SOUVENIR - NOËL 2000

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FILM : Le Grinch, réalisé par Ron HOWARD

MUSIQUE : Let It Snow, interprétée par Frank SINATRA

Lucien

Les yeux clos, les idées fulminent dans ma caboche douloureuse. Une migraine du tonnerre me martèle le cerveau à coups de marteau piqueur. La tentation de voler une aspirine dans le sac à main de maman est présente, mais je ne m'y résous pas. Du haut de mes onze ans, ce remède m'est malheureusement proscrit. Pourtant, il me serait bien utile. Il ferait taire en un rien de temps ce mal invivable qui m'empêche de me détendre.

Maman dit que j'ai toujours mal à la tête parce que je réfléchis trop. Elle n'a pas tort sur ce point. Songer à un truc et le retourner sous tous les angles sont dans mes habitudes. Quant à mon père, il affirme autoritairement que ces maux de tête ne sont que le résultat de mes longues parties sur ma Gameboy.

Mais qu'y connaît-il ?!

Monsieur se la joue fréquemment intellectuel à ses heures perdues et semble mieux informé qu'un médecin doté d'un long bagage d'enseignement et d'un diplôme. Après tout, si Monsieur Gramme le déclare, c'est que ça doit être vrai. Le contredire serait absurde. Cela reviendrait à perdre un dur combat à Pokémon Cristal.

Ma main relâche sur le siège la console de jeux qui ne trouve pas grâce à mes yeux. Depuis que nous avons quitté Bruxelles, mes sens sont aux aguets d'une occupation digne d'intérêt. Une occupation qui me ferait oublier les bourdonnements et mes parents. Les bourdonnements ne parviennent pas, à eux seuls, à occulter le chahut de la dispute qui résonne dans l'habitacle. Bien qu'ils sachent qu'un mal de crâne m'épuise, ils ne se retiennent pas de se crier dessus.

Parfois, j'aimerais ne pas être seul. Avoir un frère ou une sœur me permettrait de converser, de me distraire et de ne pas vivre de tels malheurs en solitaire. Il paraît que c'est mieux de souffrir à deux !

Souffrir est peut-être un grand mot pour évoquer mon quotidien. Tout ce que je désire, je l'obtiens. Je ne manque de rien. Entouré de mes deux parents, je vis dans une belle maison de maître bruxelloise et chaque vacance se déroule en dehors de la capitale. Soit à Knokke. Soit dans les Ardennes.

Selon certains gars de ma classe, je suis le prototype même du gentil garçon, issu de la classe moyenne s'élevant vers le haut. Certes, ce ne sont pas des compliments, encore moins des jalousies exacerbées, mais ces dires véridiques ne sont pas très plaisants à entendre au milieu d'une cour de récréation. Les copains d'école ne sont pas ma tasse de thé. Les seuls que j'ai réussi à me faire sans difficulté sont ceux que j'ai rencontrés à mon stage de tennis l'été passé, et dont les parents appartiennent au cercle social des miens. Un cercle assez aisé lorsqu'on y regarde de plus près, capitaliste sur les bords et qui aime paraître.

Tout ce qu'est mon père et tout ce que je déteste.

Les choses que je déteste ? Elles se résument en trois points.

1.Mon père.

Il arrivera éternellement en première position, et il me le rend assez bien.

2.Les disputes.

Elles m'exaspèrent, et étant de nature pacifiste, je n'apprécie pas y assister et encore moins y être convié.

3.Les cacahuètes.

Dès que j'en ingurgite, mon apparence prend celle d'un hamster. Bien que je les adore, en matière d'œdèmes du larynx et d'urticaire généralisé, j'ai assez donné... Même un délicieux Snickers ne parviendrait pas à s'attirer ma gourmandise !

Joyeux Noë'nnes ! [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant