chapitre 27 ◌ échiquier

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Son autorisation de sortie bien en main, Ophelia ne fut pas surprise d'entendre une voix familière l'interpeler alors qu'elle traversait le marché du camp Eldien en direction du grand portail. Elle hésita à l'ignorer, mais fit l'effort de se retourner et de ralentir pour laisser Porco la rattraper.

- Pas la peine de t'excuser, fit-elle en le voyant ouvrir la bouche. Par contre, je veux bien ce café que tu as probablement préparé pour te faire pardonner.

Mal à l'aise, le jeune homme acquiesça et lui tendit l'un des deux récipients qu'il tenait. Ophelia lui adressa un mince sourire qui n'atteignit pas ses yeux et tourna les talons sans perdre plus de temps, intriguée par la signification de ce rendez-vous improvisé entre les guerriers. Elle en avait reçu l'information quelques heures plus tôt et s'était étonnée de ne pas être convoquée par ses supérieurs Mahr mais bien par Sieg qui souhaitait apparemment rassembler toute l'équipe.

- Tu sais que je te déteste pas, pas vrai ? voulut néanmoins s'assurer Porco tandis qu'ils progressaient entre les étalages du marché.

- Tu peux. Ça change pas grand chose pour moi.

- Ouais, j'avais compris, marmonna-t-il.

Légèrement en retrait, il eut soudainement l'impression que la situation était improbable. Ophelia était juste là, elle avançait dans les rues de Revelio la tête haute alors qu'il avait passé des années à la croire morte. Ces mêmes rues qu'ils avaient si souvent traversées ensemble pendant leur enfance et leur adolescence, main dans la main. Si ses sentiments étaient toujours là, leur complicité n'avait pas survécu à ces quatre ans d'absence, elle. Tout comme les moments où Ophelia se montrait joviale, qui avaient été remplacés par une constante aura intimidante, froide.

En pensant à ce qu'avait été leur amitié si particulière, Porco prit conscience que dans beaucoup des souvenirs qu'il avait de leur enfance, Aida était là. Pendant longtemps, ils avaient été un trio. Et maintenant qu'un maillon manquait, la chaîne entière était irréparable.

Une fois arrivés au grand portail, le regard glacial d'Ophelia dissuada les deux officiers qui s'y trouvaient de lancer une quelconque plaisanterie dans sa direction. Elle se contenta de leur montrer son autorisation sans un mot puis quitta le camp, suivie de près par Porco. Dans la grande cour du site militaire, les enfants étaient déjà en train de s'entraîner. Ophelia leur offrit un regard compatissant et pressa le pas jusqu'à la porte qu'ils devaient emprunter. Ces gamins se tuaient à la tâche en pensant bien faire alors qu'ils n'étaient que des futures armes pour Mahr. Elle allait finir par en être malade.

Perdue dans ses pensées quant à l'atrocité des conditions de vie de ces enfants, la jeune femme dut se retenir à la rambarde pour ne pas tomber dans les escaliers lorsque Porco sursauta devant elle et s'arrêta brusquement. Agacée, elle jeta un coup d'œil au-dessus de son épaule avant de hausser les sourcils.

- Salut, Pock, Lia.

- Pieck... On peut savoir à quoi tu joues ?

L'air de rien, la guerrière se remit à avancer à quatre pattes sous les regards confus de ses camarades.

- À force, cette position est devenue plus naturelle pour moi. Excusez-moi si je vous ai fait peur.

Ophelia laissa le blond se charger de l'aider à se remettre sur pieds pour marcher correctement, encore surprise de constater que les transformations lui laissaient ce genre de séquelles. Quand Pieck fut plus stable, elle put avancer seule malgré sa démarche moins naturelle que celle d'une humaine normale comme Ophelia.

- Bonjour ! sourit Colt lorsque la porte s'ouvrit sur le trio.

- Ah, ça y est, tout le monde est là ? s'enquit Sieg tout en venant s'installer en bout de table.

𝐑𝐈𝐒𝐄 𝐀𝐍𝐃 𝐅𝐀𝐋𝐋.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant