Inferno
Je ne suis pas satisfaite des réponses que j'ai obtenues avec cette Anae, parce qu'aucunes d'entre elles ne m'a donné la moindre idée d'où Tomio se trouve.
Je tape rageusement dans une canette qui traine par terre avant de la ramasser quelques mètres plus loin pour la jeter. Ce quartier est assez crade comme ça, pas besoin d'en rajouter.
Le pire dans cette histoire, c'est cette cinglée qui nous a suivit toute la soirée. J'ai presque envie de...
Je pince les lèvres. Plus qu'une envie, c'est un besoin. Je vais la retrouver, et m'occuper de son cas. Je ne supporte pas d'être suivie. Et même si j'ai réussi à la semer, déformation professionnelle, j'aimerais en savoir plus sur elle, encore une déformation professionnelle.
En rebroussant chemin, je m'arrête devant un hôtel, avec un rictus sur les lèvres.
- A ta place, moi aussi, je choisirais cet endroit...
Je me présente à la réception, expliquant d'un air gauche que je suis censée rencontrer quelqu'un à la place d'une amie, dans le but de faire une interview... et plus c'est gros, plus ça passe, parce que quelques minutes plus tard, l'hôtesse accepte d'appeler la chambre.
- Bonsoir, excusez-moi de vous déranger, une femme demande à vous voir, elle est à la réception. Son nom ?
Elle me regarde et je réponds avec un sourire :
- Tomio.
Elle me lance un regard perplexe, et répète au combiner :
- Tomio. Oui, c'est une femme.
Je souris narquoisement quand je comprends que cette femme est prête à me rencontrer. C'est donc satisfaite que je me dirige vers l'ascenseur lorsqu'elle me dit :
- Elle vous attend chambre 207.
- Merci.
Je ne m'arrête pas devant la porte, mais contre le mur, histoire de ne pas me prendre la porte dans la figure, dans le cas où elle voudrait la faire exploser. Croyez-moi d'expérience, ça arrive.
Mais elle ouvre la porte en grand, se cale contre le battant, et me dévisage, les bras croisés.
Je lui fais mon sourire le plus insolent, les mains dans les poches.
Elle est jeune. Moins que l'amie de mon frère , mais jeune quand même. Je lui donne entre vingt-cinq et trente ans. Entre cinq et sept ans de moins que moi.
- J'aurais aimé éclaircir quelques points avec vous, au calme, je dis sereinement.
Elle hausse un sourcil, l'air parfaitement impassible, et entre. Je la suis, et referme la porte. C'est le moment que je choisis pour retirer ma veste.
- Comment un professeur de mathématiques peut semer quelqu'un comme ça ? demande-t-elle d'une voix détachée en s'asseyant sur l'un des deux fauteuils de la chambre.
Elle sent le savon et sa peau est fripée sur le bout de ses doigts. Elle vient de sortir de son bain. Quel timing.
- Je ne sais pas pour qui vous travaillez, mais je ne suis pas sûre que vous vouliez vous mêler de cette histoire, je dis comme si je ne l'avais pas entendue.
Keigo s'est trompé, tout à l'heure. Il m'a fallut moins d'une journée pour retrouver mes instincts d'héroïne : je ne me suis pas calmée. Pas du tout.
- Je ne travaille pour personne, répond-elle sur le même ton. Où est votre frère ?
- Bonne question. Si je le savais... pourquoi je le chercherais ? Et vous ? Pourquoi vous le cherchez ?
- Je ne suis pas sûre que ça vous regarde.
- Tout ce qui concerne la sécurité de mon frère me regarde.
Nous évitions soigneusement de nous regarder dans les yeux, avant cet instant. Et maintenant que c'est chose faite, je sens presque mon alter crépiter dans l'air statique.
- Qui êtes vous ?
- Hisa... commence-t-elle.
- Vous n'êtes ni de ma famille, ni mon amie, pour me parler en utilisant mon prénom, je la coupe irritée.
Elle secoue la tête d'un air navré.
- Je ne peux pas laisser tomber votre frère. Il a trop besoin d'aide.
Je me lève avec un soupir.
- Comme je l'ai déjà dit à son amie, si ce n'est que ça, je m'en occupe. Ne vous mêlez pas de ça. A trop s'approcher du soleil... on se brûle les ailes.
- Je ne m'arrêterais pas.
Je ressens son alter dans toutes les fibres de mon corps. Elle absorbe lentement l'électricité ambiante, jusqu'à ce que celle qui m'entourait il y a une seconde disparaisse totalement.
Je souris, et la foudre tombe. La lumière vacille dangereusement et je me permet de la mettre en garde une dernière fois :
- Ne jouez pas à ce genre de jeu avec meilleur que vous. C'est dangereux.
En refermant la porte, je reste un instant sur le pas, et c'est en me rendant compte qu'elle ne bouge pas dans sa chambre, l'air toujours sur ses gardes, que je comprends : elle sait exactement où je me situe dans l'espace. Que ce soit grâce à l'un de ses sens ou grâce à un alter plus particulier, cette donnée m'intrigue, parce que ça signifie qu'elle a sûrement deux alter.
Je m'éloigne, renfile ma veste, et mets mes mains dans mes poches.
Je ne sais pas qui elle est, ni ce qu'elle me veut, mais si elle se trouve sur ma route, je l'en éjecterais sans la moindre considération.
Il y a longtemps, j'ai laissé tomber mon frère en le laissant à la maison, alors que je savais qu'il n'y était pas bien. Même si je travaillais trop pour m'occuper de lui, même si je ne gagnais pas encore assez d'argent pour lui payer l'université, quelques années plus tard, je n'aurais jamais dû le laisser là-bas. Pas avec mon père.
Je pince les lèvres, tout en descendant les escaliers de l'hôtel. Je rentre chez Keigo sous un ciel orageux que je ne cherche même pas à calmer.
J'ai la désagréable impression que Tomio est en danger, et pour un ancien héro, ce genre de sentiment veut tout dire.
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Une Plume d'Oignon
FanfictionCycle II, Livre II C'est l'histoire d'un masque, d'un mensonge, et d'un trombone. Non. C'est l'histoire d'une héroïne, d'une prof de maths, et d'une criminelle. Parce qu'après tout, plus on est de fous... plus on rit ? NDA : Je me suis arrêtée à la...