Pari risqué

Chapitre 24

Assise sur mon canapé, je me fais une petite manucure. C'est un conseil des filles: "fait des choses que tu ne fais jamais" m'avait dit Clémence. Et Coraline a ajouté: "des trucs de filles. Ce que tu ne veux jamais faire avec nous". Sur le coup, je l'ai mal pris. Elles avaient clairement l'air de dire que je n'étais pas une fille, que je ne me conduisais pas en tant que telle, et que je me laissais vraiment aller depuis une semaine. Mais le pire, c'est qu'elles ont raison. J'ai même décidé de me faire un masque de beauté. Mon portable se met à vibrer sur la table basse. Je le prends et décroche lorsque je vois le prénom de Clémence.

"Allô?
-Salut Ella! Comment ça va?
-Ça va. Et toi?
-Super! Alors, pas trop stressée pour les résultats des partiels?

Mince, j'avais oublié ce détail. C'est vrai que les résultats arrivent toujours une semaine après, mais j'étais complètement ailleurs.

-J'avais totalement oublié...
-Donc tu as oublié la fête de ce soir, où on découvrira tous ensemble nos résultats?
-Un peu...
-Heureusement que je t'appelle! Donc c'est vingt heures chez moi, tu as interdiction d'aller sur le site pour les résultats avant que l'on soit tous chez moi. Compris?
-Oui, oui.
-Et ce soir, prépare toi un peu plus que d'habitude. Sors une belle robe, pour une fois.
-Comme tu voudras.
-Et du maquillage!
-Oui. À dans quatre heures!"

Je raccroche, déjà épuisée de cette soirée. Cependant, l'idée de pouvoir m'occuper de moi, ainsi que de penser à autre chose me paraît plutôt pas mal. Je crois que j'ai même ma petite idée pour la tenue.

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Je souris face à mon reflet, satisfaite de moi-même. À vrai dire, je ne me suis pas sentie aussi bien depuis un moment. Je regarde mes cheveux bouclés à travers le miroir. J'aime beaucoup. J'ai maquillé mes yeux d'un peu de noir, mettant en valeur mes iris bleus. Je porte une robe près du corps rouge ruby, m'arrivant au-dessus des genoux. Le dos est totalement ouvert, rendant le tout sexy à souhait. Mes pieds sont chaussés d'escarpins noirs vernis. Une veste de tailleur est délicatement posée sur mes épaules. Je jette un coup d'oeil à l'heure. Tout pile vingt heures. J'attrape à l'entrée ma petite pochette dorée, et sors. Je ferme à clés, les range et descends les escaliers. Dans la rue, je m'empresse de monter dans ma voiture. Je démarre et me voilà sur les routes torontoises. Après une dizaine de minutes, je me gare en bas de chez Clémence. Je sors de mon véhicule, et me dirige vers l'immeuble. Je rentre et emprunte l'ascenseur. Arrivée au quatrième étage, j'entends déjà la musique retentir. Je sonne à son appartement, et c'est Charlène qui m'ouvre. Elle me fixe un instant, et un énorme sourire prend possession de ses lèvres. Elle me fait entrer, me complimentant. Nous nous rendons au séjour, et je remarque tout de suite ma petite bande. Je vais saluer chacun d'entre eux, et vais ensuite me servir un verre. Je rejoins Coraline et Clémence, afin de m'amuser.

"Dis-donc, Ella! Tu es sublime!
-Vous l'êtes encore plus.
-Mon dieu, elle a du vernis, s'insurge Coraline.
-Ce n'est trois fois rien.
-Mais pour nous si!
-Ça vous dit de danser?
-C'est parti!"

Clémence nous attrape chacune un poignet et nous emmène danser. Nous improvisons comme à notre habitude des chorégraphie digne des plus grands danseurs étoile et hip-hop. Clémence part dans une macarena déchaînée, sous nos éclats de rire, à Coraline et moi. L'heure du slow arrive beaucoup trop vite -à mon goût. Peter et Clémence s'assemblent, et Coraline rejoint Pascal. Je me retrouve alors seule, et je décide d'aller sur le balcon, pour fumer. Voir tous ces corps se coller et danser ne m'intéresse pas réellement. J'allume ma cigarette et la porte à mes lèvres. Je recrache toute la fumée accumulée dans mes poumons, fixant les lumières de la ville. Je lève les yeux, et contemple les quelques étoiles qui sont visibles. La nature est belle, et époustouflante. J'entends la porte fenêtre s'ouvrir et se refermer.

"Ça y est, tu as fini de danser et de te coller comme une sangsue à ton Peter?

Je ris, m'imaginant déjà Clémence râler en contestant cette comparaison.

-Je crois que tu te trompe de personne.

Le timbre chaud, cassé et rauque de sa voix me procure un frisson, horrible et délicieux. Nick... Je ne m'attendais pas à lui faire face, mais j'aurais dû y penser, les autres sont ici.

-Oui.

Je ne me retourne pas, sachant que je n'arriverai pas à lui faire face. Je le sens bouger et venir à côté de moi, mais en laissant une certaine distance. C'est atroce d'être à côté de la personne que l'on aime, sans pouvoir la prendre dans ses bras. J'entends qu'il allume lui-aussi une cigarette. L'odeur de sa fumée me donne envie de fondre en larme, me rappelant la première fois où nous nous sommes retrouvés sur ce balcon ensemble.

-Tu es extraordinairement sublime ce soir.

Tremblante, je porte à ma bouche ma cigarette. J'entends Clémence crier à l'intérieur, indiquant qu'il est l'heure de regarder les résultats. Cette fille exagérera toujours tout. Je jette mon mégot dans le cendrier, et tourne les talons.

-Au moins tu vois ce que tu as raté."

Je rentre sans rien de plus à son égard. Clémence est déjà sur le site, et cherche déjà le prénom de Céline. C'est dans un cri de joie qu'elle lui annonce qu'elle a réussi, et que l'université, c'est finit pour elle. Elle lui informe qu'elle a tout de même failli ne pas valider l'année. Elle cherche ensuite le prénom de Coraline, qui est à deux doigts de pleurer. Heureuse, Clémence lui annonce la bonne nouvelle, et nous voyons déjà ses larmes couler. Elle rit aux éclats, et ses larmes de joie me touchent énormément. Vient finalement mon tour, et je demande à Clémence de ne pas faire durer le suspense. Elle me dit alors, le plus simplement possible, que j'ai réussi. Je saute de joie, me trouvant au zénith du bonheur. Tout ce pourquoi j'ai vécu, je l'ai réussi. Nous prenons tous dans les bras l'un de l'autre, fière.