Chapitre 10

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Épuisée, je m'affale sur mon lit. Une journée de travail m'attend mais j'ai besoin de sommeil. Je ne prends même pas le temps de retirer le costume ridicule que je porte, mes paupières s'alourdissent aussitôt et je sombre dans une profonde léthargie.



Le soleil est haut dans le ciel lorsque je me réveille. Mais comme à l'ordinaire, d'épais nuages tourmentés cachent les rayons chauds. Malgré ce détail, je n'éprouve aucun frissonnement. Et le corps de Tampia y est sans doute pour quelque chose.

— Dis-donc, remarqué-je d'une voix pâteuse, tu n'as pas le droit de rentrer à la Mer des Passions.

— Tu n'est pas heureuse de me voir ? sourit-il simplement.

— Si tu me fais un massage pour me retirer toutes ces courbatures, je m'arrangerai avec la mère maquerelle pour que tu aies une carte d'entrée de la maison. Tu es passé comment, d'ailleurs ?

— Deux astres totalement folles m'ont fait entrer.

— Bah tiens...

Il se redresse sur le lit et se penche à la fenêtre.

— Quelle chance d'avoir une vue pareille ! On aperçoit même Calca !

— Je me demande si le climat est plus clément là-bas...

— En effet. Mais je préfère être ici. Dans le lit d'une jolie gnome.

Je lève les yeux au ciel et lui demande implicitement de me délasser le corset. Si ça continue, je vais exploser, boudinée comme je suis. Par contre l'autre va vouloir en profiter pour placer quelques mains baladeuses.

— Ton nouveau travail te plait ?

— Non.

— Il n'y a pas de beaux princes qui te font d'alléchantes propositions ?

Je me tourne vers lui, enfin débarrassée de ma camisole :

— Tu ne veux pas que je file dans d'autres bras, hein ? gloussé-je.

— Je préfèrerais une relation plus exclusive entre nous, si tu ne vois pas d'inconvénient.

Voilà une proposition qui me plait. Ça montre bien qu'il me voit bien différemment des autres. Mes amies du bordel diraient qu'il se montre possessif mais s'il ne l'était absolument pas, ne voudrait-ce pas dire qu'il ne tient pas à moi ? Je crois surtout qu'il est facilement jaloux et c'est un petit défaut que je trouve mignon quand il n'est pas trop exacerbé.

— C'est dans les deux sens, souris-je avec les lèvres pincées.

— Bien évidemment.

Il se penche vers moi et m'embrasse. Bon, je ne vais pas lui faire la remarque mais à l'avenir, il ferait mieux d'éviter les plats épicés.

— Tu voudrais bien retirer ces plumes ? Tu ressembles à une poule.

— Ne critique pas mon tutu !

Même si je l'apprécie peu. Une fois ce déguisement par terre, je semble enfin respirer convenablement. Je me penche pour attraper mes vêtements pour la journée alors que le gnome fait mine de me saisir la taille.

— Non. Pas aujourd'hui.

— Mais pourquoi ?

Sa tête atterrée me provoque un fou-rire. Et non, mon coco. Va falloir se retenir pour la prochaine fois.

— Tu n'es pas gentille.

— Lâche-moi, coquin.

Il est vraiment décidé à tirer son coup, lui. Mais je ne le laisserais pas faire : il doit comprendre que ce n'est pas libre-service ici.

Journal d'une Soubrette en GoguetteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant