Chapitre 3

23 3 0
                                    

Clémence nous entraîne, Coraline et moi, pour notre habituelle photographie d'avant soirée. Nous posons de manière exagérée devant le grand miroir de mon entrée. Coraline a revêtu une petite robe large de couleur bleue brute, puisqu'elle n'apprécie pas les robes moulantes, se jugeant trop "corpulente" pour en porter. Les escarpins dorés qu'elle chausse lui permettent de gagner quelques centimètres. Quand à elle, Clémence a revêtu une jupe en daim courte avec un haut blanc à manches longues. Aux pieds, elle a choisi de chausser des cuissardes noires plates, n'étant pas adepte des talons. Et puis, moi, je porte un tailleur-pantalon fuchsia, avec une chemise en soie, de couleur bleu pastel. Je chausse aussi de petites scandales à talons argentées. Une fois notre photographie prise, nous sortons de mon appartement, et je n'oublie pas la bouteille d'alcool, ainsi que ma petite pochette contenant mon portable, mes cigarettes, et mes clés. Nous montons au troisième et dernier étage de l'immeuble. La musique se fait déjà légèrement entre, ce qui annonce une plutôt bonne soirée. Je toque à l'appartement 7C. Après à peine quelques secondes, la porte s'ouvre sur le dénommé Peter Black, qui nous offre un large sourire.

"Vous êtes finalement venues! s'exclame t-il.
-Nous ne manquons jamais une occasion de faire la fête, Peter! lui répond avec -peut-être trop d'- enthousiasme Clémence.
-Je vous en pris mesdemoiselles, entrées.

Il se décale de la porte, nous laissant entrer. Je le remercie en hochant simplement la tête. Clémence et Coraline s'empressent de rejoindre le séjour, me laissant seule avec mon voisin. Je me retourne pour lui faire face, alors qu'il vient de poser une main dans le bas de mon dos pour m'inviter à entrer un peu plus dans son appartement.

-Je suis navrée pour la scène de tout à l'heure. J'étais ridicule. Et puis je suis aussi désolée de ne pas vous avoir reconnu monsieur.
-La scène de tout à l'heure m'a bien fait rire, ne vous en excusez pas. Quand à mon identité, ne vous excusez pas non plus. Au contraire, cela me permet de parler normalement avec des personnes.
-Je comprends."

Je lui adresse un faible sourire et retire sa main -qui n'avait bizarrement pas quitté mon dos- en m'avançant vers le séjour. Je rejoins mes amies qui papotent en se servant quelque chose à boire. Je dépose avec les autres bouteilles celle que j'ai ramené. Mes yeux se baladent dans la grande pièce, la détaillant. Son appartement est beaucoup plus grand que le mien, et le fait que je n'ai pas vu d'autre porte sur le palier me conforte dans l'idée que son appartement fait tout l'étage. La décoration du séjour est simple mais très vintage avec des tableaux cubiques et abstraits accrochés sur les murs. Les canapés sont en cuirs marrons, les autres meubles lisses et parfaits. Les invités sont tous habillés de manière simpliste mais tout en gardant de la classe, comme Clémence et Coraline. Les hommes portent des jeans brutes -pour la plupart- et des tee-shirts blancs, gris ou noirs, recouverts de vestes ou de bombers. Quand aux femmes, elles sont toutes vêtues de robes ou de jupes, très foncées. Je détourne la tête, lorsque Coraline me tapote l'épaule et je prends le verre qu'elle me tend, sans savoir réellement ce qu'il contient. Nous décidons finalement d'aller danser toutes les trois, avec les autres personnes qui s'amusent déjà. Je ris aux éclats en voyant mes amies improviser des danses loufoques, sensuelles ou encore lorsqu'elles font le robot. Je me joins facilement à elles. Tout le stresse des partiels, du déménagement et de mes problèmes s'évaporent au fur et à mesure que la soirée passe. Je jette le premier coup d'oeil de la soirée à l'horloge et reste surprise en voyant qu'il est déjà minuit. Je n'ai pas vu le temps passer, étant trop occupée à rire, danser, parler et boire, je dois l'avouer. Je m'excuse au prêt de mes amies, leur disant que j'ai besoin d'aller me rafraîchir. Je longue le seul couloir de l'appartement, cherchant une salle de bains. J'ouvre la première porte et tombe sur une chambre. Ce n'est pas ici. J'ouvre une seconde porte et tombe sur les cabinets. Toujours pas. Il ne reste plus que trois portes. J'en ouvre une au hasard. Ce n'est ni une chambre, ni une salle de bains. Un synthétiseur est posé dans un des coins de la pièce, deux ordinateurs se trouvent collés contre un des murs. Une batterie prend une place importante dans un des autres coins de la piece. De nombreux câbles jonchent le sol, recouvrant presque la totalité de la moquette bleue. Les murs sont recouverts d'une étrange mousse grise. Mes yeux tombent sur un long bureau sur lequel sont éparpillés des tonnes de papiers et quelques stylos. Curieuse de nature, je m'avance dans la pièce et me penche par-dessus le bureau afin de voir qu'est-ce que c'est que tous ces papiers. Les nombreuses feuilles sont noircies par des textes. Je comprends alors qu'il s'agit des chansons qu'écrit le fameux Peter pour son groupe. Je me penche encore plus afin de lire plus attentivement.

《On dit:"Les opposés s'attirent"
Mais ce qui nous unit ce sont nos points communs》

Le reste de la feuille est vierge, seules ces deux phrases sont inscrites. C'est peut-être la plus belle chose que j'ai lu venant d'une personne lambda.

"Vous aimez?

Je sursaute et me retourne automatiquement, ne m'attendant pas à être surprise ici. Le prénommé Peter Black se trouve appuyé contre le chambranle de la porte.

-Pardonnez-moi, je ne voulais pas...
-Ce n'est rien. Même si je ne suis pas sûr que mon ami appréciera que l'on ai lu ses créations.
-Je cherchais la salle de bain, et je suis tombée sur cette pièce.
-Et vous n'avez pas pu résister à votre curiosité.
-C'est exact.

Je baisse la tête, honteuse de mon acte impoli.

-Vous n'avez toujours pas répondu à ma question. Aimez-vous ce que vous avez lu?
-C'est très joli.
-Vraiment?
-Vraiment.
-Alors tant mieux. Vous cherchiez la salle de bain? Pourquoi cela?
-Je voulais fumer, mais je me suis dit que vous ne voudriez pas, alors si j'utilisais la salle de bain, vous ne vous en renderez peut-être pas compte. Veillez me pardonner pour mon impolitesse, je n'aurais pas dû toucher à vos affaires, ni penser fumer sans votre accord.
-Ce n'est rien, je vous assure. Quand à votre envie de fumer, il a un cendrier juste ici.

Il me désigne l'objet du doigt, qui se trouve sur le coin du bureau.

-Vous fumez?
-Non, mais Nick et Henry, oui.
-Nick et Henry?
-Ceux avec qui j'écris les textes, et qui font partis du groupe.
-Je comprends mieux.

Il quitte finalement -j'ai envie de dire- le chambranle de la porte et s'avance lui aussi dans la pièce. Il prend place sur une des chaises, et me désigne celle à côté.

-Installez-vous, c'est mieux pour fumer.
-Je peux, réellement?
-Mais bien sûr.
-Merci.

Je m'approche de la chaise lorsque j'entends une voix hurler mon prénom dans tout l'appartement.

-C'est votre amie?
-Clémence! Je suis navrée, mais je dois vraiment y aller, si elle m'appelle c'est que...
-Je vous suis."

Nous quittons la pièce, et retournons au séjour. Je retrouve immédiatement Clémence et Coraline. Cette dernière est assise au sol, et se tient la cheville. L'alcool et les talons, ça ne fait pas bon ménage...

Pari risquéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant