26. N'aie pas peur

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QUELQUES HEURES PLUS TÔT
-• Aaron •-
- Kim?

Tony fut le premier à réagir. Quant à moi, j'observe la jeune femme devant nous avec intérêt. Qui est-elle? Et encore mieux, comment Tony la connaît? Ses cheveux blonds et son corps affreusement dévêtu me disent quelque chose.

- Tony? Qu'est-ce que tu fais ici? Fit-elle d'une voix anormalement aiguë.

- On venait voir une amie. On s'inquiète pour elle. Je te repose la même question d'ailleurs. Dis-je, attirant son attention sur moi.

Son regard bleu glacé me jauge pendant une demi-seconde avant qu'elle ne trouve quelque chose à me répondre.

- Je crois qu'on vient voir la même amie.

Elle hausse les épaules pour accompagner la parole, geste faussement nonchalant. Je suis sûr qu'elle cache quelque chose, cette petite peste. Un ton de voix aussi calme ne peut être qu'une illusion.

- Si c'est le cas, tu peux attendre avec nous, mais elle est au restaurant avec ses parents en ce moment. Ça pourrait prendre un moment.

Tony ne le sait pas encore, mais je le remercie mentalement d'avoir concocté un mensonge à ma place. Je ne dis pas qu'il ment mieux que moi, mais habituellement, ses histoires sont plus crédibles.

Si elle était vraiment une amie de Jasmine, elle nous aurait chassés de cette maison en un rien de temps. J'ai une forte impression qu'elle n'a rien à faire ici elle non plus.

- Alors je n'aurais qu'à repasser! Ravie de vous avoir rencontrés.

Un clin d'oeil plus tard, elle sort, ne laissant que Tony et moi derrière. Ce dernier a des explications à me donner.

- Qui est-elle?

Tony prend cet air paniqué qu'il a à chaque fois qu'il doit m'annoncer quelque chose. Ça doit être gros, chaque seconde qui passe, son visage devient un peu plus blanc. J'espère qu'il ne s'évanouit pas, ce serait dommage qu'il se fracasse la gueule avant de me répondre.

- C'est la fille de Nico. Il secoue la tête avant de reprendre. Et elle n'était pas ici pour la visiter.

Mon poing atteint le mur le plus proche à la seconde où je comprends le sens de sa phrase. Dans quelle sorte de merde cette femme s'est-elle fourrée, bordel.

- Je dois m'occuper de quelque chose. Appelle-moi quand t'auras notre fugueuse.

-• Tony •-
Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire maintenant qu'Aaron est parti. Après tout, c'est difficile, causer tout seul.

Je ne sais pas exactement qu'est-ce qu'il est parti faire. Quelque chose d'encore plus difficile que de causer tout seul, c'est bien de comprendre ce mec. Ses pensées sont fermées à double tour et scellées dans du béton armé.

Sans me questionner plus sur la raison de son départ, je vais faire un tour dans les autres pièces de la maison. Je ne vais pas rester à glander devant la porte jusqu'à ce que quelqu'un ose pointer le bout de son nez.

Arme à la main, par précaution, j'ouvre la première porte à gauche. Derrière cette dernière se cache une ravissante cuisine. C'est perturbant à quel point ces gens sont propres. Il n'y a aucune vaisselle sale, aucune tache sur le comptoir et même l'intérieur du four mérite de se retrouver dans un catalogue Sears.

Fouiner dans cette cuisine m'a donné faim on dirait. Mon estomac chiale si fort que les morts en ont sursauté dans leur tombe. Peut-être qu'il y a quelque chose à manger quelque part. Tant qu'à entrer par effraction, si bien aller jusqu'au bout et voler leur bouffe.

Je pose la main sur la poignée du réfrigérateur en prenant une grande inspiration. Faites qu'il y a du fromage. Quelle fut ma déception quand je ne vis qu'une tonne de verdure entassée dans chaque compartiment du réfrigérateur. C'est une blague? Quelle sorte de famille ne se nourrit que sur de la laitue et des choux de Bruxelles?

Au tour du placard d'y passer. S'il vous plaît, des Doritos. Je ris face à mes pensées idiotes en réalisant brutalement que c'est bien plus marrant quand Aaron est dans les parages. S'il était là, je n'aurais pas à me parler tout seul.

Cette fois, je fus plus que surpris par ce que je découvris. Pas des barres tendres, ni des biscuits aux légumes. Non, ce que je découvris me glaça la sang.

- C'est quoi ce bordel.

C'est dans des moments comme celui-ci qu'on aimerait mieux que personne ne nous réponde.

- Tu vas tout comprendre dans très peu de temps mon chou. Tu vas m'être bien utile, ne t'en fais pas.

INSTANT PRÉSENT
-• Jasmine •-
- Qui êtes-vous et que faites-vous chez moi?

Un homme qui m'est jusqu'alors inconnu pose sa main sur mes lèvres, m'imposant au silence.

- N'aie pas peur, je ne suis pas ici pour te faire du mal. Je veux juste que tu me dises où ils se cachent.

Mon sang ne fit qu'un tour et une larme solitaire roula sur ma joue. Ça sonne exactement comme quelqu'un qui est ici pour me faire du mal.

L'arme du soit-disant gentil monsieur est toujours pointée sur moi, chose que je n'apprécie guère, mais je doute qu'il ne veuille la retirer.

À le voir l'agiter devant mon visage sans cesse, je sais que j'ai raison. Je me reconcentre sur ses paroles juste à temps pour entendre l'essentiel.

- Tu sais, j'ai reçu l'ordre de ne pas te faire de mal, mais si tu ne coopères pas, je vais devoir t'amener avec moi pour éviter que quelqu'un d'autre ne mette la main sur toi. Tu comprends? Ce n'est pas moi le méchant ici.

Sa dernière phrase me met en rogne. Pour qui il se prend, à dire qu'il n'est pas le méchant dans cette histoire? Il croit que j'ai quelque chose à me reprocher?

Avec tout le courage que je peux rassembler, je me redresse de toute ma hauteur et lui adresse mon pire regard. Aussi pathétique peut-il être.

- Si ce n'est pas toi le méchant, qui c'est?

- C'est moi. Fit une autre voix.

À l'entente de ces deux petits mots, un frisson de peur me parcourt l'échine. Est-ce que j'aurais échappé à ce magistral coup de poing si je m'étais fermé le clapet? Peut-être bien.

Laisse moi partir 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant