regard se perdre du côté de Harry Potter.

Il soupira et pinça les lèvres en se rendant compte que le gamin était perdu dans ses pensées. Il ne fallait pas être devin pour deviner ce qui n'allait pas. Il devait probablement s'inquiéter de la conversation qu'ils auraient le soir même.
Avec un pincement au cœur, Severus s'avoua que Harry avait des raisons de craindre ses réactions, après avoir passé tant d'années à se montrer aussi injuste. Il regretta d'avoir puni le fils pour les péchés du père, avant même que le garçon ne fasse la moindre erreur... Pour ça aussi, il lui devrait des excuses. Un jour.

Severus lui avait promis de lui parler du polynectar. Il comptait bien aller plus loin et lui avouer ce qui le hantait depuis longtemps. Au fil des années, il avait dû faire face à beaucoup de ses erreurs passées, et il avait fait en sorte d'assumer. Cette fois cependant, il avait peur. Peur de la réaction d'un adolescent qui avait subi bien trop d'épreuves.

Cependant, il avait pris la résolution d'avouer, de lui dire ce qu'il avait toujours caché. Personne n'avait jamais percé son plus sombre secret jusqu'à ce jour.
Il se demanda s'il avait des regrets, et préféra laisser la réponse en suspens. Il était incapable de décider s'il regrettait son plus grand crime, commis envers son amie la plus chère. Envers la femme qu'il n'avait jamais cessé d'aimer, par delà les années, par delà la mort.

Si quelqu'un remarqua que le professeur de potions était perdu dans ses pensées, personne n'en fit la moindre remarque. Il avait toujours été taciturne et secret, après tout. Ses collègues l'ignorèrent comme ils l'avaient toujours fait, connaissant son caractère acariâtre. Personne ne voulait récolter une de ses si célèbres remarques sarcastiques. Sa langue acérée lui avait assuré une relative tranquillité au fil des années : il n'y avait que Harry Potter qui n'avait jamais semblé le craindre réellement.


Harry regarda Severus Rogue quitter le couloir de bonne heure, alors qu'il allait brasser de nouvelles potions pour l'infirmerie. Apparemment Madame Pomfresh avait largement puisé dans les stocks pendant la bataille, et voulait être prête à toute éventualité. Le Maître des potions ne s'était pas plaint, préférant de toutes façons être face à un chaudron dans la solitude de ses cachots plutôt que d'être en compagnie d'autant de monde.

Avec un impatience fébrile, il attendit le moment de le rejoindre dans son bureau.

Prompt de demain : Londres

L'ombre du passéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant