Chapitre 12 - La rumeur court

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Nous avions beau nous trouver au milieu de la classe, l'installation des élèves s'est effacée, leurs commentaires se sont évaporés et la salle s'est troublée, ne laissant plus que le détail du regard argenté de Neven.

L'entourage s'est obscurci, mes oreilles se sont bouchées et seuls les battements sourds de mon cœur ont empli l'espace, secouant mon corps, l'enflammant.

— Alya.

La voix de Neven ne sonnait plus pareille. Profonde, grave, elle chatouillait mes tympans, glissait dans mes veines pour faire bouillir mon sang. Sa main s'est agrippée à la mienne et je n'ai pas résisté. Au contraire, je l'ai serrée aussi. Je me suis accrochée à lui comme à un radeau, notre contact peignant en moi des couleurs inconnues, magnifiques, envoûtantes.

Je ne voyais plus que lui, ne sentais plus que lui, n'écoutais plus que lui, une seule sensation me manquait : le goût. Je voulais connaître sa saveur, me délecter de son parfum, me perdre dans son étreinte. C'était une impulsion, plus forte que tout, impossible à contrôler. Je me suis penchée, Neven en a fait de même.

Son souffle a balayé une mèche sur mon front, le mien a rebondi sur sa lèvre pour se réfugier sur ma peau. Son haleine chaude et mentholée nous a engloutis et je me suis perdue dans ses iris, prête à sauter le pas.

Un claquement violent a résonné, nous avons sursauté.

— Salut, Neven.

Lily se tenait face à nous, les mains à plat sur le bureau du garçon. Je l'ai lâché immédiatement, comme si je m'étais brûlée et me suis penchée derrière ma table pour attraper mon sac et en sortir mes affaires. Mon cœur battait la chamade, mon souffle était saccadé et ma tête tournait. Encore une fois, j'étais désorientée, effrayée même. Que venait-il de se passer ? Pourquoi étais-je hypnotisée par lui, comme ça ?

Ce n'était pas normal, c'était insupportable et pour le moins gênant au milieu d'une classe. Ma nuque s'est échauffée et j'ai levé la tête par réflexe pour surprendre le regard insistant de Cameron. Au moment où nos yeux se sont croisés, il a haussé un sourcil : « qu'est-ce que tu fous ? », a-t-il articulé. J'ai levé les mains en l'air, l'air de dire « rien du tout ».

Mais mon nouvel ami n'était pas dupe. Il a pincé les lèvres avant de m'adresser une expression qui signifiait clairement qu'il allait me harceler de questions plus tard. Génial.

Je ne pouvais pas lui en vouloir, s'il avait été témoin de la scène qui venait d'avoir lieu, tu m'étonnes qu'il se posait des questions ! Cependant, il allait être déçu : comment pouvais-je lui apporter des réponses si je ne les connaissais pas moi-même ?

Foutues sorcières de la vie et leurs traditions pourries ! J'étais persuadée que ce phénomène qui nous secouait, Neven et moi, était purement magique, mais personne n'accepterait de répondre à mes interrogations si je ne donnais pas de détails précis et j'avais trop peur que mon lien avec le nouveau, un humain en l'occurence, soit la preuve que la magie ne ferait jamais de véritable éveil en moi.

Si c'était le cas, je voyais déjà l'expression de ma mère : elle allait se fendre d'une moue de pitié puis se reprendre d'un coup et m'assurer de ne pas faire attention à ce qui m'arrivait. Puis, elle filerait comme une flèche au Coven pour annoncer au clan des sorcières qu'il pouvait définitivement me supprimer des listes de la communauté surnaturelle.

— Tu es parti très tôt, ce matin.

La voix de Lily m'a ramenée à la réalité avec violence. Non mais de quoi parlaient-ils depuis tout à l'heure ? J'ai vu le visage de Neven se fendre d'un sourire en coin et mon estomac s'est retourné.

L'Éveil d'AlyaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant