Chapitre 39 - Les barrières tombent

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Nous sommes restés un long moment dans le canapé, nos jambes emmêlées, nos corps soudés et nos lèvres avides de la peau de l'autre. J'avais l'impression de me trouver ailleurs, hors du temps. Les minutes perdues à fuir les monstres dans mon jardin me revenaient en masse dans cette bulle de quiétude qui nous enveloppait tous les deux.

Je n'avais plus envie de bouger, plus envie de penser et j'en oubliais tous les problèmes qui avaient pu m'angoisser jusqu'ici. Pour la première fois depuis des semaines, je me sentais bien, incroyablement bien. Le poids de mon corps s'était allégé, la pression dans mon crâne s'était défaite et les tiraillements de mes muscles avaient pris la fuite.

J'avais l'impression d'être puissante, de redoubler d'énergie. J'aurais pu courir un marathon, gravir une montagne et survoler un océan. Pourtant, lorsque le souffle de Neven a caressé ma joue et que j'ai relevé la tête, son regard ne semblait pas aussi serein que le mien. Au contraire, marquées par le tourment, ses iris s'étaient assombries et m'observaient douloureusement.

Sans me laisser le temps de le questionner, il a murmuré :

— Je n'ai jamais couché avec ces autres filles.

Pendant un instant, mon esprit s'est vidé, véritable trou noir perçant la partition de mes pensées. J'ai haussé les sourcils, surprise par sa remarque mais il ne s'est pas laissé démonter.

— La dernière fois que je suis venu ici, tu m'as accusé d'avoir ramené Lily et d'autres dans ma chambre. Tu m'as dit que tu ne me croyais pas et quand je t'ai expliqué que ce n'était pas ce que tu t'imaginais, tu ne m'as pas cru.

Ses mots ont vogué dans l'air qui nous séparait pour plonger à l'intérieur de mes oreilles et éveiller les souvenirs derrière mes paupières. Je me suis rappelée sa visite, pour l'exposé, notre dîner improvisé et la conversation qui avait dérapé sur le sujet des Adelphes.

Il était vrai qu'il m'avait dit ça, j'arrivais encore à discerner ses excuses qui avaient sonné monstrueusement faux ce soir-là, note dissonante dans le morceau qu'il cherchait à me faire écouter. Et soudain, j'ai associé les nouvelles informations que je venais d'apprendre aux anciennes et j'ai plaqué les mains sur ma bouche, réalisant ce qu'il était en train de sous-entendre.

— Tu veux dire que... que tu leur as fait du mal ?

Une vague d'appréhension s'est faufilé entre nous, m'encerclant de ses bras glacés, prêts à m'étreindre d'un câlin grelottant. Je me suis mordue la lèvre mais Neven a repris d'un ton calme :

— Non. Pas du tout.

— Alors tu ne les as pas mordues ?

Il a cillé, figeant mon sang dans mes veines, confirmant mes soupçons. Je me suis gelée dans ses bras, horrifiée par les aveux qu'il était en train de me faire. Face à ma réaction, le garçon a raffermi son emprise autour de ma taille et a passé sa jambe au-dessus des miennes pour me coller à lui.

— Ne fuis pas, Alya. Pas avant que je t'aie tout raconté, s'il te plaît.

J'ai tenté d'éviter son regard, d'ignorer l'envoûtement que sa voix exerçait sur moi mais c'était peine perdue. J'ai levé les yeux pour rencontrer les siens, implorants. Doucement, j'ai opiné, lui signifiant qu'il avait mon attention. Il a soupiré de soulagement.

— J'ai bel et bien mordu ces filles, mais ça ne leur a pas fait mal. Les Igel ont un venin dans leur salive rendant la morsure agréable voire jouissive pour leurs proies.

J'ai froncé les sourcils.

— Pourtant je peux t'assurer que quand Kalia m'a mordue tout à l'heure, j'étais vraiment très loin de l'orgasme.

L'Éveil d'AlyaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant