Chapitre 8

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[La version encrée du dessin qui m'a pris quand même quelques heures de travail]


Lyssandre s'était avancé jusqu'à aller à la rencontre du messager. Le visage de celui-ci n'apparaissait que partiellement. Un foulard bleu-nuit recouvrait son menton et sa bouche, ainsi que le sommet de son crâne. L'homme s'inclina devant le roi sans relever la présence des autres soldats. Si le souverain avait décidé de l'abattre, confirmant de fait les soupçons de Déalym, il n'avait qu'un mot à prononcer pour que ses gardes ne tranchent la tête du malheur.

La pensée effleura l'esprit de Cassien. Il fallait croire qu'Arkal l'inspirait toujours et que les effusions du sang dont elle avait été le théâtre l'influençait encore, même des mois plus tard. Lorsqu'on choisissait cette voie, tout semblait plus simple, plus naturel. La moindre contrariété se ponctuait par une mise à mort injustifiée, mais libératrice.

Lyssandre n'était pas des rois qui cédaient à cette facilité.

— Est-ce tout ? le pressa-t-il.

Le messager opina du chef avant de reculer d'un pas. Le souverain serra les poings. Il ne pouvait pas s'en aller si prestement, pas alors qu'il avait fait de Priam leur prisonnier.

— Qu'en dois-je venir ? À l'aube ?

— Immédiatement.

Aucune possibilité de négociation, là encore. Le haut-conseiller, bien plus à son aise maintenant qu'aucune arme ne le tenait en joug, se rengorgea avant d'articuler :

— Ce n'est pas là une manière de procéder. Nous ne sommes pas une nation que vous pouvez soumettre ou espérer diriger comme bon vous semble. Le principe d'une paix, si d'aventure celle-ci finit par être signée, est d'être équitable. Ces ordres, ces premiers signes d'un rapport de domination, sont inacceptables !

Cassien en vint à regretter d'avoir promis de préserver la vie de cet homme. Il en vint également à se chagriner de ne pas avoir vu une flèche s'égarer dans la gorge de cet orgueilleux.

Moins extrême, Lyssandre claqua sa langue contre son palais. C'était fâcheux, cette manière de se conduire, et les quelques jours passés loin du château avaient contribué à balayer le souvenir d'une autorité supérieure à la sienne aux yeux de son conseiller. Le roi ne pouvait lui offrir la possibilité de ruiner ses efforts. Si Loajess devait assurer ses arrières et accepter les quelques conditions de Déalym pour se tirer de cette mauvaise passe, Lyssandre n'hésiterait pas un seul instant. Sa fierté ne pesait pas bien lourd face à l'avenir de son peuple.

— Très bien, laissez-moi le temps d'en avertir les hommes réunis ici, d'emporter avec moi ceux nécessaires à ma protection ainsi qu'à celle de mon cousin, et je vous suivrai.

Le haut-conseiller gonfla les joues, contrarié d'avoir été ignoré. Sans le vouloir, il laissait à Lyssandre tout le loisir d'imaginer quelles seraient les positions du Haut-Conseil lorsque le moment serait venu d'échanger avec l'ennemi.

— Je regrette, mais je ne peux pas vous autoriser à être accompagné de vos hommes. Le commandant Arfair a demandé à ce que vous veniez seul.

Cette fois, Lyssandre ne décida pas seul. Il ne consulta pas le haut-conseiller, qu'il s'indigna en silence, mais Cassien dont le regard s'était durci. Son visage inexpressif, lisse et vierge de toute émotion trahissait ce soir une forme d'avertissement : ce serait folie que d'accepter.

Longue vie au roi - T2 [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant