Chapitre 35

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Ils avaient perdu trois heures dans la forêt, à essayer de grimper une montagne. Quand ils furent de retour à l'embranchement, celle avec la pancarte indiquant le chemin de trois villes différentes, le soleil était parfaitement droit dans le ciel. C'était une chaude journée, et après tous leurs efforts pour revenir au point de départ, Mishi était en sueur. Elle se tenait légèrement en retrait des elfes, espérant qu'avec tous leurs sens surdéveloppés, ils n'avaient pas de super odorat.

C'était peine perdue. Tous avaient cette senteur âcre dans le nez. Mais tous étaient convaincus que cela venait d'eux-mêmes.

Egrim était à bout de force. Il s'était trouvé malin ; quand le terrain devenait trop irrégulier, il s'était téléporté aussi loin que possible. Il l'avait fait à plusieurs reprises... mais évidemment, la téléportation demandait plus d'énergie que de marcher, surtout à répétition. Le contrecoup avait frappé plus tard ; le temps qu'il réalise qu'il n'aidait pas du tout sa cause, il était déjà épuisé.

Danayelle et Leerian se portaient bien. Ils avaient un peu chaud, mais c'était supportable. Pour eux, tout ce qui comptait, c'était la destination.

— Nous n'avons donc pas le choix ; je suppose qu'il faut prendre la direction de Nafar, dit Leerian à regret.

— Après une petite pause ? fit Mishi avec espoir.

— Ouais, ouais, grommela Leerian dans un soupir.

Tous les quatre s'assirent dans les herbes hautes, à l'ombre des arbres de la forêt. Le soleil était trop puissant pour se mettre à découvert.

Leerian sortit quelques plantes comestibles, récolté ce matin sur la plage, de son sac pour en donner quelques-unes à Egrim et Danayelle. Mishi, elle, sortit une gourde d'eau. Elle en but goulument, puis la tendit à Leerian à sa gauche. Celui-ci lui fit un sourire reconnaissant, puis avala à son tour une grande gorgée... avant de s'étouffer et de tout recracher au sol en suffoquant. Tout le monde le regardait avec des yeux ronds.

— Ça va ? dit Egrim. Faut que je te soigne de quelque chose ?

— C'est de l'eau de mer ! gronda Leerian.

Danayelle et Egrim explosèrent aussitôt de rire. Mishi fronça les sourcils, sans comprendre où était le problème. Enfin, Danayelle lui tendit sa propre gourde, le visage fendu d'un large sourire.

— Ça vient d'une fontaine de Wondor.

Leerian en but la moitié d'une seule gorgée avant de rendre le reste à la blonde. Puis il pouffa de rire pour lui-même.

Mishi plissa les yeux tout en observant tour à tour Leerian et Danayelle. Sur le coup, elle n'était pas du tout fière d'elle-même. Les elfes ne boivent pas d'eau salée. Noté.

— Alors, comment procède-t-on pour aller à Nafar ? demanda Leerian.

Tous le dévisagèrent sans prononcer un mot. Un moment de flottement parcourut le groupe, alors que Leerian continuait de manger simplement sa part de racine.

— Quoi ? Je n'ai pas à prendre toutes les décisions.

— C'est très... inhabituelle, fit Danayelle.

Elle sortit sa carte de Nyirdall de son sac et la tint de sorte que tout le monde puisse bien l'apercevoir. Puis elle toucha du bout du doigt le nom de la ville, Nafar, sur la côte est du pays. Aussitôt, le vieux parchemin s'anima. Mishi, Egrim et Leerian se penchèrent pour s'en approcher, tous émerveillés par cette magie. Sur ce qui semblait s'être transformé en écran de télévision, ils eurent une vue aérienne d'une bourgade tout près de la mer. C'était petit, comme avait dit autrefois Egrim ; ce n'était qu'un village. Presque toutes les maisons étaient faites en bois de rondin. Une odeur salée leurs montèrent au nez, accompagné du chant des mouettes et, au loin, du rire de trois enfants qui jouaient dans les champs, minuscule comme des têtes d'épingle.

la légende de Nyirdall, Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant