Chapitre 38

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Les semaines qui ont suivi ont été extrêmement éprouvantes. Cette fois-ci, mon état s'est fait sentir et j'ai commencé à avoir d'horribles nausées. Je perdais des forces et Tchyl a convaincu son cher et tendre époux de m'incarcérer dans une pièce plus chaleureuse où j'ai pu me concentrer plus calmement sur moi-même sans subir les cris des autres prisonniers.

Ici, j'ai le droit à un lit douillet et à un nécessaire de toilette. Il a fallu que je change de vêtements aussi : j'avais lavé ma tenue d'assassin pour la renfiler mais je ne rentre plus dedans. Le pantalon et la brassière ne sont plus à ma taille, je crains.

Comme mon ventre commence gentiment à s'arrondir, je me rends davantage compte de ce qui se trame. Je vais réellement devenir mère ? L'image de ma propre génitrice me revient en tête et me pousse à devenir comme elle. J'aimerais tellement qu'elle soit là pour m'aider. Maman aussi a dû s'occuper d'un enfant alors qu'elle était seule, il est de mon devoir de faire de même, malgré ma folie. Si je peux au moins donner naissance à un petit gnome qui ne pensera pas comme la masse...

Mon instinct maternel s'est éveillé apparemment, et m'a transformée en guimauve ambulante. Jamais je n'aurais pensé vivre ça un jour, mais je m'attache petit à petit à mon bébé. C'est la seule chose qui me rend heureuse. Tout s'est effondré autour de moi. Ma vengeance tombée à l'eau, mon compagnon disparu, et le reste d'une vie derrière les barreaux.

Comment m'échapper alors que mon état me l'en empêche ? Je commence à craindre que l'on me sépare de mon enfant. Il n'en est pas question !

Pour calmer mes nerfs, je tricote et couds des petits vêtements afin de préparer la venue du petit. Et comme j'ai réellement besoin de m'apaiser, j'ai déjà confectionné toute une garde de robe.

La porte s'ouvre soudain sur Arquen qui pénètre dans ma chambre avec sa nonchalance habituelle.

— Alors, comment va notre criminelle ?

— Je tricote.

— Que le Créateur ait pitié de nous si tu nous fabriques un deuxième Binou.

J'inspire longuement et demande :

— Où est-il ?

— Quelque part avec le prince. Il va bien si ça peut te rassurer. Tu lui dois une fière chandelle, d'ailleurs. Grâce à lui tu vas pouvoir sortir de prison.

L'espoir me soulève le cœur :

— C'est vrai ?! m'exclamé-je.

— Oui, mais si tu veux vivre librement, tu devras t'exiler. J'ai une adresse pour toi à Arminassë.

La capitale de la Reine Vierge ? De mieux en mieux !

— Tu partiras dans quelques jours, continue l'hybride, avant que ton état t'empêche de voyager.

Je me lève déjà, prise d'une frénésie de rangement. Je dois préparer mes affaires. Fanyarë est le meilleur endroit pour élever mon enfant, loin de l'esclavage elfique. Tout se goupille comme il faut. Je garde le regret de ne m'être vengé de Morgal mais à l'heure actuelle, je suis incapable de penser à un meurtre. Je suis sur le point de donner la vie, que diable !

— Il y a une surprise pour toi derrière la porte, au fait.

Mes oreilles se dressent de curiosité. En effet, Alças apparait et s'élance dans mes bras.

— Ma petite puce, tu m'as fait une de ces frayeurs ! Qu'est-ce qu'il t'a pris.

— Tu savais que j'ourdissais un crime dans mon coin.

— Vilaine gnome. Heureux de te voir en bonne santé.

— Mais...

Il rougit de plaisir devant la découverte que je fais. Ma fée préférée a retrouvé ses ailes ! Et elles ont l'air de fonctionner à merveilles.

Journal d'une Soubrette en GoguetteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant