Lyssandre était silencieux.
Le messager en face de lui, immobile sur le pas de la porte, dansait d'un pied à l'autre. Un haut-conseiller l'accompagnait et se permit de commenter :
— Cela ne pourrait pas plus mal tomber.
— La mort d'hommes ne survient jamais au bon moment.
Lyssandre avait tenté de tempérer le timbre de sa voix, mais un net agacement y perçait. Quelque part, une voix ténue dans sa tête tenait un discours fort déplaisant.
Voilà l'occasion rêvée de repousser le mariage.
— Une idée du coupable ?
Le silence qui s'éternisa fut évocateur. Le haut-conseiller précisa tout de même, au terme d'un long moment :
— Ce ne peut-être que lui.
— Je me souviens d'un temps pas si lointain où il n'était pas le seul à souhaiter ma mort, commenta Lyssandre.
Pourtant, il savait que cette manière d'opérer, cette attaque qui paraissait arbitraire et qui se révélait brillamment réfléchie, ne pouvait appartenir qu'à Amaury. Lyssandre réfléchit longuement, il imagina cette attaque du point de vue de son oncle. Pourquoi Halev ? Pourquoi maintenant ? Les réponses, d'apparences évidentes, se révélaient bien plus nuancées. Comme à son habitude, Amaury ne laissait rien au hasard.
— Il semblerait que ses hommes se soient retranchés dans le bâtiment principal de la façade nord de l'Episkapal. Nous pensons qu'ils tiennent en otage des hommes. La noblesse y était rassemblée pour signer les derniers documents du Traité et pour s'accorder sur ses clauses.
Les personnalités les plus éminentes de Loajess rassemblées en un même lieu. Cette fois, les courtisans n'étaient pas attaqués comme certains avaient été atteints lors de la dernière attaque sur Halev. La noblesse dispersée sur tout le territoire du Royaume était visée par cette menace dont personne ne connaissait le nom.
Dont le roi avait volontairement tu le nom.
Amaury en jouait, il se servait de cet anonymat désormais que l'île de Balm avait échappé à son contrôle. Il y avait fort à parier qu'il vagabondait depuis lors et qu'il n'avait plus rien à perdre. Certains de ses alliés avaient trouvé refuge dans les îles voisines, d'autres avaient clamé leur innocente et s'étaient réjouis de la venue d'Äzmelan. Le roi de Déalym leur offrait un répit supplémentaire. Lyssandre était trop occupé pour se concentrer sur l'arrestation de ces coupables. Seuls une demi-douzaine d'entre eux n'avaient pas réussi à s'échapper à temps du château de Balm et le double avait été compromis à la suite de cet épisode.
— Il n'y a aucune revendication jusqu'ici ? Notre ennemi ne peut pas se permettre de simplement prendre en otages les puissants de Loajess et attendre que je lui fasse une proposition.
Amaury était audacieux, pas sot.
— Pour l'heure, aucune négociation n'a débuté et les portes nous sont fermées.
Lyssandre avait mentionné une prise d'otages, mais il s'agissait en fait de la moins définitive des possibilités. La probabilité pour qu'Amaury ait simplement ordonné le massacre de ces hommes était importante. Tout dépendait de ses intentions et si Lyssandre se penchait sur la haine que son oncle vouait aux piliers du pouvoir royal, à savoir ces seigneurs sûrs de leur légitimité et de leur juste place, les chances pour qu'il les ait fait tuer s'accroissaient.
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Longue vie au roi - T2 [BxB]
FantasiAprès des décennies de conflits sans fin, les peuples meurtris de Loajess et de Déalym caressent enfin l'espoir d'une trêve. Lyssandre de Loajess, monarque épris de rêves interdits, entreprend des premières négociations avec son ennemi juré, Äzmela...