Dans son appartement à Poudlard, Harry Potter faisait les cent pas. Il pensait à la situation, catastrophique, de l'Angleterre.
La guerre s'était bien terminée. Il avait vaincu Voldemort ; Ron et Hermione s'en étaient sortis indemnes. Ainsi que Neville, Ginny, Luna, McGonagall, et tant d'autres.
Et tant d'autres n'avaient pas survécu. Si l'on se focalisait sur la deuxième guerre des sorciers, le premier à être tombé était Franck Bryce, le jardinier des Jedusor. Malheureusement, Voldemort étant sous forme semi-humaine lors de ce meurtre, Cédric Diggory avait été considéré comme le premier tombé sous sa baguette par le ministère de la Magie. Pendant longtemps, il avait hanté les rêves les plus sombres d'Harry, et, encore maintenant, il y faisait quelques apparitions. Le dernier était l'un des élèves de Poudlard.
Entre eux deux, des dizaines et des dizaines de victimes. Tuées par les Mangemorts, soumises au baiser des Détraqueurs, mortes de faim ou de froid lors d'une fuite, torturées jusqu'à la délivrance.
La guerre finie, il avait pensé que tout était terminé. Mais il avait vite déchanté. En plus des pertes déplorées, assez élevées, une crise économique sans précédent s'était abattue sur le pays. La guerre l'avait totalement ruiné, et les Gobelins avaient fait preuve d'égoïsme en refusant d'éponger les dettes accumulées par le ministère "en revanche de la dague perdue de Regadrag le cinquième". Que ce soit dans le Londres moldu ou sorcier, les immeubles étaient délabrés et noirs, recouverts de suie. Tentant le tout pour le tout, les Mangemorts restants tuaient ou capturaient des gens au hasard dans la rue pour s'attirer que quelconque funèbre gloire, une prime donnée par les loups-garous ou encore essayer de devenir le prochain Voldemort, faisant régner la terreur. Le ministère, totalement corrompu par Malefoy et d'autres lors des deux guerres, s'était effondré. Depuis, la justice, les lois, n'existaient plus, et n'étaient pas respectées. Ceux qui trouvaient un travail étaient chanceux. Harry étant le Survivant et le Vainqueur des Ténèbres, on lui avait offert de nombreux postes, alors que d'autres n'avaient rien.
Il en avait accepté un seul, celui de professeur de Défense Contre les Forces du Mal à Poudlard. Il aurait aimé être Auror, mais ils avaient tous été éradiqués en cherchant les Mangemorts survivants, s'ils n'avaient pas été vaincus à la Bataille de Poudlard. Personne n'était présent pour le former, personne n'était présent pour l'employer. Et surtout, il n'avait aucune envie de voir les dégâts de la guerre chaque matin et chaque soir, se sentant un peu plus coupable chaque fois que son regard accrochait un quelconque bâtiment en ruine, ou même, parfois, un cadavre au détour d'une rue.
Son travail lui avait plu, au début. Puis le contrecoup de la guerre s'était fait sentir. Des professeurs trop fatigués pour faire cours, des élèves à la fois craintifs et insolents. La vérité, c'était qu'Harry Potter n'en pouvait plus.
Ginny avait fini par casser avec lui. Elle trouvait qu'il ne passait pas assez de temps avec elle. Ce qui était vrai, en soi. Après la guerre, il s'était peu à peu éloigné de tout le monde, d'abord pour faire son deuil, ensuite parce que supporter celui des autres était trop difficile pour lui. Cette rupture ne lui avait fait ni chaud ni froid. Il avait fini par se détacher lentement de ses sentiments. Depuis, il passait ses journées seul, devant une classe remplie d'élèves qui ne voulaient pas l'écouter.
Il voyait Hermione et Ron de temps en temps. Puis, suite à la variole du dragon, ils étaient décédés tous les deux, par manque de soins. Les Médicomages avaient été débordés, réquisitionnés à Ste Mangouste pour remettre sur pieds ceux qui avaient une chance de s'en sortir. Pomfresh avait tout essayé, mais le matériel dont elle disposait n'avait été d'aucun secours.
Le trio avait été oublié de tous. Si Harry avait pu mettre fin à la guerre, les sorciers avaient compris qu'il ne pouvait pas rétablir le Royaume-Uni tout entier. Alors on s'était détourné de lui et de ses amis...
À ce souvenir, il frappa dans le mur de pierre brute de sa chambre, pensant – idiotement – que la douleur physique remplacerait la douleur psychique.
Une voix, sinueuse et insidieuse, lente et envoûtante, s'immisça alors dans sa tête.
— Tu as souffert, trop peut-être, mais moins que les murs qui t'entourent.
Il reconnut une forme de legilimencie et se concentra pour lui répondre. Mais avant qu'il ne fasse quoi que ce soit, elle reprit les devants.— Tu as une solution. Il y en a toujours. J'ai le pouvoir de te faire voyager dans le temps, par mes souvenirs et mon histoire. J'existe depuis des millénaires, j'existerai dans plusieurs autres millénaires. J'ai vu les guerres sorcières et gobelines, des générations et des générations d'élèves sur mes bancs. Qui connaît mieux que moi l'histoire de la sorcellerie ? Ce que je t'offre, c'est un nouveau départ. *
Il soupira de frustration avant de se rappeler d'un vieux grimoire qu'il avait déchiffré à la lueur du feu, le dos penché et les lunettes glissant sans fin sur son nez, ses cheveux noirs tombant devant ses yeux, qui expliquait vaguement la procédure à suivre.
— Je... Comment ?
— Ces murs sont assez vieux et puissants pour que tu voie Salazard lui-même. Ce qui ne serait pas souhaitable. Mais tu as le choix. On a toujours le choix.
Une vague d'espoir l'envahit. Se pouvait-il qu'il puisse changer le cours du temps, sauver ses parents, ses amis ?Plus rien, ici, ne comptait vraiment pour lui. Certes, les Weasley l'avaient accueilli comme leur propre fils, mais il s'était toujours senti mal à l'aise face à cette marque d'affection, comme s'il n'en était pas digne. L'idée d'avoir sa propre famille l'envoûtait.
— Si j'accepte, que dois-je faire ?
— Je t'aiderais. Tu reviendrais là où tout a commencé : au temps de tes parents. Ta mission serait de changer le monde que tu vois actuellement.
— C'est tout ?
— À peu près.
Il tiqua à cette phrase. On lui avait caché trop de choses dans son histoire, il n'avait pas envie de refaire l'expérience d'une vie remplie de mensonges et de secrets. Mais s'il acceptait, il en saurait plus que Dumbledore lui-même, s'assurant un pouvoir certain. Et si ces connaissances pouvaient sauver des vies, ce n'étaient pas deux ou trois détails passés sous silence qui changeraient le cours de l'Histoire.
— En quelle année dans le passé ?
— La septième de tes parents.
Voir ses parents à dix-sept ans, quel étrange concept. Mais ce prix à payer était moindre face à toutes les possibilités qui s'offraient à lui. Et puis, mieux valait quitter au plus vite l'Angleterre qui s'effondrait un peu plus chaque jour, devenant la risée de l'Europe entière.
— J'accepte, dit-il fermement dans sa tête.
Avant que tout ne devienne noir, une dernière pensée :
— Je serai toujours là.
*On m'a demandé quelques précisions, les voici : j'ai toujours pensé que le château Poudlard était vivant, avec ses passages secrets, ses armures et ses escaliers enchantés. Ici, et plusieurs fois au cours de cette fanfiction, c'est cette part de Poudlard qui s'exprime. Elle peut communiquer par légilimencie, télépathie, ou tout autre nom que vous souhaitez utiliser.
J'ai aussi utilisé l'incroyable quantité de magie que renferment les murs de Poudlard (en brouillant les objets électriques, par exemple) pour justifier le fait que cette part vivante de Poudlard puisse effectuer de la magie à l'état brut, et transporter ainsi des personnes dans le temps.
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Poudlard à l'appareil
FanfictionUn voyage dans le temps et hop ! Harry Potter est chez les Maraudeurs. Pour éviter les morts, les pleurs, la douleur, la crise économique, le monde sorcier en ruine. Et les problèmes commencent. Le premier ? Éviter Dumbledore et sa perspicacité. Le...