CHAPITRE 18 - Maya

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Maya,

Si tout va bien, tu devrais recevoir cette lettre. J'ai tellement de choses à te dire. Si tu savais. Je sors de mon premier rendez-vous chez une psychologue. Une vraie de vraie. Parce que j'ai besoin d'aide, je crois que tu le sais. C'est pas facile, en ce moment, c'est pas la joie. Mais j'ai envie d'aller mieux. Le seul moyen que j'ai trouvé, c'est de m'éloigner de toi. Mais comment m'éloigner de quelqu'un que je suis même pas sûre de connaître ? Peut-être que c'est de moi que je devrais m'éloigner. Je sais pas trop. Tu sais, je lui ai raconté, à la psy, elle m'a pas prise pour une folle. Ça m'a fait plaisir, parce qu'en ce moment, j'ai l'impression qu'il n'y a que du jugement dans le regard des gens quand ils me voient. Ou plutôt, non. Ils me regardent, mais ils ne me voient pas. C'est dur de voir la différence. Personne me voit, ils me voient comme ils ont envie de me voir, jamais comme je veux qu'ils me voient. C'est horrible, non ? Grandir, et faire comme si tout allait bien, alors que non, ça va pas. Quand on me demande, je réponds en souriant que ça va, mais c'est quoi, aller bien ? C'est rien, c'est juste un truc de plus que les autres attendent de nous. Pourquoi tu crois que tout le monde se sent forcé de répondre oui quand on leur demande si ça va ? Si on répondait non, les autres nous diraient qu'on fait ça pour l'attention ou je ne sais quoi. Alors que dire « comment ça va ? », ça entraîne tellement plus de conversations. Si tu demandes ça à quelqu'un d'autre, alors il pourra t'expliquer sa vie, ses ressentis, et toi faire la même chose. Alors, Maya, comment ça va ? J'espère que tu te portes bien.

Je divague, je m'éloigne de mon objectif de base. Je voulais te remercier. Alors merci. Merci d'être là, d'être toi, d'exister juste. Je n'arrive pas à croire que je suis en train d'écrire ça... Ça me paraît si cliché. Mais sache, Maya, que grâce à toi, j'ai appris beaucoup de choses. Sur moi, sur toi, sur les autres. Je n'ai pas d'exemples, là, maintenant, je t'avoue. Mais avant de te connaître, souvent, j'avais juste envie de construire une machine à remonter dans le temps, redevenir une enfant, même juste pour cinq minutes. Tout allait si bien. Y avait pas de brûlures sur mes épaules, pas de cicatrices de coupures sur ton corps. Je sais même pas pourquoi je me brûle volontairement, je n'en ai aucun souvenir. Je ne me comprends plus. On attendait rien d'autre de nous que d'avoir de bonnes notes, et à l'époque c'était si facile. Pourquoi on grandit, dis-moi ? Etre adulte, c'est bien aussi, mais être juste une enfant heureuse me manque tellement. J'ai peur de l'avenir, Maya, je sais que toi aussi. Bref.

Ce que j'essaie de te dire, Maya, c'est que je t'aime. J'aime tout de toi. Tes cicatrices, ta façon de t'habiller, de rire, de sourire, de pleurer, ce que tu caches, ce que tu montres. J'ai si envie de te voir en vrai, te serrer dans mes bras, t'embrasser, te montrer à quel point je t'aime. Parce que c'est le cas. J'en ai tellement mal, si tu savais, je souffre. Je pleure, je tremble, ma respiration est sifflante. J'ai tellement envie de te voir. A tel point que je pourrais en crever.

Je t'aime, Maya.

Mais c'est impossible, pour toujours et à jamais impossible.

Je t'aime, Maya. Merci de m'avoir fait découvrir l'amour.

Lilah.

En voyant la lettre sur son lit, arrivée là comme par hasard, Maya a paniqué. Bonne nouvelle, mauvaise ? Assise en tailleur sur le sol, ses larmes trempent le papier. Ce n'est même pas son écriture. Maya a un rire jaune. Elle a tout écrit à l'ordinateur, sérieusement ! Ça lui enlève son humanité. Mais tout ce que Lilah lui a envoyé... Ca résonne, dans sa tête, dans son corps, dans son cœur. Ca réchauffe son âme, lui brûle la cage thoracique. Elle a besoin du contact de Lilah, ça devient de plus en plus urgent. Elle la veut face à elle, pas à travers des esprits, des espaces temps, pas à travers des artifices. En vrai. En réel. En 3D. Pourquoi est-ce impossible ? Elle ne sait pas, mais qui le sait réellement, à part Lilah ? Personne. Au moins, Lilah sait qu'elle a besoin d'aide, elle ose enfin en demander, sortir de sa muraille. Si Céleste savait ce qu'elle avait causé... Maya voulait lui enlever le sourire satisfait qu'elle a en permanence collé au visage, qu'elle peut voir à travers Lilah. Le lui enlever à coup de poing. Mais ça aussi, c'est impossible, parce que Maya ne sait rien de la vie de Lilah, de sa vraie vie, à part cette impression de déjà vu, comme en demi-teinte. Mais surtout, l'impossibilité l'énerve. Pourquoi devons-nous toujours dépendre d'une chose impossible ? Est-ce si compliqué de trouver une chose facile à atteindre, facile à aimer ? Ou peut-être que non. Peut-être que l'humain est fait pour aimer à en souffrir, peut-être qu'il aime souffrir.

Pourtant, une chose est sûre. Lilah aime Maya à en mourir, et Maya aime Lilah à s'en briser la poitrine.


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bonjour :)

j'ai modifié les prénoms des personnages, pour rendre le récit plus compréhensible : 

Marie est devenue Mila

Julie et Julia sont devenues Maëve et Céleste, etc,etc :)


Le fil rougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant