Emily

Troisième interlude

Les longs couloirs froids du centre de recherche Alpha étaient vides. Ses murs gris étaient recouverts de divers plans, projets et d'écrans retransmettant les informations mondiales, des graphiques de données, des tâches à faire ou tout simplement une transmission des dirigeants de ce complexe scientifique. Situé à un endroit classé secret défense, au nord de l'Écosse, il occupait une dizaine d'hectares souterrain. Au-dessus il n'y avait que des landes vertes et brumeuses, dont le pays à le secret, ainsi que quelques ruines de vieux châteaux légendaires. C'est parmi ces tas de pierres que se trouvait l'une des entrées de la petite cité scientifique secrète. Une jeune femme, d'environ la trentaine, vêtue d'habits de ville, un sac sur le dos, ses cheveux bruns coincés sous une casquette et ses yeux bleus derrière des lunettes ovales, perchées sur un nez aquilin, s'approcha d'un cercle de pierres, dans un endroit reculé dominé par la nature. Elle sortit une petite carte de sa poche, la posa contre un des grands rochers ancrés dans le sol. Soudainement, les monolithes s'illuminèrent faiblement, l'herbe sous ses pieds s'affaissa et la femme disparut, comme avalée par le cercle, qui retrouva son apparence initiale.

Elle se retrouva dans un coin du complexe souterrain, vide, pour le moment. Il était assez tôt, un très grand nombre dormait, ceux réveillés travaillaient dans leurs bureaux respectifs. La femme enfila une blouse avec un badge sur lequel figurait sa photo, sa profession (consultante) et son nom : Emily.

Elle soupira. Ces couloirs étaient définitivement trop grands, même si elle possédait de longues jambes, elle n'aimait pas marcher dans des environnements fades, comme celui qui s'étalait sous ses yeux, ses yeux n'étaient absolument pas stimulés et elle ne prenait aucun plaisir à se déplacer ainsi. Elle se dirigea vers le grand labo où elle travaillait. Il n'y avait encore personne mais elle déposa son sac sur une paillasse et commença à allumer toutes les machines de la salle, pour qu'elles chauffent un peu avant l'arrivée des spécialistes. Elle s'assit sur sa chaise à roulettes et se déplaça dans la pièce de cette façon, en attendant que la pièce se réveille. Celle-ci était assez spacieuse, surtout en hauteur, éclairée par des halogènes industriels. Il y avait une dizaine de paillasses avec un ordinateur chacun, disposées verticalement sur cinq rangées juste devant une porte en verre, entourée de part et d'autre par des murs en vitres teintées. Mais ce qui prenais le plus de place était un immense dispositif dont la partie la plus grosse était un cylindre en acier percé en son centre de plusieurs mètres de diamètre. Nul doute que cet appareil était important. Emily en était toujours impressionnée de cet engin monumental. Il était pour l'instant éteint, elle avait pour ordre de ne pas y toucher, mais lorsqu'il était en fonction il émettait une légère vibration. Juste devant le cylindre, en hauteur, il y avait une passerelle en fer qui descendait au sol à l'aide d'un escalier fixé au mur de gauche, il permettait aux scientifiques d'approcher l'objet de plus près afin d'y effectuer des mesures ou d'autres tâches expérimentales. Sous cette colossale machine que tout le monde appelait "Le Disque", en plus des cales le permettant de tenir debout, il y avait plusieurs instruments de mesures, un prototype du Disque en bien plus petit ainsi que d'autres appareils, qu'Emily devait juste allumer sans poser de questions.

Après tout, elle n'était que consultante ici. Elle n'avait ni les connaissances, ni la prétention, ni le curriculum pour y toucher. De base elle avait fait des études de graphisme mais le hasard des choses a fait qu'elle s'était retrouvée dans cet endroit. Elle décida de mettre un peu de musique en attendant les autres. Elle tourna sur sa chaise en même temps que des questions importantes tournaient dans son esprit. Notamment la raison de sa présence ici et la nature de ses employeurs à part un nom, elle n'avait rien d'autre. Elle sortit un vieux carnet marron de son sac et l'ouvrit pour noter ce qui lui passait par la tête. Elle retomba sur un logo, une sorte de Y au milieu d'un cercle, le divisant en trois zones de couleur blanche, rouge et violette. C'était celui de la compagnie concurrente de celle où elle travaillait. À côté de ce dessin il y avait marqué "Projet RED ?". Cette inconnue était celle qui occupait le plus son esprit. Elle se pencha sur le dossier de sa chaise et regarda le plafond gris clair de la pièce. Elle ferma les yeux, bercée par les sons symphoniques de sa musique. Une journée normale au centre de recherche Alpha.