chapitre 26 ◌ deuil

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Le dîner chez les Galliard se fit majoritairement dans le silence pour Ophelia. Tout en remuant sa nourriture dans son assiette sans trouver la force de manger autant qu'elle le devrait, elle écouta d'une oreille Porco conter la guerre en quelques minutes. Ses parents étaient encore émus de le voir ici, bien en vie, eux qui avaient vu partir leur aîné sans qu'il ne revienne jamais.

— Ne te force pas, Ophelia, lança sa mère avec bienveillance en remarquant son air maussade. Tu dois être fatiguée, et vous rentrez tout juste de la guerre alors tu as le droit de ne pas avoir faim, je comprends.

La jeune femme esquissa un sourire poli et lui répondit d'un simple hochement de tête gêné. Porco ne semblait pas aussi détendu que ses parents face à son manque d'appétit et son comportement, mais il garda le silence pour ne pas troubler le repas.

— Maintenant que j'y pense, continua-t-elle gentiment, si tu as besoin d'aide pour tes cheveux, n'hésite pas à me demander. Ils ont l'air d'avoir besoin de quelques retouches, je pourrais-

— Non.

Ophelia prit conscience de son ton trop sec lorsqu'elle vit sa fourchette étroitement serrée dans sa main. La mère de Porco en avait pratiquement sursauté et ce dernier n'en parut que plus agacé.

— Pardon, s'empressa-t-elle de dire plus calmement. Ils ne me dérangent pas comme ça, et je... J'aime pas qu'on me touche les cheveux.

Elle prit soin d'adopter son ton le plus grave, consciente qu'ils iraient ainsi s'imaginer qu'elle gardait des traumatismes de toutes les formes de torture qu'elle avait subies sur Paradis. Ils ne poseraient pas de questions, de cette manière. Et ils ne toucheraient pas à ces mèches inégales par endroits, qui étaient tout ce qu'il lui restait de ces semaines passées dans ce petit hôtel avec lui. Les meilleures semaines de sa vie, sûrement. Les plus calmes.

Visiblement irrité mais refusant de gâcher cette première soirée en compagnie de sa famille, Porco récupéra l'attention de ses parents pour parler de l'armée, du rôle que les guerriers avaient joué dans la guerre et toutes ces choses qui ne faisaient que réveiller la colère d'Ophelia. Elle ne dit rien non plus pour ne pas lancer une dispute devant ce couple déjà trop blessé émotionnellement, mais ses rictus ironiques n'échappèrent pas à son camarade. Il faisait l'éloge de l'armée Mahr. De ceux qui avaient tué Aida.

Il leur fallut attendre le départ du couple Galliard pour laisser leur rancœur emplir la pièce et la plonger un moment dans le silence.

Occupée à nettoyer des assiettes dans l'évier, Ophelia ne prit pas la peine de se retourner quand il lui adressa la parole, nonchalamment appuyé contre le plan de travail après avoir fini de débarrasser la table.

— Je comprends pas ce que tu cherches, commença-t-il sans préambule. Tu veux vraiment être la cible de toute l'armée ?

— C'est déjà le cas, non ? C'est pas pour ça qu'ils ont tué ma petite sœur ?

— T'as aucune preuve de ça, rétorqua sèchement Porco. Mais si tu continues à manquer de respect à tes supérieurs dès que t'en as l'occasion, tu vas juste te faire tuer, toi.

— Pas de preuve ?

La jeune femme prit le temps de poser la vaisselle pour être sûre de ne pas la briser. Quand elle se tourna vers son camarade, toute ironie l'avait quittée et seule la rage était visible dans son regard habituellement si curieux et mystérieux.

— Comment exactement tu crois qu'elle est morte ?

— On peut être sûrs de rien, insista-t-il. Et t'es la dernière personne a l'avoir vue en vie, qu'est-ce qui prouve que t'as pas dit un truc qui l'a chamboulée et que-

𝐑𝐈𝐒𝐄 𝐀𝐍𝐃 𝐅𝐀𝐋𝐋.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant