Chapitre quarante-et-un

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— Je suis quoi ?! Non. Non ce n'est pas possible. Mes parents me l'auraient dit !

Holly tombait des nues. Comment c'était possible ? Là, c'en était trop. Elle ne pouvait pas avoir une identité aussi complexe. Elle n'avait même pas encore dix-sept ans que sa vie se trouvait totalement chamboulée une nouvelle fois.

Aïna s'approcha de l'adolescente en papillonnant. De sa voix calme et douce, elle voulu lui donner plus d'explications.

— Holly. Tu restes la même personne. Cependant, Thrargolin a raison. Tu es née de deux fées. Toi et moi sommes du même peuple. Tu es une Changelin.

— Alors pourquoi je suis différente de toi ? Pourquoi je suis d'apparence humaine ? Pourquoi je suis également une Banshee ? Toi tu es simplement une fée ! Tu n'es pas comme moi !

Elle bouillonnait. Les larmes au bord des yeux, elle ne voulait pas craquer. Elle marchait à vive allure dans la petite grotte, ne tenant pas en place. Sa colère montait en elle, son sang en ébullition. Le peu d'objets qui habillaient l'habitat commençaient à tanguer ici et là.

— Mes parents le savent-t-ils ?

— Non. Ils ne savent rien. Tu es une Changelin. Les fées t'ont échangé à la naissance, avec le bébé humain de ceux que tu appelles tes parents.

— Mais c'est complètement insensé !!

La chaise sur laquelle elle était assise quelques minutes plus tôt, fut projetée contre la paroi et vola en éclats, rejoignant les légumes déjà éparpillés sur le sol.

Lewis essayait de recoller les morceaux. Holly était donc née de fées. Elle faisait partie du peuple d'Aïna. Cependant, elle est une Changelin, puisque échangée à la naissance par un bébé humain. Pourquoi ? L'adolescente se posait la même question, mais n'était pas en mesure d'entendre la réponse de suite.

Furibonde, elle hurla sa colère, envoyant valser tout ce qui pouvait l'être. Les portes des placards de la petite cuisine s'ouvrirent violemment. Par réflexe, l'hôte des lieux se protégea la tête et la créature ailée s'approcha le plus possible du plafond. Quant à Lewis, prudent, il s'avança vers son amie.

Holly le fusilla du regard et se hâta vers la sortie, se sentant soudainement très à l'étroit dans ce sous-terrain. Le soleil était si éblouissant, qu'il lui fallu quelques secondes avant qu'elle puisse se repérer. Elle en profita pour prendre une grande bouffée d'air frais et fit quelques pas pour s'éloigner de ce trou. Ne tenant plus, elle se laissa tomber dans l'herbe, sur les genoux, les mains plaquées sur le visage. Elle ne pouvait plus retenir ses larmes. Elle était épuisée.

Lewis la suivit, et s'installa doucement à ses côtés. Instinctivement, la jeune fille se lova contre lui, la tête contre son torse et le serra. Elle avait besoin de lui. Besoin de stabilité.

Il retira soigneusement les mèches de cheveux noirs qui s'étaient collés sur son visage à cause des larmes et glissait d'un rythme doux sa main sur son épaule dans un geste d'apaisement. Petit à petit, la jeune Holly se calmait et retrouvait une respiration presque normale.

Le silence était roi. Et les minutes s'égrenaient tout doucement. L'adolescente avait besoin de calme, après avoir dégagé tant de colère et d'émotions fortes. C'en était trop pour elle.

Elle renifla sans une once d'élégance et leva ses yeux humides vers Lewis. Les lèvres toujours tremblantes, et la voix rocailleuse, elle s'exprima.

— Ce n'est pas vrai tout ça, hein ? Je suis normale, non ?

Le cœur de Lewis se serra. Les iris d'un violet intense étaient encore noyées. L'adolescente avait besoin d'aide. Elle souhaitait, du plus profond de son être, se réveiller à l'aube de ses seize ans et être une personne totalement « normale ». Il le voyait, dans son regard.

Épine GeléeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant