Sohan et la famille Amine

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    Il était une fois,

Un beau jour de fête que pour la première fois, Sohan passait en dehors de sa ville bien-aimée de Tanta. Il se retrouvait plutôt au village de Garagos, village de son enfance dont une partie l’avait délaissé et où il passait un beau séjour. Le jeune était installé sur un banc de bois, au milieu d’une foule où, par ce temps de forte chaleur, tout un chacun était de la tête au pied recouvert d’une sueur par chance indolore. Encadré de part et d’autre par ce beau monde, tout type de sujets accouraient les tympans du jeune. Rumeurs, histoires vraies, exploits, ses oreilles accueillaient tout ce blablabla bien qu’inutile. Et, ce fut au sein de tout cela que surgit ceci, le principal centre d’intérêt des villageois. Cette famille qui les intriguerait depuis son débarquement parmi eux. Un couple formé par un homme aux mille défauts ainsi que sa femme aussi belle que le jour mais qui n’aurait jamais su préserver sa chasteté, des enfants qui inspiraient pitié et dont on craignait l’avenir en miettes.

Voilà bien là que la famille en question se présenta devant ces gens qui avaient alors les lèvres agitées mais qui soudainement ne sauraient nullement parler. En effet, il se dessinait un joli sourire sur le visage de Sohan, amusé en voyant que tous qui ajoutaient individuellement de leur sel à la sauce s’arrêtèrent, comme muets. La famille Amine, c’était ainsi qu’on la prénommait, ne tarda pas à s’en aller de par le manque d’hospitalité de ces personnes qui ne semblaient point désirer de leur présence. Car oui, on ne se rend où l’on n’est invité et surtout on ne reste où l’on n’est désiré.

Sohan fut de retour chez lui, dans une pièce qu’il n’appréciait pas particulièrement mais où il vivait à contre-cœur, lui qui ne savait où de mieux loger dans ce village si ce n’était chez son bon vieil oncle. Aussi vit-il à travers le grand carré du mur brisé qui lui servait de fenêtre, qu’il avait comme voisins les Amine. Notre ami, tout de suite se transforma en espion et scrutait avec attention la scène qui se déroulait gentiment sous ses yeux. N’apercevrait-il pas la Madame avec un homme qu’elle saisit dans ses bras et qu’elle embrassa sur la joue ?  Ils avaient donc raison les villageois, pas étonnant ! Oh ! Quelle honte pour une femme portant le hijab !

Sept jours et huit nuits se sont écoulés. Désormais, Sohan ne faisait plus rien de ses journées en dehors des différentes analyses auxquelles il s’adonnait de sa fenêtre, du matin au soir. Et cela semblait bien payer. Hier par exemple, il avait entendu pour sûr accompagnés de différentes injures, les coups de fouets déchirer la peau des pauvres enfants, se faisant battre par Monsieur. Et cela, sans que personne n’intervienne, même pas lui Sohan, trop peureux d’une telle brute. Et là, c’était évident, il détenait entre ses mains la preuve même que cette famille était telle qu’on l’a décrite. Se rappelait-il cependant ce qui l’avait poussé à mener cette enquête et se mêler de ce qui ne le concernait guère ? Non, l’ennui peut-être. Mais non. De toute façon il ne s’agissait pas là d’une chose dont on devait se préoccuper.

Des jours en plus et notre ami manquait d’argent. Son oncle assez pauvre déjà, ne pouvait lui fournir ne serait-ce qu’une livre égyptienne. Et là, il regretta toutes ces journées durant lesquelles il ne s’était évertué à fournir le moindre effort pour un emploi qui aurait pu lui rapporter un salaire qui puisse l’aider à subvenir à ses besoins. Il se revit faisant une chose qui ne lui avait rien rapporté si ce n’était une grosse perte, d’énergie mais surtout de temps, chose d’une valeur importante.

Les choses se corsèrent ensuite. Un travail, Sohan en était à la recherche depuis des leurs mais en vain. Par chance, ce jour on l’invita à exercer le métier de domestique pour un salaire de neuf cent cinquante livres par bimestre. Aussitôt annoncé, aussitôt approuvé. Cependant il se trouva que lorsque sa patronne l’emmena à son domicile, notre ami se retrouva chez les Amine. Quelle tragédie ! Il se plaignit, mais au fond de lui. De plus, il ne connaissait guère ce membre, un enfant de la famille sans doute, l’aîné peut-être.

Douze ans de travail à présent. Amine avait trente-six ans, fondé une belle et heureuse famille avec Soya Amine ayant deux ans de moins que lui. Notre ami était fier de son épouse et ne pouvait oublier la formidable famille dont elle était issue. Surtout, il se rappelait le jugement qu’il portait sur les Amine à ses vingt-quatre ans en tant qu’espion, mais surtout la faiblesse d’esprit dont il fit preuve à cette époque. Et peu l’importait désormais ce que les gens pouvaient dire de même que ce que lui-même peut voire du premier coup.
En vérité il se donna pour conseil ainsi qu’à sa famille

« Il arrive souvent que l’on ne voit que ce que l’on veut et surtout est il primordiale pour éviter troubles et maux de ne croire que la moitié de ce que l’on voit et rien de ce l’on entend ».

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