Chapitre 18

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Plus qu'un cri ; c'est un ordre.

Mon bras s'immobilise, alors que j'étais prête à le lancer avec la force d'un piston sur Nina.

Je me retourne ; la jeune blonde est montée sur le ring, les mains sur la dernière corde, comme si elle s'apprêtait à sauter par-dessus pour intervenir.

- Ça suffit, le combat est terminé. Dit-elle d'un ton péremptoire.

Ses yeux d'un bleu glacial se fixent alternativement sur Nina et moi. Je perçois la jeune brune baisser la tête et se diriger hors du ring, comme une enfant fautive qui vient de se faire gronder par la maitresse d'école.

En sonnant la fin de la récréation ; elle me frustre du jeu cruel auquel nous nous adonnions, toutes les deux, avec un plaisir pervers.

Mais lorsque mon regard rencontre celui de cette mystérieuse blonde, mon ressentiment à son égard laisse place à la curiosité, comme attirée par un magnétisme animal qui se dégage d'elle.

Nina avait déjà disparu rapidement dans le couloir menant au vestiaire, quand elle se glissa avec souplesse entre la deuxième et troisième corde pour fouler le tapis du ring.

Les talons hauts de ses cuissardes la rendaient plus grande que moi de quelques centimètres. Son jean moulant et son chemisier blanc cintré mettaient en valeur ses formes sculpturales.

Elle se dirige vers moi, d'un pas assuré. Et lorsqu'elle se retrouve à quelques pas de moi, j'éprouve un trouble étrange ; une force émerge et qui contraste avec sa silhouette longiligne.

- Bonsoir mademoiselle Naciri, ou si vous préférez que je vous appelle Nayda.

Je reste muette, interloquée que cette femme, que je n'ai aperçu qu'aujourd'hui, sache mon nom. Mon visage trahit cette surprise, et cela ne lui échappe pas.

- Je me suis permis de questionner monsieur Hernandez à votre sujet, quand je vous ai vu vous entrainer. A au fait, je m'appelle Ingrid Ward, ajoute-t-elle.

- Bonsoir, Ingrid. Vous connaissez bien Tony ? Demandé-je avec curiosité.

- Pas vraiment, c'est même la première fois que je rencontre ce sympathique monsieur. Mais mon employeur le connait bien et depuis bien longtemps.

- Vraiment ? Qui est votre employeur ? interrogé-je en approchant mon gant droit de ma bouche pour enlever le scratch et libérer ma main.

- Monsieur Shelby, répondit-elle avec un large sourire.

A ce nom, un frisson parcourt mon dos et je reste sidérée. Alors que de multiples pensées traversaient mon cerveau, elle me saisit le bras immobile et à demi levé.

- Si vous permettez, dit-elle avec un ton ferme.

Sans attendre un acquiescement de ma part ; d'un geste vif et précis, elle détache le velcro de la protection.

- Merci, soufflé-je, quelque peu gênée par cette soudaine attention et cette intrusion dans mon espace.

- Je pense que vos gants ne sont plus nécessaires. Vous n'avez plus d'adversaires ce soir.

- Vous croyez ? rétorqué-je en la fixant dans les yeux.

Elle sourit.

- Je ne pratique pas la boxe. C'est bien trop violent pour moi. Et vous êtes bien trop forte pour que je me risque à vous affronter...Avec des gants de boxe.

- Nina pourrait vous apprendre ?

- Peut-être un jour, mais en attendant c'est elle qui apprend. Et vous pourriez être aussi une bonne professeure.

- Elle a déjà une bonne technique, répartis-je.

- Je n'en doute pas, mais c'est elle qui s'est retrouvée au tapis, et pas qu'une fois.

- Elle s'est toujours relevée.

- C'est vrai, mais chaque fois plus touchée. Vous êtes, en revanche, restée debout.

- J'ai l'habitude d'en prendre lors de mes combats.

- Ça se voit, dit-elle en regardant les hématomes sur mon corps, laissés par mon dernier affrontement face à Killer-Boy.

Imperceptiblement, Ingrid s'était rapprochée de moi et maintenant son index effleure mon corps et mes bleus. Ce léger contact sur ma peau me fait frissonner.

- Pas trop douloureux ?

- Non pas trop, je me suis endurcie. Certains datent de mon dernier combat, d'autres sont signées Nina, dis-je, la voix soudainement plus rauque.

- Mais rien à voir avec ceux de Nina, retorque-t-elle.

- J'espère qu'elle s'en remettra rapidement.

- Je pense que oui, c'est une dure à cuire. Les coups ne lui font pas peur.

- J'avais remarqué ça.

- Comme vous d'ailleurs, répond-t-elle d'un ton adouci.

Son doigt abandonne l'ecchymose de mon ventre pour remonter de mon menton jusqu'à la commissure de mes lèvres, traçant un sillon dans le sang encore humide.

Ses yeux azur plongent dans les miens comme une tigresse sur sa proie. De nouveau, mes poils s'hérissent comme si on m'avait posé un énorme glaçon entre mes épaules.

Une pression à peine perceptible de son index m'invite à entrouvrir la bouche. Je luis obéis, mes sens affolés sont sous son emprise. Ce n'est plus une sensation glaciale épidermique, mais une soudaine ardeur lubrique intérieure qui me saisit.

Comme anticipant un danger, son doigt se retire brusquement juste avant que le bruit d'une porte métallique me sorte de cette transe sensuelle.

- Je suis prête, Ingrid, s'écrie une voix ; celle de Nina, revenue des vestiaires.

- Attends-moi à la voiture, je dis aurevoir à notre nouvelle amie, dit-elle d'un ton sec, sans se retourner.

- Très bien, Ingrid. Ciao Nayda.

- Ciao Nina, répondis-je en lui retournant un sourire.

Après un léger salut de la main, elle sort de la salle avec son sac de sport sur l'épaule. Son départ me laisse un sentiment d'inachevé. Et comme, si elle lisait mes pensées, Ingrid ajoute :

- Nina reviendra sûrement s'entrainer ici. Je crois qu'elle a la boxe dans le sang. Comme toi du reste.

- Je ferais un plaisir de travailler avec elle

- C'est ce qui m'inquiète un peu ; elle maitrise pas encore ses limites et je crains que toi non plus.

En attendant ces mots, je me rembrunis. Je n'aime pas la critique. Même si au fond de moi, je sais qu'elle a raison ; « dépasser ses limites » est ce qui m'anime après la vengeance.

- Mais cela s'enseigne et je me ferai un plaisir de vous coacher si vous repassez, à tout hasard du côté d'EastChase , se reprend-t-elle avec un sourire équivoque.

Le souvenir du magasin et de ses donjons SM au deuxième sous-sol était encore tout frais dans ma mémoire pour ne pas voir le rapport avec sa proposition.

- Fort possible que nous revoyons alors, dis-je en tenant de donner le change.

- Je n'en doute pas. A très bientôt. Répond-t-elle sans se départir de son sourire.

Sans attendre une réponse de ma part, elle pivote gracieusement sur ses talons pour s'éloigner. Arrivée au niveau des cordes du ring, elle tourne la tête vers moi ;

- Excellent ! dit-elle après avoir sorti son index de sa bouche, comme une vampire se délectant de mon sang. 

LA BOXEUSE SMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant