-• Jasmine •-
J'attends avec impatience que l'heure de sortir n'arrive. Je n'en peux plus de rester affalée dans un lit à longueur de journée. Quand arrivera deux heures, Aaron viendra me chercher. J'imagine qu'il m'emmènera voir mes parents d'abord, ils doivent être morts d'inquiétude. C'est tout de même étrange, qu'ils ne sont pas venus me visiter.
Un coup à la porte me fait sursauter. Je fronce les sourcils en jetant un regard à l'horloge. Il n'est même pas midi, ça ne doit pas être Aaron.
J'avais vu juste, le corps frêle qui se faufile dans l'embrasure de la porte n'est pas celui que j'attends avec impatience depuis ce matin.
Sa tignasse blonde est un peu ébouriffée, il doit s'être levé il y a peu de temps. Je finis par le reconnaître, c'est Anthony, le mec de hier. Il jette des regards des deux côtés du couloir avant de fermer la porte à clé. Toujours en restant de dos, il ferme les stores et allume la télé sur la chaîne de sports.
- Bonjour! Lançais-je, heureuse de ma nouvelle distraction.
Il se retourne, haussant sa cagoule sur sa tête, avant de me retourner le salut. Il ne veut pas que je vois les cernes affreuses qui doivent se trouver sous ses yeux? Ou pire, il tente de cacher un bouton?
- T'as quoi à te cacher ainsi? Tu te sens complexé par mon pansement? Blaguais-je, me sentant déjà plus à l'aise avec lui que la veille.
Il ne rit pas, je ne crois même pas qu'il a réagi à ma connerie. Je me renfrogne aussitôt, à quoi ça sert qu'il passe me visiter si c'est pour sceller ses lèvres avec obstination?
- Écoute, j'ai pas beaucoup de temps à t'accorder, il faut que tu me donnes toute ton attention. Souffle-t-il si bas qu'avec le match de foot de la télé, je ne suis même pas sûre que c'est vraiment ce qu'il a dit.
Je me contente d'hocher la tête, certaine qu'il va me sortir une connerie du genre « j'ai envie de me faire tatouer sur la fesse ». À cette pensée idiote, j'échappe un gloussement.
Ce petit bruit semble irriter Anthony, qui, dans un mouvement rageur, retire sa cagoule. La surprise est clairement visible sur mon visage. La vue de son visage défiguré me ramène les pieds sur terre. Ce n'est pas le temps de rigoler.
- Tu dois sortir d'ici. Il balance un sac sur mon lit. Dans ce sac, il y a des vêtements, de l'argent et un cellulaire. Je vais signer ta décharge et tu prendras le bus pour te rendre à la Boulangerie Marie-Claude sur la rue principale. De là, une voiture t'attendra et te conduira où tu veux. Compris?
Ses yeux affolés sondent la pièce à une vitesse spectaculaire, démontrant sa nervosité grandissante. Tout cela me semble exagéré, de quoi m'enfuirais-je? Pourquoi autant de précautions? Surtout, pourquoi lui?
- Pourquoi?
Ma question anodine ravive sa frustration. Je ne lui ai rien demandé, on ne se connaît même pas! À voir ses yeux se promener de la fenêtre à la porte, je comprends qu'il est en danger.
Il prend des risques en venant ici, mais pourquoi? Qu'est-ce qu'on voudrait bien d'une petite adolescente rondelette avec à peine assez de courage pour aller au magasin toute seule? Les rouages de mon cerveau tournaient à plein régime, je voulais comprendre.
- C'est lui qui m'a fait ça. Tenta-t-il une dernière fois en pointant son visage.
L'incompréhension foudroyante sur mon visage ne fit que l'énerver une énième fois.
- Aaron.
Aaron comme mon supposé petit ami? Avec sa petite bouille d'ange, je peine à le croire capable d'un tel geste. Pourquoi aurait-il fait du mal à son ami? Je sens une migraine pointer le bout de son nez avec toutes ces questions.
- Tu viens avec moi, ou pas? Cingle-t-il.
Je ne sais aucunement comment réagir. Je n'ai pas non plus de réponse à lui donner.
- Qu'est-ce qui s'est passé entre vous?Demandais-je, ne lui laissant pas d'autre choix que de m'expliquer.
C'est ce que je croyais, du moins. Comme j'aurais dû m'en douter, il ne répond pas à ma question et se contente de secouer la tête négativement en reculant vers la porte.
Ses mains tremblantes essaient de déverrouiller la porte. Je comprends sans difficulté, il veut fuir.
- Hé! Pars pas!
C'est peine perdue, il est résolu à s'en aller. La détermination à en faire pâlir les morts qui éclaire son regard me donne la chair de poule.
- Tu vas réaliser tôt ou tard que t'aurais dû me suivre. Tu sais pas quelle terrible erreur tu viens de faire. Bonne chance, Pauline.
- Je m'appelle Jasmine, pas Pauline.
- Je sais. Murmure-t-il avec un sourire énigmatique.
Il pose à nouveau sa main sur la poignée, mais cette fois, il n'a aucun problème à la déverrouiller. Il m'adresse un dernier regard plutôt dépité, mais celui-ci me fait un effet étrange.
Comme si j'avais une impression de déjà-vu. Le nom Pauline, que je n'avais pourtant jamais entendu avant, est étrangement familier.
D'étranges pensées me traversent l'esprit. Et si ce mystérieux Anthony avait raison? Suis-je en train de commettre une terrible erreur? Aaron est-il réellement ce monstre capable de faire du mal aux autres? C'est dur à dire. On dirait que j'ai oublié quelques choses en me fracassant la gueule.
Je ne sais même pas comment je me suis fait aussi mal. Ils m'ont dit que j'étais tombée dans les escaliers, pourtant, ma maison ne compte qu'un étage. Toutes ces incertitudes me poussent à croire le personnage intrigant qu'est Anthony.
Je ne sais pas encore pourquoi, mais Aaron s'annonce aussi dangereux pour moi qu'une flamme ardente.
Je dois partir.
Sous l'emprise d'une poussée d'adrénaline, je saute dans mes vêtements et attrape mon sac. Je suis tellement ailleurs que je ne remarque même pas le chemin qui me mène à la sortie de l'hôpital.
Mes mouvements semblables à ceux d'une automate ne sont guidés que par une seule chose, la peur.
L'air frais de l'extérieur emplit mes narines, me ramenant aussitôt à moi. Je dois trouver Anthony.
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Laisse moi partir 1
Ficção AdolescenteSes yeux de biches et ses courbes en attiraient plus d'un, elle le savait et en profitait. Elle se prenait pour la reine du monde, sans représailles. Mais comme on dit, chaque bonne chose a une fin. Une série d'événements la remit à sa place brutal...