Chapitre vingt-quatre

6 2 2
                                    

— L'appel s'est bien passé hier ?

Holly et Lewis étaient attablés dans le salon, des boissons chaudes entre leurs mains. La veille, il était entré à la maison alors que l'appel vidéo était encore en cours. Il n'avait pipé mot et s'était occupé de son côté, sans faire attention aux retrouvailles de la famille White.

— Oui, merci Lewis. C'est un peu difficile de ne pas pouvoir tout dire, ils ne comprennent pas vraiment pourquoi je suis...comme ça. Mais l'essentiel est que je les rassure. Tu ne crois pas ?

L'adolescente avait besoin d'un avis extérieur. Elle avait besoin d'être rassurée, elle aussi, sur ses choix. Et le jeune homme le lui rendait bien. Il l'épaulerait autant qu'il le pourrait.

— Holly, tu as réussi à leur parler. Et puis, physiquement, ça se voit que tu vas mieux. Je suis certain que tes parents ont été soulagés par cet appel. Toi aussi, n'est-ce pas ?

Elle hocha la tête et esquissa un léger sourire. Cet échange entre la famille White avait apaisé tout le monde. Les parents étaient plus sereins et la fille était heureuse de reprendre contact.

— Tu veux un autre thé ? demanda-t-elle.

Lewis acquiesça et la jeune fille se dirigea vers la cuisine pour faire chauffer de l'eau. Soudain, elle sentit son cœur s'affoler et une odeur de brûler lui irriter les narines.

Le décor simple du salon s'évanouit à mesure de l'émergence d'une forêt plongée dans le noir et la fumée. Holly se raidit. À l'affût, elle tourna doucement sur elle-même, les yeux ronds. Que se passait-il ?

Sans prévenir, une créature volante passa non loin de son visage. L'adolescente sursauta et alla se cacher derrière l'arbre le plus proche. Les mains sur l'écorce du grand chêne, elle observa la scène qui se jouait devant elle. Des flammes jaillissaient de toutes parts, léchant maléfiquement les habitations feuillues sur les branches des arbres qui dépérissaient.

La jeune irlandaise sorti timidement de sa cachette. Cet effroyable spectacle était une autre vision. Elle ne craignait rien. Elle se devait d'ignorer la boule qui lui lacérait le ventre afin de comprendre ce qui était en train de se passer.

Des cris aigus lui parvinrent alors. Ces créatures volantes étaient des fées. Peut-être même étaient-elles le peuple d'Aïna. Holly espérait que ce qu'elle voyait ne se produisait pas en ce moment-même.

Le hennissement d'un cheval au galop lui fit faire volte-face. L'adolescente se figea. Un cheval noir se dressait non loin de là. Des boules de feu jaillissaient de ses naseaux telles des flammes crachées par un dragon en colère. Holly était terrifiée.

La dernière image apparaissant devant ses yeux devenus violets était celle d'un homme, vêtu de noir, tenant sa tête phosphorescente contre son flanc gauche.

Et Holly se mit à hurler, fermant les yeux de toutes ses forces. Elle voulait effacer ce qu'elle venait de voir. Elle voulait oublier tout ça. Toutes ces horreurs ne pouvaient pas être réelles.

Lewis tenait l'adolescente bouleversée par les épaules. Il pencha la tête en lui demandant de le regarder. Il lui assura que tout allait bien. Qu'elle était en sécurité. Qu'elle était avec lui. Mais la jeune fille secouait négativement la tête. Tout allait mal. Ses fées n'étaient pas en sécurité. Ses fées étaient seules.

Il prit doucement son visage pâle en coupe, dans ses mains et l'obligea à lui faire face.

— Holly. On trouvera une solution, ensemble. Ici, tu ne crains rien. Tu comprends ? murmura-t-il.

Les joues baignées de larmes d'impuissance, l'adolescente plongea ses iris violacées dans celles de Lewis. Cela l'apaisa et elle revint doucement à la réalité qu'elle avait quitté l'espace de quelques instants.

Épine GeléeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant