Arrivé dans ma chambre d'hôtel, je me précipite pour prendre un bain. Je fais couler l'eau à température élevée, puis tout en me déshabillant, faisant glisser ma chemise sur mes épaules, je me regarde dans le reflet du grand miroir de la salle de bain. Je reste quelques instants à fixer les diverses cicatrices qui parcourent mon corps.
Les souvenirs remontent. Inlassablement et horriblement, comme des mains vicieuses qui de la pointe de mes pieds se dirigent vers ma gorge pour m'étouffer.
Comme si c'était hier, je sens de nouveau ce dégoût parcourir mon corps ainsi que tout le mal que m'a fait mon oncle, ce moins que rien.
Son regard malsain me surplombant avec dans sa main un couteau aiguisé, traçant ces lignes immortels et ineffaçables sur ma peau encore vierge, me disant que c'est de ma faute s'il fait ça, que j'en suis le seul responsable.
Des flash passent dans ma tête, je secoue celle-ci en prenant mon crâne entre mes mains.
-Putain, arrête ! M'exclamais-je.
La cave, le noir, la faim, la peur, l'incompréhension, ne plus avoir aucune notion de temps, tous ces souvenirs douloureux revenant d'entre les morts pour me hanter une nouvelle fois.
Mon sang ne fait qu'un tour et la lampe de la salle de bain clignote de plus en plus fort.
Soudainement, elle explose.
Je tente de me calmer, crispant mes doigts sur ma peau et essaye de contrôler ma respiration saccadée.
Je relève mes yeux dans la pénombre de la pièce et croise mon regard ayant tourné au bleu électrique sombre. Je m'effraie moi même.
L'eau a fini de couler. Sans un mot et une pensée, comme une poupée de chiffon, j'enlève mes derniers habits puis me plonge dans cette eau brûlante, comme pour noyer ce qui vient de remonter en moi.
Mais qu'est-ce que je suis devenu, Alexender ?
***
En sortant de l'ascenseur le lendemain matin, je croise My-Lê qui me dit :
-C'est toi qui a fait péter l'électricité de l'immeuble hier soir ?
Je passe à ses côtés sans un regard et hausse les épaules nonchalamment, ouvrant la grande porte massive devant moi.
Elle souffle en tapant du pied tandis que je m'éloigne.
-Keres.. Soupire t'elle agacée et dépassée.
Quelques minutes plus tard, m'étant faufilé dans la foule en faisant en sorte que personne ne me reconnaisse, j'arrive enfin à ce café. « George's coffee ». C'est l'un des seuls endroits de la ville où je peux me poser sans croiser ces stupides forces de l'ordre et de justice.
George, le gérant, me sourit tout en nettoyant une tasse derrière le comptoir. Il est toujours habillé de son fidèle costard noir et classe. Je l'apprécie, il n'est pas du genre à faire la discussion, ce qui m'arrange fortement.
Je m'assois à ma place habituelle, proche de la mini librairie décorée de plantes qui pendent depuis le plafond.
George s'approche de moi un instant plus tard avec un café, et ça sans même que je lui demande.
-Un café avec un nuage de lait, comme toujours. Dit-il en s'inclinant légèrement, puis se tournant sans un mot pour se remettre derrière le comptoir.
Je lui fais un signe de main pour le remercier, puis tout en attrapant un bouquin sur une étagère, je déguste tranquillement ce liquide marron.
Tout est calme, personne à part moi n'est là en cet instant de la journée. Je profite de ce moment où le bruit de la cafetière et des pages du livre que je tourne se font entendre dans ce doux silence.
Ça me repose, d'être loin de tout pendant un moment, dans ce café où je ne suis plus Keres le criminel recherché, mais juste Keres. Un client comme un autre qui vient prendre son café sans se soucier de rien ni de tout.
J'entends la porte du bâtiment s'ouvrir et la petite clochette sonner.
George prend la commande de la personne, et celle-ci s'installe à quelques tables plus loin que moi. Je n'y prête pas attention et me plonge dans ma lecture, celle d'un certain Osamu Dazai, un célèbre écrivain japonais de notre époque.
C'est alors que je vois le client se rapprocher de la bibliothèque, puis se mettre derrière moi pour attraper un livre.
Sa grande carrure me cache le soleil provenant de la vitre, qui lui me réchauffait un minimum avec cette froideur hivernale dans les alentours de la pièce dépourvue de cheminée pour nous maintenir au chaud.
Je relève les yeux, agacé, et avec stupeur je les ouvre grand en voyant ce blond en train de chercher un livre.
Amos.
Putain de bordel de merde, qu'est-ce qu'il fout là ?!
Sans le temps de sourciller, son regard croise le mien, et lui aussi paraît tout autant surprit que moi.
Sur des centaines de cafés dans tout Londres, pourquoi diable devait-il venir dans celui-là ? Qui d'autant plus est celui d'une ruelle paumée !
-Monsieur, votre commande est prête. Dit George à l'intention du super héros, le tout sans prêter attention à l'énorme tension qui vient de se créer entre nous deux.
-Keres ? Réagit-il à peine.
Sans attendre je me relève brusquement, faisant tomber ma chaise à la renverse et me recule d'un bond.
-Qu'est-ce que tu fais là ?! S'exclame Amos en reprenant ses pensées d'il y a quelques secondes, serrant les poings et se mettant en position de combat prêt à attaquer à n'importe quel moment.
-Tch, je peux dire adieu à ce café maintenant. Murmurais-je agacé.
Je relève le menton en le regardant de haut.
-Je te retourne la question, blondinet. Et tu ne vas quand même pas m'attaquer dans ce café, si ? Tu mettrais en danger la vie d'un innocent et détruirais le travail de toute une vie. Me moquais-je.
Il regarde autour de soi se rendant compte que ce n'est qu'un minuscule café en dessous d'un immeuble, non pas en grand état, qui pourrait s'écrouler facilement si un combat éclate entre nous deux.
-Bordel..
-Alors que va faire l'héros de pacotille Amos ? Détruire un café et possiblement tuer pleins de gens, mais attraper son plus vile ennemi ? Ou alors me laisser fuir et épargner leurs vies ? Demandais-je d'un ton moqueur et provocateur, ouvrant grand les bras.
Sayhnn
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Good villain
FantasyKeres est un super vilain frivole et sournois de 21 ans résidant à Londres en 1937, capitale dominée par des brigades héroïques. Dans l'espoir d'accomplir la promesse de vengeance faite à son premier amour décédé à l'âge de 13 ans, il formera une al...