Chapitre 14

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J'ai fait ce que j'avais prévu. J'ai rendu mon tablier à Méléra pour me mettre au service de Lucasse. Les filles ont toutes été très tristes de me voir partir et surtout, prises d'une incompréhension visible. Je les ai rassurées et j'ai précisé que je viendrais leur rendre visite souvent.

Je me suis alors installée dans les loges des danseuses. Lidjo m'en a trouvé une que j'ai aménagée et rendue convenable. J'y ai fait mon petit cocon douillet. Le livre de Djinévix ne m'a pas quittée pendant cette période de transition. Je le lis souvent et j'y apprends nombreuses choses que bien peu de gens savent, à mon avis. Cela gonfle mon orgueil, il est vrai, mais aussi raffermit ma confiance en moi. Je n'ai pas à être uniquement une vulgaire soubrette. Pourquoi ne pas penser changer les choses ? Ne pas essayer au moins ? J'y laisserais sans doute ma peau mais ce sera pour la cause que j'aurai voulu.

À côté de toutes ces tergiversations, je me suis perfectionnée dans mon nouveau métier. La danse me plait, finalement. Même si cette dernière doit s'exprimer de manière très provocante et sensuelle, l'impact sur le public est immédiat et je trouve ça jouissif. C'est un contrôle comme un autre après tout. J'ai même accepté de chanter pour le plus grand bonheur de Lucasse. Ma voix charme les foule, c'est un avantage. Mais ce n'est qu'un moyen pour moi de continuer mon plan de vengeance.

Malheureusement, le gros astre ventripotent et répugnant ne s'est plus jamais manifesté ; cela me rend dingue car c'est lui qui a jeté maman dans la gueule des murènes après lui avoir sectionné les jambes. Je le retrouverai bien un jour pour lui faire payer.

Quant à Lucasse et ses deux lèche-bottes, je prévois déjà la manière avec laquelle je vais les renvoyer au créateur. D'ailleurs, pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? Je vais me débarrasser aussi des autres gardes. Personne dans cette loge n'échappera.

Mais je me suis vite confrontée à un souci majeur : je n'ai aucune expérience dans les arts du combat et je doute que la ruse me sauve la mise à chaque fois.

Je me suis donc aventurée dans les bas-fonds de la forteresse pour regarder les combats à mort des fosses. Je me suis intéressée à leur technique et j'ai expérimenté ce que j'apprenais. Oui, je n'ai pas honte de le dire, j'ai commencé à m'attaquer aux déchets qui trainaient dans les couloirs désertés de la forteresse. J'ai failli y laisser plus que des plumes, il est vrai. Mais tous les jours je m'y rendais pour trancher des gorges et crever des yeux. Une tactique s'est peu à peu mise en place à mesure que je travaillais : je commence par trancher les chevilles de mon adversaire afin qu'il finisse sur les genoux. Ensuite, j'attends gentiment qu'il s'impatiente tout en esquivant ses attaques. Il multiplie alors les inadvertances et je finis par lui trancher la gorge. Comme je n'ai aucune force de frappe, je suis contrainte de me pencher sur des livres d'anatomie, empruntés à Djinévix, pour déceler les parties du corps plus sensibles. Je me suis aussi attardée sur les remèdes possibles en cas de blessures graves.

Tout a été finement calculé.

J'ai d'ailleurs profité de mes visites près des fosses pour développer mes talents de détrousseur. Grâce à ça, je rassemble un petit pactole.

Mais trêves d'explications, ce soir, je passe une nouvelle fois à l'attaque et je supprime le dénommé Rilay. Celui-là voulait me jeter dans le bassin.

Comme il me méprise fortement, je doute qu'il accepte de m'emmener gentiment dans sa chambre.

Qu'importe, je vais l'empoisonner et une fois qu'il sera à vomir ses tripes dans la salle bain, je lui ferai regretter d'avoir été créé.

La mine déjà satisfaite de mon prochain forfait, je brosse mes longues mèches claires. Quelques mois se sont encore passés depuis la mort de maman et j'ai changé. À force de danser, mon corps grassouillet a fondu pour laisser place à une plus grande fermeté musculaire. Je ne peux m'empêcher d'être satisfaite de ma taille désormais élancée et de mon ventre plat. Mes joues se sont aussi creusées pour laisser ressortir mes pommettes. Malgré ça, je garde une tête bien ronde. Et ma poitrine n'a pas disparu comme je m'y attendais. Avec ça, j'ai désormais un corps très sexualisé qui ne laisse pas les hommes indifférents. Je le vois bien avec Tampia qui n'arrive jamais à rester en place lorsque je lui rends visite. Il est alors à pleine vapeur et ne se calme qu'après une bonne partie de jambes en l'air.

Journal d'une Soubrette en GoguetteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant