Chapitre 7 - Le démon

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Nous fûmes secoués dans tous les sens lorsque la limousine effectua plusieurs tonneaux dans un boucan terrifiant, rebondissant avec force contre le sol. Je m'étais jetée sur le client et l'avais enfermé entre mes bras pour le protéger. Une douleur fulgurante me traversa le crâne, mais je ne lâchai pas prise, à peine consciente des grincements plaintifs que produisait la tôle et du liquide chaud qui me coula sur la tempe. Après ce qui me parut une éternité, le véhicule retomba lourdement sur ses roues et s'immobilisa enfin.

Les membres contractés autour du corps tremblant de Wright, j'osais à peine respirer. Que s'était-il passé ?

Je tentai de me souvenir des dernières secondes avant l'accident. Quelque chose avait traversé le pare-brise, et le chauffeur avait perdu le contrôle du véhicule. Et le sang.... Une explosion de gouttelettes écarlates. Je rouvris brusquement les yeux.

— Est-ce que tout le monde va bien ? demanda une voix rocailleuse.

— Oh mon dieu, Laurine ! cria quelqu'un.

— Ce n'est pas mon sang, je vais bien.

Des élancements violents me parcouraient le crâne, et le liquide poisseux qui s'écoulait toujours de ma tempe arriva jusqu'à mes lèvres et me donna la nausée. M. Wright se mit à se tortiller contre moi pour se défaire de ma prise avant de me remuer avec précaution, si proche que je percevais les notes d'alcool dans son souffle.

— Vous allez bien ?

Il y eut un bruit de ballon que l'on dégonflait, tandis que notre client me pressait toujours le bras avec une agitation à peine maîtrisée.

— Réveillez-vous, me supplia-t-il presque.

— Je suis réveillée, finis-je par dire d'une voix éraillée.

Les lèvres collantes et le corps engourdi, je m'écartai à grand-peine de Wright tant mon corps me semblait lourd. Quelques points noirs entachaient ma vue, et je clignai plusieurs fois des paupières pour les chasser. Mes yeux accrochèrent d'abord le plafond déformé, puis Laurine, dont le visage était maculé de sang. Au grand plastique blanc étalé devant elle, je compris qu'elle s'en était sortie sans encombre grâce à l'airbag du siège passager. Enfin, mon attention se focalisa sur Sandy, qui s'était détachée pour s'accroupir devant moi. Elle était blanche comme un linge, mais elle paraissait indemne.

— Attention, me chuchota-t-elle. Tu t'es cognée la tête contre la vitre.

— J'avais deviné, soufflai-je, alors qu'elle m'aidait à me redresser.

Je portai ma main à mon crâne et gémis sous l'effet de la douleur.

À côté de nous, Nika et Cathy s'efforçaient de rassurer Wright, sous le choc de l'accident.

— Soigne-toi, tu vas avoir besoin de tes forces, m'ordonna-t-elle. Que s'est-il passé ? demanda-t-elle ensuite à Laurine.

— Anton est mort. Il s'est pris un projectile en pleine tête.

— Une balle ? s'inquiéta Nika.

— Je ne sais pas, ça s'est passé trop vite.

— Nika, regarde dans la banquette. Je crois que ça a atterri près de moi, précisai-je.

— Concentre-toi sur ta respiration, m'intima Sandy.

Et elle prit de longues inspirations, m'obligeant à me calquer sur son rythme lent. Quand je sentis que j'étais suffisamment en phase avec ma magie, je collai ma paume contre la plaie qui barrait mon cuir chevelu. Une douce chaleur réparatrice se répandit dans mon crâne et, bientôt, la profonde coupure se referma, atténuant un peu la douleur qui me vrillait la tête comme une perceuse. Quand je fus pleinement soignée, Sandy me lâcha la main et se tourna vers Nika, qui tenait dans le creux de sa main une pierre de la taille d'une bille.

Incandescence - Livre I - L'éclat de l'acier [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant