Joyeux Noë'nnes ! [Terminé]

Chapitre 8

FILM : L'Alchimie de Noël, réalisé par Monika MITCHELL

MUSIQUE : Don't Shoot Me Santa, interprétée par The Killers

❄ Lucien ❄

Les mains en l'air, j'essaie de toutes mes forces d'attirer l'attention de ma femme qui, les lunettes de soleil visées sur le nez, est complètement indifférente. À force de faire le pitre, il va m'arriver une misère ! Toutefois, il m'est impossible de m'arrêter. L'air hautain de Priya est tordant, et les rires de Baptiste, qui skie à mes côtés, accentuent mon hilarité.

— Elle tire souvent la tronche ainsi ?! m'interroge mon meilleur ami.

S'il savait !

À elle seule, la tornade brune ferait de l'ombre au soleil. Astre qui, soit dit en passant, brille au-dessus de nos têtes et égaille davantage cette journée. Voilà deux ans que je n'avais plus remis les pieds sur une piste, et ce sport hivernal m'avait cruellement manqué. Pouvoir chausser les skis et sentir le vent me fouetter le visage dans les descentes est revigorant.

Quand, ce matin, je me suis levé et que j'ai vu quelle belle matinée, ils annonçaient, ni une ni deux, un message était envoyé au fou furieux de la glisse qu'est Baptiste. Avec Margot, ils ne partent qu'après la Nouvelle Année, dans les Alpes suisses, et ce petit échauffement matinal le met dans une joie communicative. En effet, mes lèvres relevées ne veulent pas se baisser. À force d'être si étirées, elles en deviennent presque douloureuses !

— Pourquoi a-t-elle souhaité nous accompagner si c'est pour rester sur un transat à afficher une tête semblable à la mère Chirac ?!

Son interrogation sarcastique m'amuse un peu moins pour le coup. Je tenais à ce qu'elle vienne. Même si elle montre tous les signes d'un profond ennui, il en est tout autre. J'ai aperçu une fossette frétillante au coin de sa bouche. Avec grande peine, elle se retient de s'esclaffer. Mon rôle de clown doit un peu faire ses preuves, on dirait bien !

— Depuis l'opération de Noënne, nous ne voulons plus lui causer du stress et avons décidé de ne plus nous séparer d'un millimètre le temps de sa convalescence.

Mon explication est plus que véridique. À la sortie du cabinet médical pour animaux, notre chienne a été chouchoutée avec une infinie tendresse. Après la chirurgie qu'elle a subie en urgence, le vétérinaire a tenu à la garder auprès de lui durant vingt-quatre heures. Ces heures-là ont été des minutes de supplice qui donnaient l'impression de durer une éternité centenaire. Priya était si angoissée qu'elle n'a pas fermé l'œil en rentrant au chalet. Enroulée dans son plaid, sur le divan, ses paupières bouffies dévoilaient des pupilles exténuées et gorgées de sang. Cela faisait longtemps que je ne l'avais plus vue dans un tel état. Un état qui mêlait de l'inquiétude et un profond mal-être.

Moi non plus, je n'ai pas pu dormir. Assis dans un autre fauteuil, je ne faisais que la fixer avec appréhension. La laisser seule était inconcevable.

Cette nuit aura été des plus catastrophiques. Néanmoins, d'un côté, elle m'aura permis de vérifier la force de notre union. Quand Priya a plongé la tête la première contre mon torse, mon cœur s'est remis à battre. Celui qui était tant habitué à accorder ses battements avec ceux de ma bien-aimée, a ressuscité. Il s'est affolé, emballé avant de garder son rythme d'amoureux conquérant.

— Noënne a l'air plutôt en forme, me répond Baptiste dans la file du tire-fesse.

Oui, elle l'est. Sa mine fatiguée s'est estompée au fur et à mesure des jours. Elle retrouve tout doucement son entrain d'antan. Certes, les siestes digestives de l'après-midi demeurent son activité favorite, mais elle remue la queue, arrive aux pieds dès qu'on l'appelle et a même voulu jouer au cours de ces cinq derniers jours. Le golden ne sera plus jamais aussi énergique que lorsqu'elle était haute comme trois pommes, mais elle paraît encore nous réserver quelques tours en réserve. Qu'elle n'a pas été ma surprise en découvrant dans son panier un très joli soutien-gorge dont la transparence de la dentelle aubergine suppose un accord parfait avec les formes de sa propriétaire !