Chapitre 10

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[Et la version finale du dessin, le roi Soann comme je me le suis imaginée. J'espère que cette représentation est fidèle à l'image que vous vous faites du personnages]


Lyssandre crut que toute la tension accumulée au cours de ses dernières heures lui échappait à l'instant où il franchit le seuil de sa tente. Cassien sur ses talons, il exhala un long soupir et se courba, comme si toute l'énergie qui lui servait à tenir debout s'en était soudain allée.

Le vieux sorcier les avait laissés partir, le commandant Arfair avec lui. Le même messager les avait reconduits au campement de Loajess et ils avaient traversé la frontière une fois de plus. Priam avait opté pour le silence, sa main abîmée toujours pressée contre sa poitrine. Lyssandre l'avait entendu haleter dans la nuit, respirer plus fort que les trois autres réunis. Si l'absence de discrétion du garçon avait agacé Cassien, il n'en avait rien laissé entendre. Avant que Priam ne rejoigne sa propre tente, une mine déconfite figée sur son visage d'adolescent, son cousin l'avait retenu :

— Demandez au médecin de soigner ta main et reposez-vous.

— Dois-je également préparer mes affaires ? avait demandé le garçon, d'une petite voix.

— Seulement si vous désirez affronter ma tante le plus tôt possible.

Lyssandre avait gratifié son cadet d'un regard bienveillant, tâché d'une pointe de malice. Calypso serait mise dans la confidence, un point non-négociable, mais le roi offrait à Priam de rester.

— Merci.

Et il avait disparu entre les tentes, s'attirant la sympathie des soldats.

Lyssandre avait même cru entendre Cassien ajouter, dans un chuchotement :

— Ce gamin est fait pour cela.

Une tendance nette à l'héroïsme, donc. Le roi avait acquiescé sans rien ajouter. Il aurait, lui aussi, aimé posséder un tel talent.

Lyssandre fut rappelé à la réalité par l'élancement de sa main. Personne à l'extérieur de cette tente ne savait que le roi avait été blessé. Personne, sinon Cassien. Le regard douloureux de son amant pour la plaie alerta ce dernier :

— Vous devriez suivre le conseil que vous avez donné à votre cousin.

— Ce n'est qu'une coupure et... et je n'ai pas envie de subir l'excès de zèle d'un médecin. J'ai envie d'être seul.

Sans s'offenser, ou sans laisser entendre qu'il pouvait l'être, le chevalier s'inclina et s'apprêta à s'éclipser avant que Lyssandre ne le retienne :

— Non ! Attendez ! Ce n'est pas ce que j'entendais par solitude. Je voulais...

Il pesta. Ses justifications ne servaient qu'à l'enfoncer un peu plus et, si Cassien n'avait pas été un être si taciturne, peut-être aurait-il souri. L'ancien Cassien, l'adolescent du palais, son protecteur contre vents et marées, l'aurait fait.

Le Cassien qui avait survécu à la guerre s'approcha simplement. Il brisa, comme une prison de verre, la distance qui devait séparer le roi de toute individue, en particulier de ses honnêtes serviteurs. Sans chercher le regard de Lyssandre, sans donner au contact une quelconque signification, il saisit sa main blessée et en examina la plaie. Il étudia la coupure, les quelques saletés incrustées sur ses bords, et présenta son verdict :

Longue vie au roi - T2 [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant