Chapitre 48 - La fin d'un parcours

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Un lourd silence a plané dans Silverwood. J'avais été percée à jour. Ma menace s'était désintégrée au rythme de la révélation de la patronne. Je ne faisais plus le poids. Surtout qu'il semblait assez évident que je ne contrôlais pas le phénomène qui venait d'avoir lieu – sinon je ne me serais pas contentée de brûler Alan, je l'aurais tué et j'aurais mis fin à mon éveil par la même occasion.

J'ai serré les dents et me suis mise à fixer le ciel, des larmes se formant à l'orée de mes cils. Je ne savais plus quoi faire, j'étais à cours d'idées. Je me trouvais au milieu des scènes de crime que nous avions observées à l'écran pendant des mois.

Demain, je serais certainement la nouvelle star de la BCR, au côté de Cameron. Un sourire malheureux a caressé mes lèvres à cette pensée : je voyais bien mon nouvel acolyte s'en vanter, dire que nous étions trop palpitants pour ne pas finir sous le feu des projecteurs.

C'est ce fantasme qui a fait s'échapper la première larme de ma paupière. Elle a lentement coulé sur ma pommette, a dessiné le contour de ma mâchoire et s'est perdue dans le cercle d'Ipomées. Ma gorge s'est serrée et je me suis focalisée sur le banc de nuages menaçant, qui semblait peu à peu libérer les étoiles.

Je me suis concentrée dessus. J'ai imaginé leur lumière m'éclairant, j'ai repensé au spectacle que cela pouvait être de contempler la voûte étoilée de Ryneshire, lorsqu'elle se découvrait à nous. Avec Nathan, nous avions passé bon nombre de nuits allongés dans le jardin, allumant un feu de camp pour nous tenir chaud, dévorant des brochettes de chamallows pour faire exploser le taux de sucre dans notre sang et admirant les étoiles à en perdre la vue.

Nathan...

Une autre larme a bravé le rempart de mes cils lorsque j'ai réalisé que je ne reverrais plus jamais mon frère. Mon cœur s'est comprimé : il ne se remettrait pas de ma mort. Je le connaissais. J'étais sa petite protégée. Depuis que j'avais commencé à prendre du retard sur mon éveil, l'attention s'était progressivement éloignée de moi, ma famille me reléguant peu à peu au second plan.

C'est à cette époque que Nathan avait décidé qu'il assurerait le rôle que mes parents ne pouvaient pas tenir. Même si je les adorais, ils avaient d'autres chats à fouetter avec le Coven et parler en codes devant moi finissait par rapidement les fatiguer, si bien qu'ils préféraient me mettre à l'écart.

Vu que Juliette ne m'appréciait pas trop et qu'elle avait beaucoup plus d'amies à fréquenter, elle m'avait souvent snobée, même avant son propre éveil. C'est donc Nathan qui avait été mon super grand frère, toujours là pour me soutenir, toujours là pour me rassurer. Toujours là pour vérifier que je ne gâchais pas ma vie à cause d'une éducation approximative due à ma différence.

La nouvelle de mon meurtre le briserait, je le savais.

— Elle est trop puissante maintenant, il va falloir procéder autrement.

J'ai baissé les yeux pour rencontrer le regard effrayant de la vampiresse, qui s'adressait à son groupe. L'appréhension s'est élevée encore d'un cran dans mon organisme, anesthésiant très légèrement les soubresauts dont j'étais victime.

— On fait quoi ? s'est enquis Hayden en m'observant intensément.

La dame au sari a éclaté de rire. Le même rire glaçant qu'elle avait exprimé dans mon cauchemar. Mon estomac s'est retourné et j'ai senti des sueurs froides couler le long de mes omoplates.

— Ça va vous plaire : on doit l'affaiblir.

N'en disant pas plus, elle s'est retournée pour me dévisager. Certains vampires me tenaient toujours fermement clouée au sol avec leurs cordes et je n'ai pas pu m'écarter. Elle s'est accroupie à ma hauteur et, de son ongle pointu, elle a longé la courbe de ma joue.

L'Éveil d'AlyaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant