Chapitre 50

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À feu et à sang.

Le chaos avait embrasé le palais.

L'assemblée des nobles avait envahi les couloirs et les roturiers, faiblement armés, avaient attaqué Amaury.

En l'espace de quelques secondes, le silence cérémonieux de la salle du trône avait volé en éclat. Il avait laissé Lyssandre hébété, le visage couvert de sang, et une fièvre douloureuse au corps.

Il avait eu une réaction, et une seule, et s'était dégagé de la prise de son oncle qui, pour la première fois avait reculé. Sur son visage s'était lu autant de confusion que de mépris et il avait lâché, dans un murmure :

— Voilà tout ce qu'ils ont à m'opposer.

S'étaient déployés les forces armées d'Amaury. Il n'était pas venu seul et ne s'était pas contenté de quelques poignées d'hommes pour le seconder. S'il n'avait pas permis à tous ses alliés, que le pouvoir vacillant qui régnait sur Loajess pouvait imaginer nombreux, il avait pris soin de s'entourer des meilleurs.

À croire que le prince oublié aurait pu s'épargner la peine d'éloigner Cassien comme il l'avait fait.

Lyssandre avait vu les hostilités enfler sous ses yeux. Déjà, on entraînait Amaury à l'égard pour le préserver de l'ardeur anarchique des combats. Entre les mains des domestiques, des majordomes et des cuisiniers, les armes devenaient imprévisibles et le nombre faisait d'eux une menace qu'il n'était pas bon de sous-estimer.

Lyssandre assista à l'intervention miraculeuse de Miriild comme un être extérieur à la situation. Comme si le sang ne l'aveuglait pas encore, comme si les hommes de son oncle, désorientés, ne savaient pas qui abattre en premier. Cette noblesse qu'ils haïssaient à titre personnel ou ces gens issus du peuple qui avaient attaqué sous les ordres de la reine elle-même ? Les premiers coups furent portés, les courants d'hommes se heurtèrent les uns aux autres pour marquer les premiers dommages.

— Attrapez-le ! rugit soudain la voix d'Amaury.

Lyssandre s'arracha à ce spectacle désolant. Celui de la salle du trône souillé de sang, une fois de plus.

Une voix couvrit le brouhaha et le choc des armes qui se rencontrent et parvint jusqu'au roi :

— Qu'est-ce que tu attends, bon sang ? Fuis ! Fuis, Lyssandre !

Nausicaa se débattait comme une enragée, mais la foule était encore trop dense pour qu'elle puisse espérer atteindre son ami. La dernière fois que Lyssandre l'aperçut, ce fut aux mains avec une courtisane qui tentait de fuir. Elle hurlait :

— Misérables lâches ! Vous osez fuir ? Vous osez ?

Elle tempêtait tant et si bien qu'elle récolta l'attention du plus grand nombre autour d'elle. Lyssandre contourna une immense colonne, fut presque projeté à terre par la course d'un homme qui battait en retraite sans un regard en arrière, et parvint à atteindre l'épais rideau qui séparait la salle du trône de son antichambre. Il se rappelait y avoir patienté longtemps, dans l'attente qui le séparait de son couronnement.

Il se rappelait avoir cédé à l'emprise de la peur.

Il était bien curieux que six mois plus tard, le roi qu'il était devenu était poussé à fuir parce qu'il refusait d'abdiquer.

Lyssandre, dans la pénombre de l'antichambre, reprit son souffle. Il ouvrit ses mains devant lui pour en observer le tremblement. Que faire ? Devait-il fuir, purement et simplement, ou espérer qu'un second miracle survienne et sauve le palais ainsi que ses habitants d'Amaury ? Il n'y avait pas de Cassien aux alentours pour lui dicter sa conduite en pareille situation et Lyssandre était dépassé.

Longue vie au roi - T2 [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant