Chapitre 9

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FILM : Le Père Noël est une ordure, réalisé par Jean-Marie POIRÉ

MUSIQUE : It's The Most Wonderful Time Of The Year, interprétée par Andy WILLIAMS

Priya

— Priya, j'ai froid.

Je lève les yeux au ciel, et ne bouge pas d'un poil.

Monsieur n'a qu'à se déplacer ! Depuis notre retour des urgences, il n'en perd pas une. Le grand blessé, le bras dans le plâtre, se plaint pour un rien et requiert l'attention de tout le monde. Affalé dans le divan, il paraît avoir trouvé une place de choix. À force de rester assis, il y a de forts risques pour que l'assise prenne la forme de son postérieur et que les deux ne forment plus qu'un !

Que les hommes sont des petites natures !

— Priya... réitère-t-il, avec une expression suppliante.

— Tu as deux jambes et un bras. Alors, bouge-toi.

Énième soupir. Depuis ce matin, il ne fait que cela : soupirer à tout bout de champ. Je suis à deux doigts de le balancer par la fenêtre. Oui, par la fenêtre. Au diable, les manières douces ! Quand quelqu'un m'irrite, il ne peut que s'attirer mes foudres et finir défenestré. Il n'y a plus de douce Priya qui tienne, et encore moins de « Mon amour ».

La preuve que Lucien n'a nullement besoin de mon aide. Ce dernier est debout sur ses deux jambes intactes et attrape le plaid pour s'en couvrir. D'ailleurs, notre chienne apprécie le congé-maladie forcé de son maître et se joint à lui. Elle avec sa collerette et lui avec son plâtre, ils constituent un hilarant duo. On se croirait presque dans une maison de remise en forme !

Mon rôle dans tout ça ? Forcément, je me retrouve être l'aide-soignante qui protège le plâtre avant la douche, et qui bande l'abdomen de Noënne et qui lui donne ses antibiotiques.

— Qu'est-ce que tu fais ? me questionne le convalescent exaspérant.

Vous ai-je dit qu'il est pire qu'un enfant, auquel on aurait enlevé ses crayons de couleur ?

Il ne tient pas en place, geint inutilement et s'efforce à croire qu'il peut dessiner de la main gauche. Ses espoirs ont été réduit à néant lorsque son feutre instable a dérapé sur ma table basse, traçant une magnifique ligne noire sur le chêne clair.

L'ai-je disputé comme une mère le ferait avec son gosse ?

Bien sûr que oui ! Ce meuble nous a coûté un bras, et cette marque digne d'un caprice d'un mioche pourri-gâté n'est guère acceptable, et encore moins effaçable. Mon artiste préféré privilégie les instruments de qualité qui sont, en plus, indélébiles. Encore faudrait-il qu'il sache les utiliser sur des feuilles !

Oui, j'en ai gros sur la patate ! Et j'ai presque envie de téléphoner à Baptiste pour qu'il l'héberge chez lui, même si je sais pertinemment qu'il a d'autres chats à fouetter avec Lidie... c'est dire !

— Je pâtisse !

Et oui, je crie. Je ne prends aucun soin pour épargner ses oreilles qui ne demeureront pas indemnes. La colère représente un pourcentage infime des sentiments qui m'agitent, et le seul remède pour l'atténuer est mon rouleau à pâtisserie. Les coups que je donnerai à ma pâte, éviteront peut-être qu'un meurtre soit commis au sein de ce foyer. Mais ne crions pas victoire trop rapidement... la journée est loin d'être terminée, et un accident est vite arrivé !

Les ingrédients et les ustensiles sont tous dressés sur l'îlot central :
350 g de farine
170 g de sucre de cassonade
100 g de miel liquide
100 g de beurre mou
1 œuf
4 c. à c. de levure
2 c. à c. d'épices (cannelle, anis vert, gingembre, muscade, girofle)

Joyeux Noë'nnes ! [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant