PIÉGÉE

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Lorsque mon réveil sonne le lendemain matin, je peine à ouvrir mes yeux. J'ai la peau de mon visage qui tire et j'ai l'impression d'avoir la tête dans un étau. Je me fais violence pour sortir du lit et me traine dans un réflexe jusque dans la salle de bain. La lumière artificielle de la pièce m'aveugle un instant. Je passe de l'eau fraîche en abondance sur mon visage avant de me détailler dans la glace en face de moi. J'ai une mine affreuse. Mon teint est terne, mes yeux encore rougis et bouffis. Ce n'est pas la première fois que je me réveille dans cet état. Je souffle et me résigne à supporter encore une fois ces émotions négatives qui viennent s'incruster au plus profond de mon être. J'ai appris à vivre avec au fil des ans, à les laisser me posséder, me torturer...

Je me déshabille rapidement et saute dans la douche. J'y reste un très long moment laissant le jet d'eau chaude couler sur ma peau pâle. J'essaye de faire le vide dans mon esprit et d'occulter le coeur lourd qui pèse dans ma poitrine. Refouler mes émotions est ma meilleure défense, la seule que je connaisse pour me sentir mieux, ou pour donner l'impression de me sentir mieux.

En ressortant de la douche, je me détaille nue dans la miroir. Je me trouve laide, grosse, inutile. Je m'enveloppe immédiatement dans un peignoir et commence à me maquiller pour camoufler tous les signes de mon moment de faiblesse de la nuit dernière. J'abuse de beaucoup d'anti-cerne et de poudre et une fois à peu près satisfaite du résultat, fixe un sourire impeccable sur mon visage. Revoilà la Louise que tout le monde connait, celle que tout le monde aime, admire... J'attache mes cheveux en une queue de cheval desserrée très simple. Je sélectionne une tenue décontractée. Un jean sept huitième avec un petit top court à manche longue jaune qui aura au moins le mérite d'illuminer un peu mon visage. Je récupère une veste longue noire, mon sac à main et mes lunettes de soleil et appelle Alfred afin qu'il me dépose là où doit avoir lieu la lecture du scénario.

Richard possède, en plus de son activité de réalisateur, son propre théâtre dans lequel il diffuse les pièces de jeunes metteurs en scène londoniens. C'est là-bas qu'il nous a donné rendez-vous en plein milieu du quartier très animé de Covent Garden. Alfred m'attend devant l'hôtel comme à son habitude, la main sur la poignet de la portière.

- Bonjour Alfred, je dis en arrivant à sa hauteur.

- Bonjour Mademoiselle ! Comment allez-vous ce matin ?, il me demande.

- Appelez-moi Louise, s'il vous plait ! Et je vais bien, merci, je réponds avec un grand sourire.

- Bien mademoiselle... Euh... Louise... Je veux dire.

Je souris à mon chauffeur qui m'ouvre la portière pour que je puisse me glisser à l'intérieur de la berline. Il va récupérer sa place et nous nous mettons immédiatement en chemin. Pendant le trajet, je retire mes lunettes de soleil et arrange une dernière fois mon maquillage pour être impeccable. Je ne remarque pas immédiatement qu'Alfred m'observe discrètement dans le rétroviseur centrale. Au bout d'un moment, me sentant un peu démasquée, je remets mes lunettes et tourne mon visage vers la vitre. Je regarde les rues de Londres se réveiller et défiler devant mes yeux.

- Je ne voudrais pas être indiscret, Louise..., commence Alfred. Mais vous semblez très fatiguée.

Son affirmation, plus qu'une question, est très simple mais je comprends tout de suite les sous-entendus qu'il met derrière. J'ai toujours beaucoup de mal à faire disparaitre les signes de mes larmes et je crois deviner que cela se voit encore sur mon visage.

- Il n'y a pas de mal Alfred..., je réponds en gardant toujours la face. C'est simplement le décalage horaire.

- Bien... Vous m'en voyez rassuré. Une jolie jeune femme comme vous doit prendre le temps de se reposer et de se ménager..., me dit l'homme avec un voix douce et paternelle.

TRAQUÉE | • Tom Hiddleston •Où les histoires vivent. Découvrez maintenant