Prologue

931 62 61
                                    

— Enfin, Alya, arrête de te torturer comme ça. Ça arrivera quand ça arrivera, s'est agacée ma mère.

D'un claquement de doigts, elle a ressuscité le tournesol que j'avais laissé dépérir ce weekend, quand ils n'étaient pas là, papa et elle. La frustration m'a gagnée.

— Tu dis ça tout le temps ! Mais c'est faux. Regarde : tu as fait ton éveil à quinze ans, papa à seize et Nathan aussi. J'ai dix-sept ans, presque dix-huit. J'ai un problème.

Mes mots ont enfin fait réagir ma mère qui s'est détournée de ses fleurs chéries pour me regarder dans les yeux. Ses boucles blondes ont rebondi autour de son visage et elle les a repoussées hâtivement, pour venir s'appuyer sur la table, où je m'étais assise.

— Alya, il n'y a pas d'âge distinct. Oui, j'ai fait mon éveil à quinze ans, mais je te rappelle que Juliette les a et qu'elle ne s'est pas éveillée non plus.

Juliette. C'était toujours l'argument phare. Sauf qu'il y avait un problème dans cette logique. Ma cousine avait deux ans de moins que moi. Elle avait le temps pour s'inquiéter, pas moi. Toutes les sorcières de mon âge au village avaient déjà fait leur éveil l'année dernière ou avant, j'en étais plus ou moins sûre. J'étais en retard. Lily — jeune sorcière de mon âge — le savait, et elle ne se gênait pas pour me dire que j'étais une anomalie.

Soupirant, j'ai posé mon menton dans mes mains et mon regard s'est perdu dans les tournesols. Sincèrement, je détestais ces fleurs. Elles étaient trop grandes, trop jaunes et elles ne sentaient même pas bon. Mais c'était le symbole des sorcières de vie donc on ne pouvait pas y échapper.

Ma mère et mon père en avaient disposé partout dans la maison, pour assurer à notre foyer « une magie saine et équilibrée ». Étant donné que j'étais plus humaine que Bella dans le premier tome de Twilight, ce genre de petite attention ne faisait que me rappeler combien je n'avais pas ma place dans cette famille.

— Bon, allez. Débarrasse toi de ces idées noires et appelle ton frère et ta cousine, il est temps de mettre la table.

J'ai poussé un grognement de paresse avant de m'extraire de ma chaise pour monter les escaliers. Je savais déjà ce qui allait se passer dans les prochaines minutes : Nathan m'enverrait bouler parce qu'il devait parler à sa copine du moment et Juliette se moquerait de moi — pour une énième raison que je n'arrivais pas à comprendre — avec ses copines. Mais bon, ce n'était pas comme si j'avais le choix.

J'ai grimpé les marches quatre à quatre, évitant de justesse un autre tournesol qui semblait déterminé à me faire perdre l'équilibre et suis arrivée à l'étage. Là, j'ai dû faire un choix : qui prévenir en premier. J'ai pensé aux plaintes de Nathan, puis j'ai imaginé les piaillements de Juliette et de ses amies et la décision a été facile.

Dépassant la porte de ma chambre, j'ai tambouriné à celle de mon frère. Celui-ci a mis plus de deux minutes à ouvrir et quand il est apparu sur le seuil, il avait l'air énervé. Exactement comme je l'avais prédit.

— Qu'est-ce que tu veux, Alya ?

J'ai souri pour détendre un peu l'atmosphère.

— Maman veut que tu descendes pour mettre la table.

Nathan a immédiatement lâché la chambranle pour me claquer la porte au nez en grommelant une réponse que je n'ai pas comprise.

— Ça veut dire oui ? ai-je insisté.

— On verra.

Donc ça voulait dire non. Soupirant, je suis passée à l'option numéro deux. Retournant à ma chambre, j'ai tourné la poignée pour me retrouver nez à nez avec Juliette, en plein FaceTime. Encore une fois, j'avais vu juste. Qui sait, peut-être était-ce les prémices de mon éveil qui se manifestaient ? Quoi que... Je n'avais jamais entendu mes parents parler d'un quelconque don de prédiction donc ç'aurait été plutôt étrange.

L'Éveil d'AlyaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant