Chapitre 25

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Désormais étendue sur ma couchette, je désespère de la disparition de mon livre. Quel dommage !

Au loin, j'entends les cors résonner au loin : l'armée elfique revient.

J'espère que Morgal a survécu aux batailles. Je pourrai ainsi mettre mon plan à exécution. Ce ne sera pas simple : un prince elfe, couplé d'une nature de Réceptacle, possède un Vala extrêmement puissant. Une blessure, à l'arme blanche, ne lui fera pas grand-chose à moins que je ne le décapite. Mais c'est bien trop rapide comme méthode. Et puis, je veux rester sur un empoisonnement bien atroce qui le défigurerait. Ça va prendre du temps avant que j'élabore un plan suffisamment précis.

Avant tout, je devrai préparer ma fuite.

Il me manque des armes aussi... Je devrais forcément trouver l'armurerie...

— Püpe ?

— Quoi ?

— Tu penses quoi du nouveau majordome ?

Loula a toujours le don de m'interrompre dans mes complots. J'ai horreur de ça.

— Qu'est-ce que ça peut te faire ? maugréé-je, lorsque le prince Lorian sera revenu, il s'empressera de lever le camp. Tu partiras aussitôt.

— C'est vrai. Mais il est drôlement charismatique.

Oui, et toi, tu es drôlement bête. Ceci-dit, je me demande si je ne coucherai pas aussi avec Bradh. Va falloir que j'arrête, là, je commence à filer un mauvais coton.

Je porte à croire que ma maladie mentale développée à la mort de maman s'accompagne d'une nymphomanie croissante. C'est sûr que lorsque j'étais avec Tampia, je voulais toujours qu'il me prenne le plus possible. Je vois où ça a mené... Mais depuis, j'ai décidé de ne plus m'attacher à une autre personne que moi. Je suis devenue libre. Oui, libre de toute affection et de toute déception. Mais très seule.

Dépitée, je me gratte la tête, forcée de constater l'étendue des dégâts sur mon comportement. Elle est bien loin, la petite Püpe de seize ans.

— Je ne suis pas mécontente de partir, malgré ça, affirme Loula en pliant sa latte.

— Ah oui ?

— Ce lieu est vraiment trop étrange. Hanté, je dirai. Personne n'a une attitude saine, je trouve.

— C'est sûr.

— Je ne veux pas jouer la gnome experte, mais méfie-toi du gnome qui traine avec le prince Morgal.

Je la regarde, dubitative :

— Binou ? Il ne ferait pas de mal à une mouche.

— Détrompe-toi. Je l'ai vu l'autre jour emprunter des couloirs interdits. Il accompagnait des elfes assassins. À mon avis, ce n'est pas un simple serveur, si tu vois ce que je veux dire. Les gnomes-familiers demeurent toujours un peu dangereux. On ne sait pas ce que leur maître leur demande de faire, en privé.

Franchement, ma Loupiote n'est clairement pas une menace. Enfin... Il a quand même occis un loup énorme à Yucalë. Mais je mettrai plutôt ça sur le dos de la chance. Parce que pour l'instant, je doute qu'il sache vraiment se servir ne serait-ce que d'un cure-dent !

Mais on n'est jamais assez prudent. Je voudrais bien connaitre ces couloirs interdits, moi. Ainsi que les combles au-dessus de ma tête. Chaque pièce du palais doit être répertoriée dans mon crâne.

Une petite excursion d'exploration s'impose, je pense ! Dans le palais et dans la ville, d'ailleurs. Je dois établir une base de repli où je pourrais déposer mes affaires utiles pour ma quête de vengeance. Je doute que ma chambre soit un lieu assez sécurisé pour garder des armes et des bouteilles de poison. Bradh aurait tôt fait de me repérer avec son esprit maniaque, trop impliqué dans sa tâche de majordome. Et je doute que d'agréables caresses le distraient suffisamment. C'est sûr que de ce point de vue-là, rien avoir avec Binou qui s'est empressé de baisser son futal.

Journal d'une Soubrette en GoguetteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant