Chapitre 20

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- Mais pourquoi ? Ça va servir à rien non, je me plains auprès de mon cousin comme une gamine de cinq ans.
- Allez, c'est pour la bonne cause, dit-il en rigolant de mon comportement.

Je croise les bras autour de ma poitrine et Willie se place derrière moi pour poser son foulard sur mes yeux. Il ne veut pas que je vois le garage quand je rentre pour ne pas que je remarque quoi que ce soit ! Je ne comprends pas trop mais c'est mon cousin, j'ai arrêté de chercher avant même d'avoir commencé. Il me prend la main et on entre chez la chanteuse comme si tout était complètement normal. Je commence à connaître le chemin depuis le temps mais, avec les yeux dans le noir, c'est plus compliquée. C'est comme si mon corps ne savait plus rien !

- Ok, voilà ! Ne bouge surtout pas ! Tu vas compter jusqu'à dix dans ta tête et enlever le foulard, d'accord ? me dit mon cousin.

Un ! J'hoche la tête peu convaincue par ses paroles. Deux ! Dans quoi je me suis embarquée encore une fois. Trois ! C'est un peu stressant quand même d'être là avec un foulard sur les yeux. Quatre ! C'est long quand même. Cinq ! Je souffle un coup pour remettre mes idées en place. Six ! Bababwa babanana. Sept ! C'est juste le nombre des mercenaires ou des samouraïs. Huit ! C'est beaucoup trop calme pour que je sois dans le garage quand même. Neuf ! Bientôt la fin, je touche au bout. Dix ! J'enlève le foulard afin de...

- Surprise, crient toutes les personnes du groupe présentes dans le garage.

Je saute de peur en serrant bien fort le foulard dans ma main. Si j'avais pas déjà été morte, je crois que je serais morte d'une crise cardiaque à l'instant même ! Rien n'a été déplacé : une banderole est attachée au balcon avec "Joyeux fantoniversaire" écrit dessus, de la nourriture est présente - même un gâteau au chocolat -. Heureusement que l'on peut manger même en étant un fantôme ! Et d'autres décorations sont placées un peu partout dans la pièce.

- Vous voulez que je meurs une deuxième fois, c'est ça en fait ? je demande après avoir repris mon souffle. Et c'est quoi ça ? Un fantoniver-quoi ?
- Un fantoniversaire, c'est un anniversaire de fantôme. C'est Reggie qui l'a inventé, m'explique Alex en haussant les épaules.
- Mais ça fait que...
- Six mois que tu es un fantôme ! me coupe Reggie.
- Hein ? Déjà ? Mais c'est...
- On a refait le compte plusieurs fois, réplique la chanteuse.
- C'est pas tout mais...
- T'as faim, on coupe Reggie dans sa phrase.

Le bassiste a l'air dégoûté qu'on le connaisse si bien mais, s'il ne parle pas de musique ou de country, il ne parle que de nourriture. Comme si c'était sa vie ! Après, je ne peux pas lui en vouloir vu que la bouffe c'est la vie. Je ne sais même pas comment j'aurais fait si on m'avait dit que je ne pourrais plus jamais manger de nourriture de ma vie.

***

Je sors du garage pour prendre un peu l'air extérieur et retrouve Reggie assis sur le muret à côté du garage qui regarde les étoiles. Je déglutis ne sachant pas vraiment où commencer !

- Tu m'en veux toujours ? me demande le brun en me sortant de mes pensées.
- Hum... je pense pas, je crois même que je t'en ai pas trop voulu, j'avoue en hochant les épaules.
- Trop de sentiments contradictoires, hein ? dit-il en faisant un sourire en coin.
- On peut dire ça comme ça.

Les étoiles brillent beaucoup plus ce soir et la lune n'est pas encore complètement pleine mais produit assez de lumière pour que l'on voit à plusieurs mètres devant nous. Une étoile filante traverse le ciel comme si la nuit nous donnait un signe.

- C'est marrant, c'est comme si...
- Ouais, c'est exactement ça.

Il rigole à ma réplique et continue de contempler le ciel pendant que je le regarde. J'ai jamais vraiment pris le temps de le regarder, tout s'est déroulé naturellement entre nous que je n'ai même pas fait attention à son physique. C'est quand même ouf ! Six mois que l'on se connaît et je n'ai jamais remarqué...

- Arrêtes de baver, je sais que je suis beau mais pas au point de faire baver une si jolie fille, se moque le bassiste.
- Quoi ? Mais... tu m'énerves Peters, je dis en passant ma manche sur ma bouche.
- Non, tu m'aimes Lewis. Allez, viens dans mes bras ! Je sais que t'en crèves d'envie.

Il descend de son piédestal de muret et ouvre ses bras pour m'inviter à m'y réfugier à l'intérieur. Invitation que je ne refuse pas ! C'est comme si dans ses bras j'étais parfaitement en sécurité, comme si je n'avais plus besoin d'avoir peur. Je ferme les yeux pour profiter de sa chaleur et je sens mes muscles se détendre petit à petit. J'ai même l'impression que ma respiration retrouve une allure normale ! Si seulement je pouvais rester comme ça encore longtemps.

- Tu te souviens de la question que tu m'avais posée à la plage ? je lui demande de but en blanc.
- Oui, mais t'es pas obligée d'y répondre tu sais, il me répond en s'écartant un peu de moi.

C'est un peu bizarre comme position quand même : ses mains sont sur mon cou tandis que les miennes sont sur ses hanches. Si les gens nous voyaient, ils diraient que l'on forme un couple depuis plusieurs semaines.

- Sauf que j'en ai envie ! En vérité, quand j'y réfléchis, je me rends compte que j'ai fait la même connerie que toi. Je devais rompre avec Camille le soir où Willie est mort et j'avais tellement mal que j'ai même pas eu le courage de lui dire. Même plusieurs mois après ! Toi, t'as eu le courage de lui dire en face. Moi, j'ai jamais eu le temps de lui dire que je ne ressentais plus rien pour elle. J'ai joué avec ses sentiments parce que je voulais oublier la mort de mon cousin !
- Hey ! C'est pas grave ça, d'accord ? Il faut que tu apprennes à vivre avec, ça va aller. Tu verras, je te le promets, me dit le brun en me prenant une fois de plus dans ses bras et en me faisant un bisou dans le cou qui me donne des frissons.

***

J'ai suivi Reggie dans les rues de Los Angeles, il m'a dit qu'il voulait me montrer quelque chose d'important. Je ne sais pas trop ce que c'est mais il a l'air heureux de me le montrer. On n'a prévenu personne que l'on partait mais le brun avait l'air pressé et on a oublié. On marche main dans la main dans une rue assez silencieuse si on n'oublie que dans l'une des maisons se passe une soirée mais c'est assez calme. La musique n'est pas trop forte et elle est accompagnée d'une légère brise de vent.

- T'as froid ? me demande le bassiste.
- Non, ça va, je dis en sentant un frisson me parvenir dans le dos.
- Mouais, on va dire ça, ricane-t-il.

Reggie commence à enlever sa jacket mais j'ai à peine le temps de me plaindre qu'elle est déjà sur mes épaules ce qui fait rigoler le bassiste qui se retrouve avec sa chemise sur ses épaules au lieu d'autour de son bassin.

- Mais c'est pas trop fin comme vêtement pour se réchauffer ?
- J'ai l'habitude tu sais, il me sourit chaleureusement en reprenant ma main dans la sienne.

On s'arrête juste devant la maison qui organise la soirée qui paraît être une soirée normale. On dirait juste que les personnes ne sont pas présentes à l'intérieur du foyer mais plutôt dans la cour arrière. Ils font peut-être un barbecue ? Mais on fait plus ça en été et c'est encore un peu tôt dans l'année pour le faire. Enfin, c'est que mon avis !

- Hey, ça va être bientôt. Ça va se passer en l'air, m'annonce le bassiste.
- Comment... je suis coupée par un bruit qui me fait relever la tête.

Un feu d'artifice ! Ils font un feu d'artifice ! Je ne sais pas comment Reggie a pu être au courant de cet évènement mais mes yeux sont remplis d'étoiles. Je sais que beaucoup de personnes diront que je donne l'impression que c'est la première fois que je vois un feu d'artifice. Ce n'est pas complètement faux : j'adore ce spectacle, je suis toujours une gamine dès que j'en vois un.

- Comment t'as su ? je lui demande en sortant de ma transe.
- J'ai mes sources, dit-il en me souriant.

Je lui souris en retour et retourne à la contemplation du feu d'artifice. Je sens Reggie lâcher ma main pour passer son bras autour de mes épaules et embrasser ma tempe. Je peux enfin dire que je suis complètement sereine dans la situation où je suis. Même si je dois trouver ma quête inachevée, je n'ai pas forcément de temps imparti : je peux très bien la trouver dans un mois comme dans cinq ans. Cependant, pour le moment, je suis bien, je suis heureuse !

How I became a PhantomOù les histoires vivent. Découvrez maintenant