Je suis rentrée il y a maintenant un peu plus d'une heure, et me voilà désormais bloquée devant mon ordinateur. Les mots ne me viennent pas, ou peut-être que c'est moi, qui ne viens pas à eux. Peut-être que je devrais les laisser venir tels qu'ils sont, sans vraiment y réfléchir. Les laisser se poser sur les touches de mon clavier, les laisser me guider. Mais ce n'est pas comme cela que ça marche. Il me faut un but derrière tous ces mots, une histoire à raconter, des actions à construire, des personnages à modeler. Sans tout ça, mes mots ne serviront plus à rien. Alors reviennent les doutes et les questions, sans même que je ne puisse les contrôler. Et si je n'étais pas faite pour écrire ? Et si j'avais idéalisé mes rêves d'enfant ? Et si cela ne fonctionne finalement pas ? Comment cela peut-il plaire à tous ces gens si ça ne me plaît déjà pas à moi ? Les si qui m'envahissent provoquent en moi une anxiété soudaine, et je ne me sens plus capable de quoi que ce soit. Je décide d'abandonner pour aujourd'hui et de refermer mon ordinateur avant de prendre mon téléphone et de m'étaler une nouvelle fois sur mon lit.
2 nouveaux messages de : Ayden.
Je ne sais même pas si je dois me réjouir à la vue de cette notification. Je le devrais, non ? Pourtant la seule chose que j'ai envie de faire, c'est de verrouiller de nouveau mon téléphone. Et si cela était important ? Il lui est peut-être arrivé quelque chose, qui sait ? Au fond, est-ce que cela m'importe tant que ça ? Bien sûr que oui, à mon grand regret... Je ne devrais pas m'attacher à lui, pas comme ça.
Ayden : Hey, comment tu vas ? Je n'ai pas eu de nouvelles aujourd'hui.
Ayden : J'espère que tu te portes bien. Je t'embrasse.
"Je t'embrasse" ? Je suis si vieille que ça ou ça fait juste des années qu'on ne dit plus cela ? Peu importe, le fait est que je n'ai rien à lui dire. Je ne sais même pas pourquoi il perd son temps avec moi, je n'ai pourtant rien de spécial. Et puis qui voudrait d'une fille rongée par ses doutes et ses peurs ?
Moi : Je vais bien, merci.
J'espère que cette réponse lui suffira. Je repose mon téléphone à côté de moi et commence à fixer le plafond. Je laisse mes pensées se perdre et m'envahir sans jamais résister. J'aimerais pouvoir m'y perdre éternellement, fuir mes peurs, fuir mon passé, mon présent et mon futur. Fuir une réalité parfois trop dure à accepter. Mais ma rêverie ne dure pas longtemps, à croire qu'Ayden ne perd pas de temps lorsqu'il s'agit de me répondre.
Ayden : On va dire que je te crois, je viendrai te chercher après les cours demain, et oui, tu n'as pas le choix.
Super. Encore pire que ce que j'aurais pu imaginer. On pourrait penser que je le déteste, et le problème c'est que c'est tout le contraire qui est en train de se passer. J'aimerais pouvoir m'en détacher, me dire que le bien-être qu'il provoque en moi ne m'est pas vital, que sa tendresse et sa gentillesse me sont égales, mais une fois de plus, ce serait mentir.
***
Je déteste les jeudis. Je déteste les gens. Je déteste ce prof. Oui, il y a pas mal de choses que je déteste, mais ça ne m'étonne plus moi-même. Il ne reste que quatre minutes de cours, et j'ai pourtant l'impression qu'il en reste bien plus. Le temps passe lentement mais trop vite à mon goût. Ayden doit sûrement déjà être devant le bâtiment, et moi je prie pour qu'il ait renoncé à venir. Une boule commence à se former dans mon ventre, mes jambes s'agitent et des bouffées de chaleur m'envahissent.
Par pitié, que cela passe au plus vite, je n'en peux plus.- Vous pouvez y aller, annonce le professeur en reposant ses fiches sur le bureau.
Hourra ! Ou pas... quand je sais ce qui m'attend.
Je range mes affaires avec précaution, vérifie d'avoir tout pris et quitte l'amphithéâtre avec précipitation. Les personnes autour de moi se précipitent vers la sortie, se bousculent, parlent fort, et moi je les maudis. Une fois arrivée dehors, je n'aperçois pas Ayden et ce n'est pas plus mal. Je me dirige alors tranquillement vers la cafétéria, mais quand j'y vois le monde qui s'y est précipité, je me résigne. Finalement, je crois que l'herbe c'est pas si mal non plus, alors je m'installe dans un coin peu occupé, à l'ombre, là où personne ne viendra à ma rencontre. Du moins, c'est ce qui est censé se passer, mais parfois les gens nous surprennent, agréablement comme...- Ah bah tiens, t'es là toi ?, me sort un garçon que je ne reconnais pas immédiatement.
- Qu'est-ce que tu me veux ?, lui réponds-je calmement en dépis de mon coeur qui n'avait jamais battu aussi vite.
- Roh ça va, toujours aussi coincée !, s'esclaffe-t-il.
Et alors que les larmes me montent aux yeux, je prends une grande respiration et essaie de me calmer. Je ne dois pas le laisser prendre le contrôle de mes émotions, je ne dois pas le laisser me faire peur, plus jamais. Je tente tant bien que mal de ne pas repenser à ce que je devrais oublier, mais déjà les frissons parcourent mon corps. J'aimerais qu'il parte, qu'il s'en aille, là, maintenant. Et plus que tout, même si cela est encore difficile à avouer, j'aimerais qu'Ayden soit là.
- Tu n'as pas d'autres choses à faire ?, lui réponds-je en évitant de le regarder.
- Ne me fais pas croire que je ne t'ai pas manqué Ambre, ajoute-il avec un mauvais rire.
Je ne peux plus bouger, je ne peux plus rien faire d'autre que d'éviter son regard et de prier pour qu'il parte. Je ne sais même plus si j'ai encore la force de parler. Je sens son regard peser sur moi, et cela devient de plus en plus insupportable. Je ne veux plus ressentir cela. Et alors que je croyais voir mon monde en train de s'effondrer autour de moi, et alors que je me croyais une nouvelle fois prise au piège avec lui, une voix s'adresse à moi. C'est à ce moment précis que je comprends que quoi que je fasse pour l'éviter, quoi que je dise pour me convaincre de choses absurdes, j'ai besoin de lui, et j'en aurai toujours besoin, plus que tout au monde.
- Ambre, je suis désolé d'être en retard ! Tout va bien ?, m'interroge Ayden, le regard bienveillant.
J'aurais aimé lui répondre, mais rien ne sors de ma bouche, ni un bruit ni un son. Je suis en train de pleurer. Son regard fait des va-et-vient de moi au garçon, et du garçon à moi, et à ma plus grande surprise, il se relève en une fraction de seconde et se pose face à celui qui, quelques secondes plus tôt, m'avait fait revivre un enfer.
- Qu'est-ce que tu lui as fait ? T'es qui toi ?, demande Ayden, la voix plus grave qu'à l'habitude.
Son adversaire ne lui répond pas, il se contente de le regarder dans les yeux et de lui sourire bêtement avant de poser une dernière fois son regard sur moi et de s'en aller. Les frissons qui parcouraient mon corps depuis plusieurs minutes déjà sont désormais accompagnés de violents tremblements et moi j'aimerais disparaître.
Ayden se rapproche doucement et s'assoit à côté de moi, le regard inquiet et désolé à la fois, mais s'il savait combien je le suis davantage. Il essuie mes larmes d'un revers de main en prenant soin de remettre une mèche de cheveux derrière mon oreille. Je le vois hésiter, douter. Que peut-il faire ? Alors je décide de me blottir contre lui, là où je ne risque plus rien, là où mes peurs s'apaisent et où mes doutes disparaissent. Une dernière larme vient couler sur ma joue lorsqu'il me sert enfin contre lui, et une autre suit quand j'entends ses mots.- Je suis là maintenant, tu n'auras plus jamais peur. Je te le promets.
Mais vas-tu vraiment tenir ta promesse ?
***
Nous sommes restés ainsi pendant de longues minutes, et je crois bien m'être endormie quelques instants. Ayden finit par se redresser doucement et me caresse légèrement la joue de sa main droite.
- Comment te sens-tu ?, demande-t-il toujours inquiet.
- Ça va un peu mieux, je crois., balbutié-je.
Je suis épuisée, vidée. Je ne sais pas de quoi j'ai envie ni encore moins de quoi j'ai besoin. Peut-être de sommeil, mais arriverais-je vraiment à dormir ? Ayden se relève et me tend la main afin de m'aider à le rejoindre. Je décide de le suivre, collée contre lui, son bras droit posé autour de moi comme un bouclier. Je ne veux plus avoir peur.
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C'était toi, malgré tout. [EN REECRITURE]
Teen Fiction"C'est donc ça ma vie désormais ? Ne plus pouvoir rien faire à cause de cette fichue anxiété sociale ? De quoi ai-je l'air ? Je ne peux pas rentrer comme cela de toute façon, qu'est-ce que l'on va bien pouvoir penser de moi ? Je n'ai rien pour plair...