Le lendemain matin, le beau temps était enfin revenu. Plus de pluies, presque plus de vent. Le soleil était bien présent, d'une température idéale, ni trop chaude, ni trop froide. Egrim, seul sur son coin de plage désertique, avait dormi comme un gros bébé malgré l'inconfort. Il avait utilisé un long bout de bois, rongé par le sel de la mer, en guise d'oreiller.
Il se réveilla, ébloui par la clarté, en bâillant et s'étirant. Pendant un instant, il se crut dans sa chambre, dans son appartement. Avec ses parents et sa sœur dans la pièce d'à côté... sa famille qu'il n'avait pas revue depuis maintenant un mois.
Egrim ouvrit les yeux. Devant lui, il n'y avait que la mer à perte de vue. Quelques mouettes volaient au ras des vagues, quêtant des poissons à se mettre sous le bec. Leurs chants disgracieux résonnaient douloureusement à son crâne. Il avait mal à la tête. Il se sentait déshydraté. Il avait soif et faim, et tout ce qu'il y avait à sa portée était de l'eau salée. Il en était sûr, même Leerian ne saurait trouver des plantes comestibles ici. Il n'y avait que des palmiers et les herbes hautes. Son dernier espoir était les noix de coco.
Il risqua un regard vers le sommet des arbres, derrière lui. Mais ce qu'il y vit fut d'un tout autre genre ; un dragon fonçait droit sur lui.
À cette distance, il ressemblait plutôt à un drôle de rouge-gorge. Mais plus il approchait, plus le doute était impossible. Ses écailles d'un rouge luisant sur tout son long corps de serpent, ses quatre pattes reptiliennes, et surtout, ses deux grandes ailes membraneuses étaient reconnaissables entre mille.
Jean descendit en piqué pour un atterrissage parfait dans le sable, tout près d'Egrim. Il sautilla ensuite joyeusement jusqu'à lui, tel un chien difforme et particulièrement laid s'efforçant d'être mignon. Seul le mal de tête qu'il ressentait toujours empêcha Egrim d'éclater de rire.
— J'ai trouvé un bateau ! Il te sera visible à partir de la côte ouest de cette île. J'ai l'impression qu'il va vers Nyirdall.
— C'est vrai ?
Jean n'avait pas de sourcil. Mais s'il en avait eu, il les aurait froncés. Aux yeux d'Egrim, pourtant, son visage de lézard demeura parfaitement stoïque.
— Et pourquoi inventerais-je ?
Egrim haussa innocemment les épaules, puis se leva d'un bond et courut vers la droite, Jean volant près de lui. La direction n'avait pas vraiment d'importance, puisqu'il devait faire un tour complet de l'île avant de trouver l'ouest.
À la moitié du chemin parcouru, en revanche, il aperçut Danayelle, roulé en boule dans le sable. Il s'arrêta sur sa lancée, comme hypnotisé à la vue de son amie dormant paisiblement, ses cheveux blonds couvrant une partie de son visage. Il n'avait pas envie de la tirer de son sommeil, il voulut même continuer sa route. Mais il s'arrêta à nouveau au bout d'un seul pas. Il ne pouvait pas partir sans rien dire.
Il s'approcha, s'agenouilla près d'elle et posa doucement une main sur son épaule. Danayelle papillonna des paupières et, très lentement, se tourna vers Egrim.
— Oh, tiens, c'est Outré, dit-elle d'une voix fatiguée.
Egrim pouffa de rire. Elle n'était pas possible, cette fille.
— Réveille-toi. J'ai trouvé un bateau.
Jean lui cracha un jet de flamme sur la jambe. Egrim sursauta en balançant un coup de pied dans le vide ; le dragon s'était déjà éloigné, s'envolant juste assez haut pour se mettre hors de sa portée.
— OK, il a trouvé un bateau. Pardon !
— Il va nous mener jusqu'à Ashgar ?
Egrim hésita pendant une seconde. Rien qu'une, pourtant Danayelle l'avait tout de suite remarqué. Elle se redressa enfin, retirant les mèches folles de son visage pour braquer un regard sévère sur son ami.
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la légende de Nyirdall, Tome 1
FantasyDans le pays de Nyirdall vit un nombre incalculable de créatures : elfes, fées, sirènes et autres dragons. La féerie et la magie sont les maîtres mots de ces terres où la beauté n'est plus un critère à douter. Leerian y vit, reclus. Peureux et soli...