Le silence dans le train est encore plus embrassant que celui de l'allée. C'est un vieux train sans chauffage, aux wagons remplis de banquettes se faisant face.
Évidemment, le regard de Ian fuit le mien avec ardeur, et par chance, le bruit crissant des rails camoufle légèrement notre gêne. L'incident lui cause plus de tort qu'à moi. Je ne cesse de ressasser ces instants. Qu'est-ce-que ça voulait dire?Je garde les yeux baissés durant tout le trajet. Il ne me parle que deux fois, pour me demander si j'ai besoin de quelque chose, et pour me dire que nous arrivons à destination. Autour de nous, le paysage a changé. Nous sommes passés des grandes prairies vertes, des chênes et des clairières aux immenses étendues enneigées et aux sapins. Lorsque nous descendons du train, deux choses se produisent. Ian ignore délibérément mon début de chute contre la marche du quai, et il remarque que je grelotte.
- Tu as besoin de quelque chose de plus chaud?
Je suis presque étonnée qu'il s'inquiète de ma santé, vu la formalité à laquelle j'ai droit depuis tout à l'heure. Je hoche la tête, suffisamment intimidée pour ne pas oser répondre.
Ses yeux se baissent, il contemple ma robe de campagne, mes épaules dénudées, et je crois même déceler ce qui ressemble à de l'avidité dans son regard.
- Nous allons t'acheter des habits plus pratiques.
Nous marchons jusqu'au galeries marchandes, qui sont totalement illuminées. La nuit, qui est arrivée, transforme chaque lumière artificielle en ce qui semble être une étoile brillante. Ian entre dans une boutique chic, et je le suis.
La chaleur me réchauffe légèrement. À l'intérieur, il y a différents modèles de robes, de pantalons, et de manteaux sur des mannequins et des présentoirs. Je suis un peu intimidée, je n'ai jamais eu autre chose que des robes basiques à me mettre sur le dos. Sans même écouter les conseils d'une vendeuse qui se jette quasiment sur lui, Ian file aux portants des robes. Il en sélectionne une et je retiens mon souffle.
C'est un long vêtement, avec de la fourrure au col et au manches. La robe est d'un blanc immaculé, et descend jusqu'aux chevilles. Il me la passe, ainsi que la cape assortie.- Va enfiler ça.
Je me hâte, obéissante, jusqu'au cabines. Par chance, elle me va parfaitement, Je me regarde devant la glace, et sourit au reflet; la fille qui me fait face est plus resplendissante que jamais. Cet habit me convient parfaitement. Je sors de la cabine, et Ian m'observe d'un oeil critique.
- Tourne toi.
Je m'exécute sans protester. Je me sens rougir. Même si Ian ne dit rien, je sens son regard posé sur chacune des parties de mon corps. J'enfile la cape pour dissimuler la rougeur qui me gagne.
- On prend tout.
Sa voix est calme, posé, il ne laisse rien paraître. Je proteste.
- Mais... Ian ça a l'air très cher. Tu n'es pas obligé de...
Son regard m'arrête net. Je hoche la tête, alors qu'il n'a rien dit. Ian passe en caisse, et paye. Je ressors avec la robe sur moi. Le froid ne m'atteint quasiment plus, est la seule chose qui me dérange est la façon dont je me démarque dans la rue. Les vampires qui m'entourent sont vêtus de noir, de gris et de rouge, et leurs esclaves portent des couleurs vulgaires et ternes. Au milieu de cette masse sombre, je suis la seule qui me fait remarquer, dans ce vêtement blanc et éclatant. Pourquoi m'acheter quelque chose qui me fait autant ressembler à une cible?
Mon maître reprend sa marche, déterminé. Je suis en train de le perdre dans la foule. J'attrape sa main dans mon désespoir, le dernier moyen restant pour ne pas m'égarer. Ian pile et je manque de lui rentrer dedans. Nos doigts sont toujours entrelacés. Il reprend vite ses esprits, et se dirige vers l'hôtel le plus proche, une fois de plus sans un mot. C'est un grand bâtiment ancien, recouvert de neige. Nous arrivons devant, et Ian me lâche tout de suite la main, comme si je le brûlais.
Une fois les formalités passées, je me retrouve dans la même situation qu'au matin même, dans une chambre individuelle, séparée de celle de Ian par une cloison et une unique porte. Le vampire ne donne aucun signe de vie. Cette fois-ci, je n'ai pas de salle de bain individuelle et dois me contenter de la salle d'eau commune.
Je rêve de sentir de l'eau chaude couler sur ma peau, et m'y dirige donc. Sur le chemin, je ne croise que des servantes, et quelques autres clients qui me regardent avec appétit. Je ressemble sûrement à un paquet cadeau à leurs yeux dans cette tenue.
La salle d'eau est petite, mal éclairée. Quelques esclaves sont déjà dans les rares douches fonctionnelles, et je fais donc la queue. Il y fait terriblement froid. Lorsqu'enfin mon tour arrive, je m'enferme. Enfin j'essaye du mieux que je peux, vu l'absence de verrou.
Je commence à ôter une épaule, mais suis interrompue par des bruits stridents. Des cris. Ça provient de l'extérieur. Je n'ose plus bouger. J'entends des pas précipités, puis tout est silence.
J'essaye de faire le moins de son possible, retiens ma respiration. Lentement, je vois la porte de ma cabine s'ouvrir. Une main blanche apparaît, une main que je ne connais pas. Peu à peu, j'entrevois un pan de chemise, puis un bras, puis un visage. Ce visage, c'est celui d'un client, que j'ai croisé tout à l'heure. Il me sourit de toute ses dents, et un frisson parcourt mon corps.
- Tiens tiens, je savais que je pourrais te trouver ici. Délicieuse créature...

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Mean Vampires
VampireSoul vit depuis toujours en temps qu'esclave de sang dans le manoir de la famille Esther. Mais lorsqu'elle est mutée chez les Adens, elle se rend compte que les relations avec les vampires sont bien différentes que ce qu'elle pensait.... Que faire...