Chapitre 62

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Leerian et Danayelle, suivis de tout un escadron de matelot, avaient emprunté un radeau pour rejoindre le quai de Mefghan. C'était un très joli village, situé sur le sommet d'un cap et bordé par l'océan de tous côtés, sauf au sud. Un endroit que Danayelle aurait bien aimé visiter un peu, mais étant donné les circonstances, elle savait qu'elle aurait à peine la possibilité de regarder.

Le quai était très grand et grouillant de vie. Une dizaine de trois-mâts étaient dans la mer l'envoisinant, et tout un tas de barques ou d'autres bateaux plus petits y était amarré. Toutes les races, ou presque, étaient présentes. En bordure du port, des stands s'alignaient pour y vendre des fruits ou des brochettes de poissons. Le bruit des conversations joyeuses et des rires s'élevait de partout.

Quand Leerian et Danayelle y arrivèrent enfin, posant les pieds sur le quai, le brouhaha ambiant diminua d'un cran. En se retournant d'un même mouvement, tous deux menottés par devant, ils virent que tout un tas de gens les observait, bouche bée, et les yeux écarquillés.

— C'est eux ! s'exclama un elfe tout près. Danayelle Renwen et... Leerian Celeyste !

Il avait marqué une pause toute théâtrale, qui n'avait réussi qu'à arracher un soupir d'ennui à Leerian. Trois hommes de Lennar s'étaient déjà approchés de l'elfe en le menaçant d'un pistolet en clamant « pas touche, ils sont à nous ! »

— Ça fait bizarre de se dire que nous sommes célèbres, non ? fit Danayelle en se penchant légèrement à l'oreille de son ami.

— Si seulement nous l'étions pour un acte héroïque, ou quelque chose du genre...

Danayelle lui fit un petit sourire triste, mais avant qu'elle ne pût ajouter quoi que ce soit, Lennar, derrière eux, avait empoigné un coude chacun et les entrainait à travers le quai. Le chemin devant eux s'ouvrait par ses hommes de main, menaçant quiconque leur bloquant la route de leurs pistolets.

Ils avançaient lentement, Leerian grimaçant et grommelant à chaque pas. Danayelle se demandait ce qui lui prenait ; elle comprenait qu'il pouvait être épuisé, après la nuit qu'il avait passée, mais il semblait réellement souffrir, alors qu'il s'efforçait de ne pas le montrer. Elle savait qu'il était un loup-garou, ce qui expliquait pourquoi il était aussi endurant... et ça lui paraissait paradoxal qu'il soit, en ce moment, tellement faiblard.

Ils avaient traversé le quai en entier, marchant maintenant sur les routes de pierres du village en direction d'un champ caché par une mince forêt, quand la réponse à ses questionnements lui apparut enfin. C'était évident, pourtant ; les balles d'argents. Pour venir à bout de lui, la nuit dernière, Lennar et ses hommes l'avaient littéralement criblé de balles. Est-ce qu'elles étaient encore dans son corps ? Forcément.

Arrivés dans le champ, ils découvrirent une voiture au milieu des fleurs jaunes. Un lutin était posté à côté, attendant patiemment.

— Ah ! s'exclama Lennar. Voici le carrosse qui va nous conduire à la capitale.

— C'est quoi, ce machin ? demanda Leerian.

Lennar ricana pour toutes réponses, puis le poussa légèrement pour le faire avancer. Peu importe ce que ce « machin » était, Danayelle, Leerian, Lennar et ses six matelots ne pourraient jamais tous y entrer.

— Il y a de la place pour six à l'arrière, si vous vous tassez bien, dit le lutin qui avait pensé la même chose.

— Alors, Leerian, Danayelle, Jemry, montez à bord, dit Lennar.

Jemry se fit un plaisir de pousser les deux fuyards sur l'une des deux banquettes qui se faisait face l'une et l'autre. Leerian, incapable de se retenir, s'écroula au sol de l'habitacle un lâchant un bref gémissement de douleur. Danayelle l'aida à se relever et à s'asseoir, pour ensuite prendre place à ses côtés.

la légende de Nyirdall, Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant