Chapitre 34

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« Si un jour vous m'aviez dit "Jekyll, ma vie, mon honneur et ma raison dépendent de vous", je n'aurais pas un instant hésité à sacrifier ma fortune ou mon bras pour vous venir en aide. Aujourd'hui, Lanyon, ce sont ma vie, mon honneur et ma raison qui sont entre vos mains : si vous m'abandonnez ce soir, je suis perdu. »

Stevenson, L'étrange cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde


Une tisseuse. Juste un mot avec une définition tout aussi commune et simple à comprendre. Jusqu'à ce que la magie s'en mêle pour éjecter d'un violent coup de balai le dictionnaire afin d'imposer sa propre vérité dont le sens n'avait ni queue ni tête.

Lorsque Ruth m'avait offert cette hypothèse sur ma spécialisation, nous étions retournées à la maison pour qu'elle m'explique avec des livres posés en cet instant sur la table basse en deux grandes piles. Elle m'avait donné une brève explication. Des histoires illustrant la magie comme une énergie vivant que les conjureurs pouvaient casser, annuler, mais que les tisseurs pouvaient... tisser. Leurs mains, leurs doigts jouaient avec ces fils magiques, les contrôlant pour les diriger où bon leur semblait. Et lorsque, légitimement, j'en étais venue à demander plus d'explications étant donné les données abstraites que Ruth m'avait données, son mari était rentré.

Oscar posa un disque sur le tourne-disque, laissant une musique se jouer dans le salon. Je doutais que L'hymne à l'amour ait été adéquate dans la situation présente. J'avais beau apprécier Édith Piaf, la romance devrait attendre parce que j'avais des questions au nombre grandissant et des réponses qui se faisaient attendre. Pour autant, ni Oscar ni Ruth ne semblaient en avoir conscience. C'était « leur » chanson. Oscar posa ses bras autour des épaules de la sorcière encore assise à son fauteuil. Elle posa ses bras sur les siennes avant de se décider à se lever. Il enlaça sa femme, l'entrainant dans une danse lente et qui devait avoir son côté agréable.

Il n'y avait rien à dire, juste à regarder cette scène tirée de films et de romans à l'eau de rose. On pouvait grimacer de dégoût, blablater sur la niaiserie du moment. Qu'importait les critiques, on ne pouvait qu'envier ces deux personnes qui s'appréciaient dans leur monde, n'écoutant rien d'autre que leurs deux cœurs battant à l'unisson. Jamais l'un sans l'autre.

« Je suis sûre qu'Hunter aimerait aussi ce genre d'instant. »

Mais je n'aimais pas danser.

- Nous nous sommes rencontrés sur cette chanson, t'en souviens-tu Darling ? murmurait Oscar à l'oreille de sa femme dont les joues rosissaient.

- Oh Sweety, tu étais dans ta voiture, la radio passait cette chanson. Tu as laissé tourner le moteur.

- J'étais persuadé de pouvoir te tuer en quelques secondes. Inutile de couper la musique.

- Comment oublier cette nuit-là ? Tu étais si beau, si sauvage.

- Tu m'as ensorcelé d'un simple regard.

- Tout tremblant, tes mains autour de mon cou ne tentaient plus de me tuer, mais de me forcer un baiser.

- Te forcer ? Il me semble que tu es celle m'ayant poussé à cette folie.

Si je comprenais bien, Oscar avait voulu tuer Ruth à leur première rencontre. Rien d'étonnant. Oscar était un chasseur ayant grandi dans une famille de chasseur.

Un sourire m'échappa. Je venais de me souvenir de quelque chose d'amusant. La première fois que moi et Hunter nous étions rencontrés. Il m'avait ligotée sur une chaise et avait déchiré mes vêtements pour simplement voir ma marque. Lui aussi avait voulu me tuer.

Ting Ting, Witching ; Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant