Chapitre 6

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-Où est-ce que l'on va au juste ?

Jaelyn démarre la voiture et fait gronder le moteur tandis que j'attache ma ceinture.

-Rejoindre les autres. répond t-elle simplement.

-Et il y aura qui ?

Pas de réponse.

J'allais lui demander une fois de plus lorsque mon portable se met à vibrer dans la poche de mon jean.

Portable que j'ai retrouvé dans la poche de mon jean, alors que je ne le mets jamais ici durant mes heures de travail.

Je le sors et vois avec lassitude le nom de ma mère apparaître sur l'écran.

Oh zut.

Depuis le début de la matinée, j'ai reçu de nombreux messages me souhaitant un joyeux anniversaire, que ce soit de la part de membres de ma famille, d'amis de longue date, ou de collègue de travail. Et franchement, j'aurai préféré que ma mère se contente elle aussi que d'un simple message.

-Salut, m'man ! je m'exclame en prenant un faux air joyeux.

-Joyeux anniversaire, Marley !

-Euh, merci. je lui réponds peu à l'aise.

Je jette un coup d'œil vers Jaelyn qui se concentre sur la route.

-Tu vas bien ? me demande ma mère à l'autre bout du téléphone.

-Oui. Et toi ? je fais, pas très sûre.

Elle me répond que oui, puis elle se met à me raconter son séjour en Vendée. Depuis plusieurs années déjà, ma mère voyage dans toute la France, régions après régions. Chaque fois, j'ai le droit à un appel d'elle pour me raconter le paysage, les choses qu'elle a pu découvrir, ou encore les mecs qui lui ont servi temporairement de compagnon. Mais moi...

Moi, bordel, qu'est-ce que je m'en cogne !

Je suis soulagée de voir que Jaelyn gare la voiture, signe que nous sommes arrivées.

-Bon, il va falloir que je te laisse, j'ai des trucs prévus pour la journée.

-Bien sûr, je comprends. Je vais te laisser dans ce cas. Et pense à m'appeler plus souvent ! me sermonne t-elle avec mécontentement.

Ouais, c'est ça.

Je raccroche enfin et sors du véhicule.

-C'est toujours tendu entre elle et toi ? me questionne soudain ma meilleure amie.

Je la regarde en haussant les épaules.

-C'est de sa faute, je ne la supporte pas.

Elle secoue la tête, puis me fait signe de la suivre. D'un seul coup d'œil autour de moi, je reconnais l'endroit où nous sommes. Et je ne mets pas longtemps à faire le calcul entre notre localisation et le beau temps.

-Dis, tu as prévu un maillot de bain pour moi, j'espère ?

-T'en fais pas, il y a tout ce qu'il faut dans le coffre. me rassure t-elle.

Un peu plus tard, nous arrivons sur la plage. La marée est basse et il y a peu de gens à cette heure-ci. Je sourie, heureuse de me retrouver ici, en cet endroit tranquille où j'allais pouvoir oublier mes problèmes - comme Danail et ses trucs de loup-garou.

Ou comme le fait que j'allais l'aider à s'échapper.

J'ai pris ma décision ce midi, après avoir réfléchi maintes et maintes fois. J'en suis venue à la conclusion que rester enfermé dans un asile allait détériorer la santé mentale de Danail qui n'a pas sa place dans cet hôpital. D'un côté, je n'ai pas envie de l'aider à s'enfuir. Où irait-il une fois sorti ? Mais au fond de moi, j'ai cette intime conviction que c'est ce qu'il faut faire, qu'il faut que Danail sorte.

Espérons que mes convictions soient justes.

-Ah les voilà ! s'exclame Jaelyn à côté de moi.

Je suis son regard et vois au loin trois personnes qui marchent vers nous. Je les reconnais immédiatement, mes trois autres amis du lycée : Eliot, sa petite amie Gabrielle - que l'on surnomme tous Gaby - et Maël. Lorsqu'ils arrivent à notre hauteur, je saute dans les bras de Gaby.

-Putain, ce que ça fait longtemps qu'on ne s'est pas vu ! je me plains en la serrant fort contre moi.

Je relâche mon étreinte sur elle au bout de dix bonnes secondes puis salue les autres. Maël s'avance vers moi, un sourire un peu timide sur les lèvres.

-Joyeux anniversaire.

-Merci. je souris à mon ex petit ami.

-Le dernier à l'eau paiera sa tournée de glace ! crie soudain Jaelyn avant de se mettre à courir vers la mer en se déshabillant.

*****

La journée s'est merveilleusement bien passé, et j'aurai pu rester des heures à lézarder au soleil et me reposer sur le sable chaud, mais maintenant, il faut que je fasse de nouveau face à mes problèmes.

Il était vingt heure lorsque j'ai passé le vestiaire de l'hôpital de Navarre pour récupérer ma blouse. J'ai dit à Jaelyn que j'ai pris ma journée, en réalité ce n'est pas très exact. Comme j'ai pris la décision de faire sortir Danail d'ici j'ai alors demandé à faire un service de nuit en plus. Et comme j'ai dormi une partie de mon dernier service, je ne suis pas trop fatiguée.

Deux heures plus tard, je me dirige vers la chambre du patient neuf cent vingt-sept, les mains moites. Je suis nerveuse, et ça se comprend.

Je pourrais me faire virer si je me fais prendre !

Je déverrouille la porte de sa chambre puis entre. Je referme derrière moi. Mes yeux s'attardent sur le lit...

Vide.

Je fronce les sourcils.

-Qu'est-ce que...

Tout se passe très vite : un instant je suis debout et fixe la chambre à la recherche du patient, puis la seconde d'après je me retrouve plaquée contre la porte face à Danail.

-Marley ! Oh, comme je suis heureux de te voir ! J'ai cru que tu n'allais plus revenir après ce que tu as vu, la nuit dernière.

Je ne peux me faire la remarque qu'en cet instant, on aurait dit un chien qui fait la fête à sa maîtresse.

Ironique quand on sait que c'est un loup.

-Tu n'as pas à avoir peur de moi, tu sais. Je ne te ferai jamais rien. Je te le jure, moya sarces, que la déesse me maudisse si je te fais un jour le moindre mal.

Je cligne des yeux, ne m'attendant clairement pas à me trouver face à une situation pareille.

-Danail, je ne suis pas là pour ça.

Son front se plisse.

-Je... Tu dois sortir d'ici. Je suis venue t'aider à t'évader.

Il se passe de longues secondes où Danail ne dit rien. Il se contente de me fixer comme s'il cherche à savoir si je suis sérieuse. Puis il éclate de rire.

Eh bah, ça commence bien...

Neslomimiyat VulkOù les histoires vivent. Découvrez maintenant